Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Gaza, une terre de résistance légendaire!

30 juillet 2025

Le 30 Juillet Abu Amir envoie deux textes qui sont une analyse politique mettant en regard la situation à Gaza et en Israël en ce moment : Gaza une épopée humaine digne, Israël un gouffre occupant et sécuritaire.

Dans un petit coin de ce monde, là où parfois la carte de la compassion se replie, se trouve Gaza, cette étroite bande de terre devenue un espace de douleur permanente et de résistance légendaire.
Nous avons tant écrit sur la destruction et les tragédies, sur les bombardements et la mort, sur la faim et le blocus. Et nous continuons à écrire, car à Gaza, chaque jour raconte une nouvelle histoire, chaque instant témoigne d’une humanité arrachée et d’un espoir qui ne meurt jamais.

À Gaza, on n’allume pas les fourneaux, non pas parce qu’on ne sait pas cuisiner, mais parce qu’il n’y a ni gaz ni électricité pour éclairer les maisons. Les jours et les nuits passent dans une obscurité impitoyable, une obscurité qui cache les larmes séchées par l’excès de douleur.
À Gaza, pas de poulet, pas de viande, ni de fruits pour garnir les tables. Les tables elles-mêmes ont disparu, devenues des planches sur lesquelles la famille s’étend dans un moment de peur, ou dépose le reste d’un pain rassis, si tant est qu’il en reste.
Le lait est un vœu pour les mères, le fromage un rêve pour les enfants, et le sucre, l’huile, la farine ne sont que des mots qui fondent dans la gorge avant de devenir réalité. Le zaatar, autrefois symbole du petit déjeuner palestinien, n’est plus qu’un souvenir, et le pain chaud est devenu l’exception, non la règle. Le travail est une blague noire qu’on raconte dans les recoins de l’impuissance, car la majorité des habitants ne trouvent rien pour apaiser leur faim ni couvrir les besoins de la nuit.
Quant à l’eau, ce droit élémentaire, elle ne leur parvient qu’une fois toutes les deux semaines, pour deux heures seulement. Elle ne suffit pas à vivre, et n’est pas potable, mais ils la partagent goutte par goutte, avec justice, avec amour, car ils ont appris à partager le peu, à donner ce qu’ils ne possèdent même pas. L’eau potable qui leur parvient est souvent contaminée, mais elle étanche, un peu, la soif de dignité.

Sous le ciel de Gaza, les bombardements ne cessent jamais. C’est le seul son constant. La mort est un voisin qui ne part pas. Ils dorment et se réveillent au bruit des explosions. Les proches sont dispersés, les corps sont étreints, les rêves enterrés sous les décombres. Mais une chose ne s’enterre jamais là-bas : l’âme. Cette âme qui refuse de se briser, qui se relève à nouveau sur les ruines de la maison et dit : “Nous allons bien, grâce à Dieu.”
On demande aux habitants de Gaza : comment allez-vous ? Ils répondent avec un sourire mêlé de larmes : “Grâce à Dieu.” Comme si la gratitude était devenue une arme, comme si la patience était devenue une patrie, comme si vivre, malgré tout, était un choix. Ils ne crient pas, ne supplient pas, ne se prosternent pas. Ils se tiennent simplement debout, avec le cœur élevé et les yeux brillants d’une foi profonde qu’ils méritent la vie, tout comme tout être humain sur cette terre.

Mais cette magnifique résilience, ces grands sacrifices, ne sont pas seulement l’expression de la survie. Ils sont une déclaration claire : ils sont les plus légitimes sur cette terre. Cette terre qu’on tente de voler, d’effacer son identité et son histoire. Le peuple palestinien prouve à chaque instant qu’il n’en est pas seulement le défenseur, mais qu’il en fait partie. Pour le Palestinien, la patrie n’est pas simplement un lieu à habiter, mais une âme versée, une racine qui lie l’homme à sa dignité, à sa mémoire, à son destin.
Le concept de terre chez les Palestiniens ne se mesure pas en mètres ou en superficie, mais en gloire, en sang, en martyrs. Pour eux, elle est un livre sacré, un chapitre de l’existence impossible à effacer, une partie d’une identité éternelle indivisible. Ainsi, ils ne donnent pas seulement leurs efforts pour elle, mais aussi leurs enfants, leurs rêves, les larmes de leurs mères. Ils enterrent leurs êtres chers dans son sol pour dire au monde : nous sommes ici, et nous resterons ici.

Un peuple comme celui-ci, avec une telle force intérieure, une telle générosité même dans les circonstances les plus sombres, ne peut être vaincu. Celui qui possède une telle âme, qui offre tant d’amour et de sacrifice, est le plus digne de la vie et le plus légitime sur cette terre. Car de sous les décombres naît l’espoir, et des ruines émerge une nouvelle génération, qui porte l’étendard et poursuit le chemin, croyant que la vie ne se donne pas, elle se conquiert avec une résilience qui ne connaît pas le recul.

Gaza n’est pas seulement une ville. C’est une épopée humaine qui se renouvelle chaque jour, une leçon au monde sur le véritable sens de la dignité, et un témoignage irréfutable que le peuple palestinien, malgré tout, est toujours vivant… et mérite de vivre.

               Un tsunami politique frappe l’État d’occupation : un moment charnière dans l’histoire politique internationale

Au cœur d’une tempête de mutations internationales et de fractures régionales, l’entité sioniste traverse l’un des chapitres les plus critiques et les plus reculés de son histoire politique depuis sa création. Il ne s’agit plus simplement de critiques médiatiques ou d’appels à l’arrêt de la guerre, mais bien d’un véritable tsunami politique qui secoue les fondations du système politique israélien et affaiblit son crédit sur la scène internationale de manière sans précédent.

D’un côté, on assiste à une accélération notable des reconnaissances internationales de l’État palestinien, non seulement de la part des pays du Sud global, mais aussi depuis le cœur même des capitales occidentales, qui ont longtemps constitué un parapluie diplomatique et moral pour Israël. Ce basculement ne sort pas de nulle part : il est la conséquence directe des scènes de destruction et de souffrance que Gaza diffuse chaque jour, traversant la conscience mondiale sans permission, avec les images de femmes égorgées, d’enfants déplacés, de vieillards mourant de faim et de chagrin. Ces images ont brisé le récit de l’occupant et réduit considérablement l’impact du « 7 octobre », un événement que Netanyahou utilisait jusqu’alors comme arme de chantage auprès de l’Occident pour justifier ses crimes.

Alors que les critiques se multiplient dans les cercles de décision occidentaux à l’encontre des pratiques de l’occupation, Netanyahou apparaît de plus en plus désorienté, incapable de maîtriser les ficelles du jeu politique, tiraillé entre la pression de ses alliés d’extrême droite comme Smotrich et Ben Gvir, une armée embourbée dans une guerre sans issue, et une opinion publique israélienne qui commence à prendre conscience que l’État se dirige vers un gouffre diplomatique et sécuritaire sans précédent.
Netanyahou comprend mieux que jamais que la crise internationale à laquelle Israël fait face est en grande partie liée à son image personnelle dégradée, ainsi qu’à celle de ses partenaires représentant le pire du racisme, du repli religieux et de l’extrémisme politique. L’absence de toute vision politique pour “le jour d’après” ou d’un projet crédible pour l’après-guerre transforme le gouvernement de l’occupation en une simple machine de destruction – et c’est précisément ce qui pousse la communauté internationale à s’en éloigner, voire à chercher à le tenir pour responsable dans certaines enceintes.
Mais le vrai dilemme de Netanyahou, c’est qu’il ne peut pas se permettre d’organiser des élections anticipées, car cela signerait sa fin politique. Dans le même temps, poursuivre la guerre et l’élargir aggraverait les divisions internes et continuerait d’éroder l’image d’Israël à l’extérieur. Entre le feu intérieur et la glace extérieure, Netanyahou reste paralysé, ne pouvant que répéter des discours creux qui ne convainquent même plus ses partisans.

Le tableau se complique davantage avec les discussions croissantes sur de nouvelles annexions et des objectifs militaires expansionnistes dans la bande de Gaza, accentuant la rupture entre Israël et de nombreux pays du monde. Cette situation place l’armée israélienne elle-même en confrontation avec la communauté internationale, et même avec une large partie de la société israélienne qui commence à considérer que le projet de l’occupation est devenu un fardeau pour l’avenir et la stabilité de l’État.

De l’autre côté, le dilemme n’est pas moins complexe pour le mouvement Hamas. La majorité des États appelant aujourd’hui à un cessez-le-feu et reconnaissant l’État palestinien ne le considèrent pas comme un partenaire politique fiable. Ils le perçoivent comme une partie du problème et non de la solution. Cette évaluation politique, même si elle peut paraître injuste du point de vue de la résistance, reflète pourtant la réalité de l’état d’esprit international actuel, qu’il convient de lire avec lucidité et responsabilité.

L’un des acteurs les plus importants reste Donald Trump. Malgré ses liens étroits passés avec Netanyahou, il comprend que le climat mondial évolue et qu’il ne peut pas s’opposer à toutes les nations du monde pour défendre les ambitions de Smotrich ou les illusions de Netanyahou. Fidèle à son pragmatisme bien connu, Trump pèse les choses selon les gains potentiels, et il pourrait se montrer ouvert à tout règlement protégeant les intérêts américains, même si cela implique d’abandonner certains alliés.

Nous sommes face à un moment politique rare, né du sang des victimes, des gémissements des affamés, des douleurs des vieillards, des femmes et des enfants à Gaza. Ce moment n’est pas un cadeau du monde, mais le fruit d’un long combat, de souffrances continues, forgé par d’immenses sacrifices qui n’ont jamais cessé. C’est pourquoi l’Autorité palestinienne et le mouvement Hamas doivent comprendre que ce moment ne peut être manqué, et qu’ils doivent s’accorder sur un programme politique national unificateur, susceptible d’ouvrir les portes de la reconnaissance et du soutien international à notre cause.

Mais il est important de mettre en garde : il serait non seulement imprudent, mais gravement préjudiciable, que toute faction palestinienne – en particulier le Hamas – considère cette évolution comme une victoire partisane, et cherche à en tirer des fruits politiques immédiats. Celui qui voit en cette conjoncture une simple opportunité d’accroître ses gains organisationnels prend le risque de faire échouer cette dynamique politique internationale, et pourrait condamner notre peuple à plus d’isolement et de souffrance.

Ce moment exige une conscience stratégique, une vision nationale, une lecture profonde de la situation, et une réelle volonté de sortir du tunnel de la division. Il faut bâtir un partenariat national capable de saisir cette opportunité rare, et de transformer le sang de Gaza en une aube politique nouvelle pour le peuple palestinien.

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