Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Trump découvre soudain que Netanyahou ne respecte pas les accords ! »
20 décembre 2025
Un texte d’ Abu Amir le 19/12 plein d’ironie sur la farce de l’accord de paix
Le comble de la tragédie, c’est qu’elle fait rire. Et nous rions encore une fois, non pas parce que la scène politique prête réellement à rire, mais parce que les déclarations qui circulent semblent tout droit sorties d’une série politique qui a perdu depuis longtemps tout effet de surprise. Voilà que Washington découvre, avec un retard dramatique, qu’Israël a violé l’accord de cessez-le-feu, et que son Premier ministre, Benyamin Netanyahou, a procédé à l’assassinat de Raed Saad sans consulter le « parrain américain ». Quelle surprise ! Depuis quand Israël attend-il une autorisation pour tuer ? Et quand a-t-il jamais cessé de violer les accords pour que cet assassinat soit considéré comme un événement exceptionnel digne d’étonnement ?
Mais revenons au début de l’histoire, car ce récit — par son absurdité même — mérite d’être raconté.
Avant que Trump n’entre dans une crise de colère qui semble faire partie de son rituel politique habituel, il convient de présenter le personnage au cœur de la controverse : Raed Saad, l’un des principaux commandants de terrain des Brigades Al-Qassam, la branche armée du mouvement Hamas, un homme qui a joué des rôles majeurs dans le développement des capacités militaires et la gestion des opérations à l’intérieur de Gaza. Son nom figurait depuis des années sur la liste des personnes recherchées par Israël. À la mi-décembre 2025, c’est-à-dire il y a quelques jours à peine, Israël a mené une opération d’assassinat ciblée qui l’a visé directement, une démarche que la résistance palestinienne a considérée comme une violation flagrante de l’accord de cessez-le-feu dont Washington se vantait d’être le garant.
Cet assassinat n’a pas provoqué la colère de Washington parce qu’il s’agissait d’un meurtre, mais parce qu’il a été commis sans la consulter ! Comme si le problème n’était pas l’assassinat lui-même, mais le fait d’avoir ignoré le protocole politique qui exige l’envoi d’un message, la tenue d’une réunion, une politesse de façade!
Selon le site Axios, Trump et son cercle restreint ont adressé à Netanyahou un message extrêmement sévère, se plaignant que l’assassinat de Raed Saad ait été mené « dans leur dos » et qu’il porte atteinte à l’image de l’accord qu’ils ont tenté de vendre au monde comme un « succès historique ». Ce qui est encore plus ironique, c’est que Washington fait comme si le monde avait réellement cru que cet accord était réussi ou même viable.
L’agacement ne s’est pas limité à Trump : il a également concerné le secrétaire d’État Rubio, le conseiller à la sécurité nationale Witkoff et le gendre de Trump, Jared Kushner, qui ont tous exprimé leur « déception » à l’égard de Netanyahou. L’un des responsables américains aurait déclaré à ce dernier sur un ton de menace presque comique : « Si vous souhaitez détruire votre réputation, montrer que vous ne respectez pas les accords et devenir internationalement isolé, c’est votre affaire. Mais nous ne vous permettrons pas de détruire la réputation du président Trump après qu’il a servi de médiateur dans l’accord sur Gaza. »
Comme si l’on parlait d’une réputation en cristal fragile que tout le monde craint de voir se briser, et non d’un président qui a soutenu une guerre dévastatrice avant de vouloir apparaître sous les traits d’une colombe de la paix.
Quant à Israël,elle a choisi sa réponse traditionnelle et bien rodée : « Les choses ne sont pas aussi grave, le message n’était pas aussi coléreux qu’on le prétend. »
Bien sûr, le monde entier s’est habitué à croire les communiqués israéliens, réputés, comme nous le savons tous,pour leur plus haut degré de transparence et de précision !
Pendant ce temps, Washington s’efforce de convaincre le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi de participer à une rencontre tripartite réunissant Trump et Netanyahou à la fin du mois. Mais Le Caire semble parfaitement conscient que figurer sur une photo commune au milieu de ce chaos politique revient à tenter de prendre un cliché souvenir au cœur d’une tempête de sable : une image qui sera largement exploitée, chacun niera ensuite toute relation avec elle.
Ce qui est réellement cocasse, c’est que toute cette agitation autour des « violations », de la « colère américaine » et des « remontrances adressées à Netanyahou » est présentée à l’opinion publique comme s’il s’agissait d’événements majeurs, alors que la réalité est limpide : Israël fait ce qu’il veut, les États-Unis protestent par des mots,
et les Palestiniens sont les seuls à en payer le prix.
Combien de fois avons-nous entendu, depuis le début de la guerre, des déclarations américaines « fermement résolues » évoquant des lignes rouges, une patience à bout, des pressions exercées ? Et à chaque fois, la même pièce se rejoue :
Israël bombarde… Washington proteste verbalement… Tel-Aviv sourit…
Puis tout le monde se tait, et le cycle habituel se poursuit sans le moindre changement.
Ainsi, lorsqu’on affirme que l’assassinat de Raed Saad a « anéanti les efforts de paix », le lecteur ne peut que sourire avec amertume. De quels efforts de paix parle-t-on, alors qu’ils n’ont jamais réellement vu le jour ? Et lorsqu’un responsable américain déclare être « frustré par Israël », cela ressemble davantage à une phrase prononcée pour sauver la face politiquement, rien de plus.
En définitive, l’assassinat de Raed Saad n’a pas seulement révélé l’ampleur du différend entre Trump et Netanyahou ; il a aussi mis en lumière la fragilité du discours américain lorsqu’il prétend jouer le rôle d’un médiateur impartial. Avec toute l’ironie possible, le tableau reste inchangé : Israël poursuit ses violations, Washington poursuit son soutien, et le monde continue de publier des communiqués que personne ne lit, que personne ne croit, et qui ne changent absolument rien.
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