A Montpellier le Barricade rouvre enfin et en grand
Le lieu anticapitaliste a trouvé des locaux beaucoup mieux adaptés à ses activités. Sa relance est aussi l’occasion, pour Le Poing, de s’intéresser à La Grève, un espace cousin, ouvert à Frontignan.
Huit ans déjà ! C’est en 2014 que Le Barricade ouvrait ses portes, dans un petit local de la rue Aristide Ollivier, quartier de la gare à Montpellier. Pour lui comme pour d’autres, pour tous, les deux dernières années ont été celles du Covid, ses confinements, ses flottements, également militants, après le formidable embrasement né des gilets jaunes. Mais on ne perdait rien pour suspendre. Ce samedi 11 décembre, le Barricade rouvre. A une nouvelle adresse, toujours centrale, quartier Rondelet. Et en grand. Une superficie démultipliée offre des espaces mieux répartis, adaptés à une diversité d’activités.
Les objectifs du Barricade sont très clairs depuis le début, portés par un noyau actif d’une dizaine, d’une vingtaine de bonnes volontés qui se relaient et se renouvellent : le lieu, non partidaire, est ouvert à toustes celleux qui veulent faire vivre des idées et des actions révolutionnaires et anticapitalistes.
Pour certain·es, il est un simple lieu de convivialité. On en pousse la porte après s’être acquitté d’une adhésion pour une somme modique. On n’a pas à y présenter un CV militant authentifié. On peut y croiser des personnes auxquelles bien des lieux publics mais de gestion privée fermeraient leurs portes. On y trouve buvette aux tarifs les plus sympas, et occasions de discussion sans fin. Quant à la plus grande histoire, l’un des adhérents du lieu rappelle : « C’est ici que s’est tenue la toute première assemblée générale du mouvement contre la Loi travail sur Montpellier. Ça avait fait salle comble ».
Certaines réunions de Gilets jaunes, ou la très régulière Assemblée montpelliéraine contre les violences d’État s’y sont trouvées chez elles. Mais aussi quantité de conférences, présentations d’ouvrage, un ciné-club, un café philo y ont fonctionné, entre autres. « Naturellement plus discrète, mais absolument essentielle » estime toujours Camille, a été l’activité des cours de français langue étrangère dispensés aux migrants – gros succès. Sans oublier des pratiques partagées de couture, réparation de petits équipements, soutien solidaire dans les démêlées administratives.
Il n’y a aucune raison que cette liste s’écourte. Ce samedi en début de soirée au 5 rue Bonnie, avant d’en passer aux nourritures matérielles (20 heures), et élans festifs (21 heures), une nouvelle présentation du lieu fera place à toute nouvelle proposition d’activité qui se présenterait et serait à discuter.
Faut-il mettre le Barricade montpelliérain sur le même plan que La Grève à Frontignan ? Cet autre espace a ouvert là-bas l’été dernier, au 19 bis boulevard Victor Hugo. On capte un cousinage entre les deux, comme lieux de sociabilité et de partages d’idées et de pratiques à l’abri de la relation commerciale, et dans un engagement anticapitaliste. Les deux endroits restent néanmoins différents. Au lieu des trois soirées hebdomadaires du Barricade, La Grève n’ouvre qu’un seul créneau de pure convivialité, les jeudis en début de soirée. Tout ce qui se déroule par ailleurs relève d’une adhésion à un projet plus poussé de “coopérative intégrale”. A Frontignan se retrouve celle du Bassin de Thau, où elle se traduit tout autant sur un terrain partagé à Poussan, ou sur un étal de marché à prix concertés entre agriculteurs.
Le projet est intégral, structuré, il existe dans bien d’autres régions et pays. Les “coopératives intégrales” entendent articuler un engagement anticapitaliste tout à fait actif d’une part (avec les Gilets jaunes, contre la loi Sécurité, ou en élaborant un texte très fouillé sur la question du pass), et d’autre part des pratiques concrètes d’alternative anticapitaliste. Prendre part à cette Grève, c’est se reconnaître dans une charte de principes très élaborés, c’est assister tous les mois à une assemblée générale ouverte. C’est aussi s’activer dans l’un des divers groupes de travail qui réinventent le rapport entre parents et enfants, ou bien abordent le corps sous le jour des critiques féministes, sinon l’autonomie des démarches de soins alternatives au système médical dominant, etc. « Pour nous réarmer face au capital, nous devons aussi forger des modes de vie qui tendent à lui échapper », est-il expliqué.
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