Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Rien à Gaza aujourd’hui ne ressemble à la vie. Tout ressemble à la mort
22 mars 2025Ce 22 Mars Abu Amir envoie un rapport détaillé de terrain, sur la situation humanitaire dans la bande de Gaza cinq jours après la reprise de l’agression israélienne : bombardements incessants, déplacements massifs, tempête hivernale
La bande de Gaza traverse des jours extrêmement difficiles, marqués par la destruction, la mort et le déplacement massif, alors que l’agression israélienne se poursuit pour le cinquième jour consécutif depuis sa reprise mardi dernier. Les frappes aériennes ne cessent de cibler différentes régions de l’enclave, accompagnées de bombardements d’artillerie particulièrement intenses à l’est de Gaza, au nord du territoire et au centre de la ville de Rafah. Les civils vivent sous un feu constant, dans une absence totale de couloirs humanitaires ou de protection internationale.
Des quartiers entiers ont été réduits en ruines, des maisons détruites sur leurs habitants, tandis que l’armée israélienne poursuit son offensive terrestre. Des véhicules militaires ont pénétré l’ouest de Beit Lahia, au nord de Gaza, sous une pluie de tirs et d’obus. L’armée a également annoncé officiellement le début d’une opération terrestre dans la ville de Rafah, au sud, étendant ses activités militaires dans le quartier densément peuplé de Shaboura.
Dans une nouvelle escalade, le ministre israélien de la Sécurité, Israel Katz, a déclaré avoir ordonné à l’armée de prendre le contrôle de nouvelles zones dans Gaza et de déplacer les populations vers le sud, dans ce qui semble être une préparation à un déplacement forcé massif. Il a affirmé que « plus le Hamas refusera de libérer les otages, plus il perdra de territoires au profit d’Israël », assumant clairement une politique de punition collective et d’occupation.
Depuis la reprise de la guerre mardi dernier, Israël a tué 591 personnes et blessé 1 042 autres jusqu’à vendredi soir, selon les chiffres du Bureau d’information gouvernemental de Gaza. La majorité des victimes sont des femmes et des enfants.
Face à cette escalade sanglante, le mouvement Hamas continue de demander à la Ligue arabe et à l’Organisation de la coopération islamique d’agir en urgence auprès des instances internationales, notamment le Conseil de sécurité de l’ONU, pour stopper l’agression et le génocide perpétré contre le peuple palestinien à Gaza.
Parallèlement à l’offensive militaire, les conditions humanitaires des déplacés internes sont en détérioration dramatique, aggravées par une forte tempête hivernale qui frappe Gaza depuis trois jours, accompagnée de pluies abondantes et de vents violents. Les tentes de fortune, à peine capables de protéger du froid, sont inondées, et de nombreuses zones se sont transformées en mares de boue. Les enfants grelottent, les femmes luttent pour offrir chaleur et nourriture, dans l’absence d’électricité et avec des aides humanitaires insuffisantes. Chaque coin de Gaza raconte une histoire de douleur sans fin.
Dans ce contexte, les points de passage restent hermétiquement fermés, aggravant encore plus la crise humanitaire. Sans couloirs humanitaires ouverts, la population vit dans des conditions dramatiques, souffrant de pénuries extrêmes de nourriture, avec des prix atteignant des niveaux inaccessibles. Les produits de base sont devenus rares, et les besoins les plus élémentaires sont désormais un luxe.
Les personnes déplacées, qui ont fui sous les bombardements, se trouvent confrontées à une double tragédie : la peur de la mort et du déracinement d’un côté, et la faim et l’impuissance de l’autre. Les mères font la queue pendant des heures pour obtenir quelques pains, tandis que les pères n’ont que des paroles de patience à offrir à leurs enfants. Trouver un repas par jour est devenu un défi quotidien, alors que l’aide humanitaire reste bloquée aux frontières et que le blocus continue d’étrangler les derniers espoirs de survie.
Dans ce tableau dramatique, la souffrance des agriculteurs déplacés des régions de Khuza’a, Abu Ta’ima et Abassan mérite également d’être soulignée. Environ 50 % d’entre eux ont été contraints de fuir après les ordres d’évacuation et les attaques par ceintures de feu lancées sur Khuza’a, causant des destructions massives de maisons et de propriétés.
Ces agriculteurs déplacés se sont répartis en trois zones principales : la majorité s’est installée près de l’hôpital européen à Khan Younès, un second groupe a rejoint la région d’al-Mawasi entre Rafah et Khan Younès, tandis qu’un troisième groupe s’est dirigé vers l’ancien emplacement du camp temporaire des agriculteurs.
Ce qui rend leur sort encore plus difficile, c’est que ceux qui vivent près de l’hôpital européen entreprennent chaque matin un long trajet à pied avec leurs femmes et enfants pour rejoindre leurs maisons dans la région d’Abu Ta’ima, un aller qui prend environ une heure et demie. Ils reviennent le soir vers leurs tentes. Ces trajets sont extrêmement dangereux, en raison des frappes continues et des risques de tirs ciblés, mais malgré cela, ces familles tiennent à retourner voir leurs maisons chaque jour, affirmant leur lien à leur terre et leur refus du déplacement forcé.
Au nord de la bande de Gaza, de nombreux déplacés de Beit Hanoun ont trouvé refuge sur la place du Soldat Inconnu en plein cœur de Gaza, tandis que d’autres se sont dirigés vers l’ouest de la ville. Ils vivent dans des conditions très précaires, dans des tentes improvisées ou à l’intérieur de véhicules, sans eau potable, avec peu de nourriture, et une propagation inquiétante des maladies due aux conditions sanitaires désastreuses.
Rien à Gaza aujourd’hui ne ressemble à la vie. Tout ressemble à la mort : les bombardements, le froid, la faim, le déplacement, la peur, et le silence du monde. Le tableau humanitaire est en hémorragie permanente, pendant que la communauté internationale reste silencieuse, voire complice. Gaza, seule, continue de faire face à son destin, portée par un peuple qui s’accroche à la vie malgré toutes les tentatives de l’éteindre.
Dans ce contexte, la nécessité d’une intervention internationale urgente et efficace devient plus pressante que jamais, non seulement pour mettre fin à l’agression, mais aussi pour sauver ce qui reste de l’âme d’un peuple qui ne réclame que son droit à vivre avec dignité.
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