Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Un message de la rue Gazaouie : La Vie !
18 août 2025Ce texte est envoyé par Abu Amir le 17 Août, “Gaza appelle : le peuple veut la vie avant toute autre chose !” Ce texte soulève des questions nombreuses à méditer, nous qui sommes à l’abri !
Au cœur d’une tragédie qui dure depuis plus de deux ans, la voix des Gazaouis s’élève aujourd’hui pour dire clairement et sans détour : assez de guerre, assez de destruction, assez de mort. Ce ne sont pas des paroles passagères ni de simples réactions émotionnelles, mais la conclusion d’une expérience collective d’un peuple ayant subi les pires formes de siège, de massacres et de déplacements de l’époque moderne. C’est un message que la rue gazaouie adresse directement à la délégation de négociation : acceptez l’accord, quelles qu’en soient les conditions, l’essentiel est que cette guerre cesse.
Depuis plus de deux ans, Gaza vit dans un état de guerre ouverte, qui n’a rien laissé intact. Plus aucun endroit n’est sûr dans la bande, aucune maison n’a échappé à la destruction ou au deuil. Des centaines de milliers de personnes ont été déplacées à plusieurs reprises, passant des ruines aux tentes, puis des tentes au grand air, dans une quête impossible d’abri. Rafah a été effacée et totalement occupée, le nord de Gaza n’est plus qu’un souvenir, Khan Younès est devenue un champ de ruines, et la ville de Gaza elle-même est réduite à quelques mètres carrés à l’ouest et à quelques poches au centre. La majorité de la population est aujourd’hui entassée dans des espaces étroits, dans des conditions indignes même pour des animaux, à plus forte raison pour des êtres humains.
Les bases de la vie ont disparu. L’eau est rare et polluée, insuffisante pour boire ou cuisiner. La nourriture est inexistante ou hors de prix, acheminée par des voies complexes et en quantités qui ne suffisent pas à calmer la faim. Les hôpitaux sont en grande partie détruits, les médicaments rares, et les médecins travaillent avec un manque criant de matériel. La majorité des habitants n’ont plus de maisons : ils vivent sous des tentes déchirées ou à ciel ouvert, tandis que la mort peut frapper du ciel, de la terre ou de la mer à tout instant. Aujourd’hui, le peuple gazaoui vit littéralement dans une zone de mort, sans sécurité, sans avenir, ni même un mince espoir d’un lendemain meilleur si la guerre continue.
La résistance a toujours affirmé être le bouclier protecteur du peuple, et que ses armes défendaient la terre et l’homme. Mais que se passe-t-il lorsque ce peuple se retrouve au bord de l’anéantissement ? La douloureuse question que se posent beaucoup de Gazaouis aujourd’hui est : à quoi sert la résistance si elle n’est plus capable de protéger son peuple, ni même de garantir sa survie ? En réalité, ce qui reste des combattants affronte, avec des armes légères, l’une des plus puissantes armées du monde. Des milliers de morts sont tombés, les blessés sont sans soins, et les survivants sans abri. La résistance a perdu sa capacité à imposer une réalité militaire qui change l’équation, tandis que le peuple en paie le prix total.
En principe, toute résistance exprime la volonté du peuple. Mais dans la situation actuelle, un fossé évident sépare ce que vivent les gens sur le terrain et les décisions prises dans les salles de négociation. Le message que les Gazaouis veulent faire entendre est clair : nous sommes ceux qui payons le prix, qui mourons, qui avons faim, qui sommes déplacés et qui vivons l’horreur quotidienne. Donc, nous devons être les premiers décideurs de notre destin.
Les habitants de Gaza savent qu’un accord, aujourd’hui, sera « défaitiste » selon les critères politiques, mais ils se soucient bien moins de ces critères que de l’arrêt du bain de sang. Le choix devant les négociateurs est simple et binaire : un accord, quelles qu’en soient les conditions, qui permette aux survivants de rester en vie, ou la poursuite de la guerre jusqu’à la destruction totale de Gaza et un génocide. Beaucoup disent clairement que la défaite politique peut être réparée avec le temps, mais que les vies perdues ne reviendront jamais.
La rue gazaouie décrit une terreur quotidienne dépassant la capacité humaine de résistance. Les bombardements ne cessent pas, les obus secouent les maisons et les tentes, les enfants hurlent chaque nuit, et les mères sont incapables de nourrir ou de protéger leurs petits. Des centaines de morts tombent chaque jour. Et quiconque vit à l’ouest de Gaza sait que ce qui le sépare des chars, ce n’est qu’une « décision » politique, qui peut être prise à tout moment.
Cette guerre a prouvé qu’aucun véritable soutien extérieur existe pour Gaza. Ceux qui comptaient sur un appui régional ou international ont découvert qu’il s’agissait d’une illusion. Même les millions de partisans sur les réseaux sociaux, que les Gazaouis remercient sincèrement, n’ont pas réussi à changer la réalité : les massacres continuent, encore plus terribles qu’avant. Même les frères de la cause, en Cisjordanie ou dans les pays arabes, n’ont pas apporté l’aide espérée. Cette vérité amère renforce le sentiment d’isolement et d’orphelinat politique des Gazaouis.
Beaucoup affirment croire en Dieu et en Son destin, mais refusent de confondre foi et témérité. La victoire sur terre n’est pas garantie aux croyants, la défaite n’est pas une honte si l’objectif est de sauver des vies. La sagesse est toujours un salut, aujourd’hui, elle exige d’arrêter immédiatement la guerre.
La délégation de négociation est face à un choix historique, non seulement politique mais aussi humain. Elle doit écouter la voix du peuple avant toute autre, et se rappeler que ceux qu’elle représente vivent sous les bombardements, perdent leurs enfants chaque jour, et se trouvent au seuil de l’extermination. Le message est limpide : donnez tout ce qui est possible pour arrêter cette guerre, quel qu’en soit le prix. Tout retard ou hésitation ne mènera qu’à exécuter la volonté de l’occupant, mais de manière encore plus atroce et sanglante.
Cet article reflète clairement le message de la rue gazaouie : la vie d’abord, la survie avant toute considération politique ou militaire. La résistance sans peuple n’est rien, alors qu’un peuple sans résistance peut peut-être se relever un jour, s’il reste en vie. Au bout du compte, nous voulons la vie, pas la mort gratuite. Nous avons payé le prix doublement, enduré ce qu’aucune montagne ne pourrait supporter, et patienté jusqu’à ce que toute signification du mot patience s’épuise en nous. Il ne nous reste que ces mots : arrêtez la guerre, à n’importe quel prix.
S’accrocher à la résistance ne doit pas signifier sacrifier le peuple jusqu’au dernier souffle, car une résistance sans peuple devient un souvenir effacé. Toute décision ignorant la voix de ceux qui meurent chaque jour est une décision déracinée, condamnée à l’échec moral avant même politique. La délégation de négociation est aujourd’hui face à un examen historique : soit elle se range sans ambiguïté du côté des Gazaouis, soit elle les laisse seuls face à un nouveau massacre. La défaite temporaire est infiniment préférable à l’extermination totale, et un retrait en arrière pourrait être la seule voie pour avancer de nouveau un jour.
Cette guerre a prouvé que les slogans seuls ne protègent pas un enfant des bombardements, ne donnent pas à une mère de l’eau potable pour son bébé, ni à un homme un abri contre le froid de la nuit. Ce qui protège le peuple maintenant, c’est l’arrêt immédiat des tueries et le retour à la vie pour ceux qui restent. Gaza ne peut plus supporter davantage. Il n’y a plus de place dans son corps pour une balle de plus, ni dans son cœur pour un nouvel adieu. Arrêtez cette folie, avant que nous ne nous réveillions dans une ville où il n’y a plus personne pour raconter son histoire.
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