Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Distribution de vêtements pour les enfants des pêcheurs ville de Gaza

27 avril 2025
Distribution de vêtements pour les enfants des pêcheurs

Encore une magnifique action de soutien et de solidarité grâce à la collecte initiée par l’UJFP : compte rendu envoyé par Abu Amir, de cette distribution de vêtements pour les enfants de pêcheurs à Gaza city le 25 Avril.

Par un matin lourd, où Gaza se drapait de la cendre de la pauvreté et du blocus, l’odeur de la mer emplissait l’horizon… mais elle ne portait plus, comme autrefois, les promesses de la subsistance. Elle transportait désormais les gémissements de ses pêcheurs, devenus étrangers sur leurs propres rivages après en avoir été les maîtres.

Pendant de longues années, les pêcheurs de Gaza ont défié vents et vagues, risquant leur vie pour gagner leur pain honnêtement. Ils façonnaient de la mer une vie, des filets un espoir, et de leurs barques délabrées, des navires pour leurs modestes rêves. Mais peu à peu, la mer s’est rétrécie, tout comme la terre. La réduction des zones de pêche autorisées, les poursuites incessantes, et les tirs répétés ont transformé leur existence en véritable enfer.

Des familles entières se sont retrouvées soudainement au bord du gouffre. Des milliers d’enfants, qui attendaient autrefois leurs pères le soir, les bras chargés de poissons et d’histoires marines, les attendaient désormais les poches vides et les yeux pleins de tristesse. La mer n’était plus source de vie, mais porte de danger et de mort lente.

À chaque tentative d’entrer en mer, les pêcheurs étaient pourchassés par les tirs des vedettes militaires, arrêtés, leurs bateaux confisqués, et rentraient brisés, ne possédant plus rien si ce n’est la prière que des jours meilleurs reviennent un jour.

Dans cette obscurité pesante, malgré la dureté du quotidien, l’UJFP a tendu une main fragile au milieu de ce naufrage immense. Le vendredi 25 avril, le camp de la plage, à l’ouest de Gaza, a été le théâtre d’une initiative humanitaire exceptionnelle : la distribution de 415 pièces de vêtements d’été aux enfants de pêcheurs épuisés par la misère et courbés sous le poids du besoin. Ce moment de distribution fut semblable à une brise légère au cœur de la tempête.

Les enfants, vêtus de leurs habits usés, faisaient la queue, les yeux brillants, certains à peine capables de croire qu’ils auraient droit à une part de ce bonheur si rare. Une joie débordante se répandit parmi eux et leurs familles : rires éclatants, sourires timides, et mères en larmes exprimant leur gratitude pour ce geste qui pansait, un instant, leurs profondes blessures. Durant ces précieux instants, ces enfants se sont sentis égaux aux autres, reconnus dans un monde qui semble les avoir oubliés.

Cette initiative ciblait les enfants de pêcheurs pauvres issus de divers quartiers de Gaza : Shujai’ya, Tuffah, Daraj, jusqu’à Sheikh Ajlin. Le lieu de distribution était envahi d’espoir, mais il a été vite submergé d’émotions contrastées lorsque de nombreux autres habitants, vivant dans une extrême pauvreté, sont venus, suppliant pour obtenir des vêtements pour leurs enfants également.

Avec douleur, nous leur avons expliqué que cette initiative était exclusivement destinée aux enfants des pêcheurs, ce qui provoqua une grande tristesse et parfois de la colère. Nous avons vu des enfants sangloter, agrippant les vêtements des petits pêcheurs avec un espoir déchirant, dans l’espoir d’obtenir eux aussi une part de ce répit.

La souffrance n’était pas uniquement celle des garçons : les filles des pêcheurs elles aussi demandaient des vêtements, avec des regards innocents et des voix tremblantes. Nous leur avons expliqué, le cœur serré, que les vêtements pour filles étaient presque inexistants sur le marché, et que très peu avaient pu être obtenus.

Mais l’espoir est resté vivant : Zakaria Bakr leur a promis que des efforts étaient en cours avec certains ateliers locaux pour fournir des vêtements adaptés aux filles lors de la prochaine initiative, où elles seraient prioritaires.

Dans ce mélange d’euphorie et de douleur, la scène ressemblait à une miniature de toute Gaza : une joie incomplète, un espoir mêlé de désillusion, des sourires arrachés à des larmes persistantes. Et pourtant, cette initiative a brillé comme un petit phare dans une nuit sans fin, rappelant que la dignité ne meurt pas de faim, et que les enfants, même écrasés par l’adversité, méritent leur moment de bonheur, ne serait-ce qu’avec un vêtement neuf au milieu des décombres.

Ainsi s’acheva cette journée de distribution, mais elle laissa dans nos cœurs une question douloureuse : combien d’enfants à Gaza attendent encore une chemise chaude ou un baiser d’espoir qu’ils ne recevront peut-être jamais ?

Au cœur des décombres qui engloutissent la vie des pêcheurs et de leurs familles, cette initiative est apparue comme une goutte d’eau dans un désert brûlant, mais une goutte porteuse d’un sens bien plus profond qu’un simple vêtement neuf. Elle fut une déclaration silencieuse affirmant que ces enfants, nés au cœur de la tempête, n’ont pas été oubliés, et que leurs sourires méritent toujours de fleurir.

Cette action a offert aux enfants des pêcheurs pauvres un instant de joie pure, un moment où ils se sont sentis vus, comptés, et où une main s’est tendue vers eux, alors même que la mer et la terre se refermaient sur leur quotidien.

Face à cela, les larmes des enfants qui n’ont pu recevoir de vêtements dessinaient une autre vérité : celle d’un besoin qui dépasse toutes les initiatives, d’une douleur que Gaza porte en silence sans que le monde ne l’entende.

Cependant, ces initiatives restent un battement de cœur dans les veines de la douleur, rappelant que l’amour suffit parfois à allumer une bougie dans les ténèbres. Dans chaque vêtement distribué, il y avait une promesse silencieuse : Gaza, malgré ses brisures, continuera d’enfanter l’espoir dans la misère. Et les enfants de ses pêcheurs, privés par la mer de leur subsistance, ne seront pas privés par le monde de moments de bonheur et d’humanité.

Car la vie, à Gaza, ne s’arrête pas aux frontières de l’oppression ; elle recommence chaque jour… par le sourire d’un enfant, une main tendue, et un cœur qui croit que l’aube, malgré la longueur de la nuit, viendra inéluctablement.

Lien photos et vidéos avec une vidéo super où l’on voit et on entend Zakaria Bakr, délégué syndical des pêcheurs, remercier la solidarité française de l’UJFP

https://drive.google.com/drive/folders/16IOPxHhRirDH8InNHLxemlzsO3H_iDly

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