Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | A Gaza aussi l’espoir, en Octobre, est rose !
4 novembre 2025Compte rendu d’un atelier de soutien psychologique pour les femmes au camp d’Al- Sumud fin Octobre.
Lorsque nous sommes arrivées au camp Al-Sumoud dans la zone Al-Mawasi, secteur de Khan Younès, le matin portait dans ses brises un mélange de chaleur et de tristesse, et les visages des gens reflétaient la fatigue des longs jours qu’ils avaient passés dans les tentes du déplacement. La séance d’aujourd’hui, intitulée Octobre rose : sensibilisation au cancer du sein , avait pour objectif d’être un espace psychologique sûr pour que les femmes sentent qu’elles sont capables de prendre soin d’elles.
Nous avons commencé à préparer le lieu dès tôt dans l’une des grandes tentes qui avait été dédiée à cette activité : nous avons disposé les chaises en cercle et accroché quelques affiches roses évoquant l’auto-examen du sein. Peu à peu les femmes commencèrent à arriver — trente participantes de divers âges, affichant sur leurs visages à la fois l’épuisement et la curiosité. Certaines étaient venues de camps plus éloignés à l’intérieur d’Al-Mawasi, traversant le sable en quête d’un moment de répit, d’un mot d’encouragement.
Dès leur entrée, nous remarquâmes que l’anxiété planait sur le lieu comme une ombre persistante. Les murmures des femmes tournaient autour des récents nouvelles de la violation du cessez-le-feu et des frappes qui avaient touché toutes les zones de la bande de Gaza, et de la peur que la guerre ne recommence à tout instant. Certaines femmes avaient amené avec elles de jeunes enfants, n’ayant personne à qui les laisser, comme si la peur pour la vie était devenue un compagnon quotidien inséparable. Nous ressentîmes que la séance ne devait pas seulement porter sur la sensibilisation à la santé, mais qu’elle devait être un véritable exutoire psychologique face à cette angoisse collective.
Elles s’assirent en cercle devant nous, et ce que nous fîmes en premier fut de demander à chaque femme de dire son nom et de partager un mot qui décrivait son sentiment à ce moment-là. Les mots succédèrent : « inquiète », « fatiguée », « effrayée », « assoiffée de repos ». Ces premières minutes furent comme un miroir sincère de l’intérieur de chaque femme.
Une activité de soutien psychologique pour briser la glace et alléger la tension. Nous avons demandé à toutes de se tenir debout en cercle, de fermer les yeux quelques instants, puis de prendre de grandes respirations en répétant la phrase : « Je suis ici… je suis en sécurité… et ceci est ma place. » Nous leur avons expliqué que cet exercice s’appelle « relaxation consciente », c’est un moyen de se reconnecter à soi-même et de ressentir la sécurité dans l’instant présent. Nous sentîmes à ce moment que la séance commençait à s’épanouir doucement comme une fleur rosée au matin.
Ensuite, nous passâmes au premier axe de la séance : aborder le concept du cancer du sein. Nous leur disions que la maladie ne signifie pas la fin, et que le dépistage précoce offre une grande chance de guérison. Aussi avons-nous pris soin d’entourer les informations d’un langage d’espoir, en mentionnant que la science aujourd’hui offre de nombreuses solutions, que l’essentiel est la conscience et la connaissance. Nous expliquâmes comment la tumeur se forme, comment elle peut être détectée tôt, et distribuâmes des schémas explicatifs illustrant les étapes de l’auto-examen du sein. Nous récitâmes l’histoire d’une femme qui avait survécu à la maladie parce qu’elle avait remarqué tôt un changement mineur et ne l’avait pas ignoré. Pendant l’histoire, nous remarquâmes que les femmes écoutaient profondément : certaines posèrent leur mains sur leur poitrine sans même s’en rendre compte, comme si l’histoire avait éveillé en elles un nouveau sentiment de responsabilité envers leur corps.
Puis commença la partie pratique de la séance. Nous présentâmes un petit modèle pour illustrer comment faire l’auto-examen: « L’examen n’est pas compliqué, c’est un acte d’amour envers soi-même et de soin pour la vie. » Elles interagirent avec sérieux, certaines prenaient des notes sur de petits carnets qu’elles avaient apportés. À chaque étape, nous affirmions que l’objectif était la détection précoce, non pas l’alarme.
Après la partie pratique, nous passâmes à une autre activité cercle des couleurs et des émotions . Sur la table devant nous de petites cartes colorées, chaque femme devait choisir la couleur qui représentait son sentiment actuel, puis en expliquer la raison. L’une d’elles, en tenant la carte rose, dit : « Je me sens tranquille parce que j’ai appris des choses que je ne connaissais pas. » Une autre, choisissant le bleu, dit : « Il y a encore de la peur dans mon cœur, mais maintenant je sais comment y faire face. » Et une troisième, choisissant le jaune, déclara : « Je ressens de l’espoir, comme si quelque chose en moi s’était éveillé. »
Nous avons voulu consolider ce sentiment positif chez chaque femme avec une lettre à moi-même . Ecrire sur un petit papier un message court à elles-mêmes commençant par la phrase « Je te promets que… », et certaines écrivirent « Je te promets que je prendrai soin de ma santé chaque mois. », « Je te promets que je ne craindrai pas l’examen. », « Je te promets que je serai forte quoi qu’il arrive. ». Permetre de traduire ses émotions en promesses concrètes qui donnent de la force.
À la fin de cette activité, nous ouvrîmes un court débat collectif « Qui pourrait être ton soutien si tu ressentais peur ou anxiété ? ». Les réponses furent variées : « mon mari », « ma fille », « ma voisine », voir « Dieu seul est mon appui ». Nous affirmâmes que construire un petit réseau de soutien au sein du camp est un grand pas vers l’équilibre psychologique.
À la fin de la séance, des exercices respiratoires.« Je suis forte, je suis capable, je mérite la vie. »
Nous avons conclu la rencontre en remerciant les participantes, et distribuâmes des brochures contenant les étapes de l’auto-examen ainsi que les adresses à contacter en cas de besoin médical. Avant de partir, une des dames se leva et prononça une phrase que nous n’oublierons pas : « Aujourd’hui, j’ai senti que je possédais quelque chose de moi-même que je ne connaissais pas auparavant. »
Nous avons quitté la tente en portant en nous un sentiment chaleureux de satisfaction.
Lien vers les photos et vidéos
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