Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Soutenir les femmes psychologiquement et juridiquement à Gaza : une Urgence.

13 avril 2025
Une urgence que le soutien psychologique et juridique des femmes

Abu Amir envoie un texte, un récit le 13 Avril celui d’une douleur au féminin, l’ histoire d’une femme en temps de guerre

Avant que le ciel ne s’assombrisse et que la terre ne s’embrase, elle rêvait d’un mariage simple, d’une robe blanche, des youyous résonnant dans tout le quartier, d’une chanson chantée rien que pour elle.
Le contrat de mariage avait été signé quelques semaines auparavant, faisant d’elle, selon la loi et la tradition, l’épouse d’un homme qu’elle aimait profondément et qu’elle avait choisi pour partager sa vie. La date du mariage n’avait pas encore été fixée, mais dans son cœur, la vie avait déjà commencé.

Une nuit calme, quelques jours avant la guerre, ils étaient assis ensemble dans la maison de sa belle-famille. Ils avaient longuement parlé de leur avenir, de leur foyer, des prénoms qu’ils donneraient à leurs enfants. Cette nuit-là, qu’elle pensait être le début de leur vie, fut en réalité le début de sa douleur.

Puis arriva le 7 octobre. Les avions et les missiles déchirèrent les villes, les visages se transformèrent.
Dès le deuxième jour, son mari fut tué. Pas un adieu, pas un dernier regard.
Seulement une brève annonce, et des restes de corps à peine reconnaissables.

Quelque chose en elle s’est brisé à jamais.
Mais elle n’était pas seule…
Elle portait dans son ventre une petite vie, née de l’amour.
Mais aux yeux de tous, ce n’était qu’un péché.

Les mois passèrent, la grossesse devint visible, et les questions fusèrent comme des balles :
«
Comment ? » « Le mariage n’a pas eu lieu ! » « Qui est le père ? »

Il lui était difficile d’expliquer, de prouver, de crier au monde :
«
J’ai un contrat officiel ! C’est mon mari, devant Dieu et devant les hommes ! »
Mais personne ne voulait écouter.

La famille de son mari refusa de reconnaître l’enfant. Ils l’accusèrent d’avoir fauté.
Ils nièrent que leur fils l’ait touchée, comme s’ils ignoraient tout de l’amour, de la confiance, et des promesses sincères.

Quant à sa propre famille, elle ne supporta pas la honte.
La maison se transforma en tribunal, et elle fut l’unique accusée.

Il y eut même une tentative de la tuer, évitée de justesse grâce à l’intervention de quelques notables, qui réussirent à la placer dans une « maison sûre », de peur qu’un drame irréparable ne se produise.

Elle disparut des regards. Nul ne savait où elle se trouvait.
C’est là, dans un endroit inconnu, qu’elle accoucha en pleine guerre, une nuit sans électricité, sans soins, sans une main à tenir.
Seule, elle mit au monde son enfant en pleurant.
Ce n’était pas seulement la douleur de l’accouchement qui la déchirait, mais la peur, l’injustice et la solitude.

Aujourd’hui, elle serre son enfant contre elle et lui murmure :
«
Tu n’es pas un péché… tu es un commencement, même s’ils refusent de l’admettre. »

Cette jeune femme n’a commis aucun crime, mais elle s’est retrouvée piégée au cœur d’un séisme de valeurs contradictoires. Elle a exercé un droit que lui confèrent la religion et la loi, mais la société a brandi contre elle l’épée de la honte, uniquement parce qu’elle n’avait pas attendu les youyous ni porté la robe blanche devant les gens.

Sa vie s’est brisée deux fois : Une première fois lorsqu’elle a perdu l’homme qu’elle aimait,
Et une seconde fois lorsqu’on lui a volé son droit à être mère avec dignité.

En temps de guerre, ce ne sont pas que les murs qui s’effondrent, mais aussi les cœurs, les rêves et les droits. Les femmes ne perdent pas seulement leurs époux, elles perdent aussi leur nom, leur réputation, et leur sécurité. Dans des sociétés fragiles, conservatrices et ravagées par la guerre et la pauvreté, la femme est toujours la première jugée, et la dernière à être défendue.

Voici une histoire parmi tant d’autres, étouffées derrière des portes closes.
Des femmes piégées entre guerre et traditions, entre perte et scandale, entre douleur et silence. Des femmes qui ont besoin d’une voix, d’une loi, d’une protection, de quelqu’un pour leur dire :
«
Vous n’êtes pas seules. »

La guerre ne se contente pas de détruire des maisons, elle ravage aussi ce qu’il reste de la vie des femmes. Et soutenir les femmes, psychologiquement et juridiquement, n’est plus une option : c’est une urgence.
Car ce sont elles qui tentent, seules, de recoller les morceaux de la vie sur les ruines…
Elles sont les piliers invisibles sur lesquels reposent les familles dans ce temps d’effondrement.

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