« Le manque de lits dans les hôpitaux c’est pas la covid, c’est l’austérité » | Tribune de la CGT 34
29 septembre 2020Le Poing relaie le courrier de Serge Ragazzacci, secrétaire général de l’Union Départementale des syndicats CGT de l’Hérault, envoyé le 28 septembre 2020 à Jacques Witkowski, préfet de l’Hérault :
La CGT de l’Hérault réagit aux dernières mesures annoncées dans la lutte contre la prolifération du covid.
Depuis le début de cette crise, nous avons toujours agi et communiqué avec un grand sens des responsabilités. La protection des salarié·es et de leur famille, la protection des retraité·es et des jeunes, la préservation de la santé de toutes et de tous a toujours été et reste notre priorité.
Mais comme j’ai déjà eu l’occasion de vous l’écrire, pour qu’une décision soit acceptée encore faut-il qu’elle soit comprise, mieux encore qu’elle soit juste.
La première phase de la crise n’aura décidément pas servi de leçon, pourtant le pays paie cher le prix des erreurs politiques.
Nous souffrons dans les hôpitaux d’un manque de lits, de moyens et de bras mais pas en raison du covid, ce sont les conséquences des politiques de rigueur qui nous ont conduit dans cette impasse.
Nous souffrons d’une mise à sac organisée de notre sécurité sociale dont nous allons fêter dans quelques jours les 75 ans de sa création. Ce sera un bien triste anniversaire. Il y a 75 ans dans un pays en ruines, déchiré par la honte de la collaboration, la sécurité sociale était créée et aidait le pays à se relever en permettant entre autres de bâtir de grandes politiques de santé. Un progrès social incomparable. Aujourd’hui 75 ans plus tard, c’est la maladie qui menace de mettre à l’arrêt toute la société, et ce gouvernement n’a toujours pas pris la mesure du vaste plan d’urgence social nécessaire pour redresser la situation !
J’ai lu monsieur le préfet, que vous aviez beaucoup consulté avec de prendre ces nouvelles mesures. Si je ne doute pas que les milieux patronaux soient régulièrement associés, en revanche, les organisations syndicales ne sont pas consultées, elles ne sont même pas informées. Sur la crise sanitaire, comme sur la crise sociale et économique, nous sommes laissées de côté.
L’explosion du chômage sur le département et les plans sociaux annoncés sur le département n’auraient-ils pas dû vous conduire naturellement à organiser un espace de dialogue avec les organisations syndicales de salarié·es ?
Venons-en aux dernières mesures qui suscitent beaucoup d’incompréhension voire même de la colère. Comment s’expliquer que des restrictions si dures puissent survenir et que le monde de l’entreprise, les conditions de travail, le travail réel soient totalement passés sous silence ?
Pourtant les éléments d’alerte existent, le CHU a été dans l’obligation de passer à la phase 1 du plan blanc car il est confronté à 25% d’absentéime ! Des tensions similaires aussi dans d’autres secteurs.
Nous dénonçons ces notes de services envoyés aux hospitalier·es leur demandant de poursuivre leur travail s’ils jugent avoir des symptômes faibles dans l’attente du résultat des tests. La circulation du virus appelle à la fermeture des bars à 22h mais les salarié·es malades, les salarié·es vulnérables doivent retourner travailler.
Nous avons proposé, il y a plusieurs mois une table ronde autour de la question de la prise en charge des personnes âgées dans les Ehpads ou par les services d’aide à domicile, écrit il y a quelques semaines au Conseil départementale sur le sujet… en vain ; pourtant à nouveau, ces salarié·es à majorité féminine se retrouvent en première ligne. Nous revendiquons des embauches massives pour atteindre le ration de 1 soignant·e par résident·e.
On nous a parlé pendant le confinement de réindustrialisation. Pourtant Schneider prévoit la fermeture de plusieurs sites en France dont le site de Lattes et le transfert de productions vers plusieurs usines à l’étranger. Que compte faire le gouvernement ? Que comptez-vous faire pour préserver les emplois de Schneider Lattes ?
Comment s’expliquer que la loi d’urgence sanitaire permet à la famille Mulliez, sixième fortune de France, de voir ses dettes effacées dans le naufrage d’Alinea. Plus près de nous, c’est Orchestra qui nous inquiète et la reprise du bâteau par le naufrageur lui-même, nous révolte.
Mesurez-vous l’impact réel des nouvelles dispositions sur l’ensemble du mouvement associatif qui tentait de se relever ces dernières semaines ? Dans cette période de crise et de violence n’a-t-on pas besoin plus que jamais de protéger tout ce qui fait sens et lien social ? Mesurez-vous les conséquences pour les activités sociales de l’ensemble de nos CSE ? Probablement pas. Comprenez-vous que lorsque que l’on nous annonce que la batterie de mesures est prise pour 15 jours, on a dû mal à le croire ?
Qui mesure l’impact durable de cette crise sur l’ensemble de nos TPE/PME qui représentent 1/3 du salariat ? Des entreprises dépourvues de représentation syndicale, faute de droit syndical ? Nous ne voulons pas ni banaliser cette situation, ni en rajouter au fatalisme, c’est pourquoi nous proposons la mise en place d’instances paritaires au niveau départementale pour les salarié·es des TPE.
Ne pensez-vous pas qu’il faille mettre un coup d’arrêt à l’explosion des ruptures conventionnelles qui sont autant de licenciements daiguisés ?
A la crise sanitaire s’ajoutent les suppresions d’emploi et une profonde crise sociale. Crise sociale amplifiée par les décisions de ce gouvernement qui se refuse à prendre des mesures pour permettre l’augmentation des salaires, des pensions et minima sociaux.
Ce gouvernement fait le choix de culpabiliser les citoyen·nes, il divise au lieu de rassembler.
Nous ne pouvons accepter un confinement de notre vie sociale et de notre démocratie.
N’ajoutez pas à la crise sanitaire, sociale et économique une nouvelle crise démocratie !
Serge Ragazzacci, secrétaire général de l’Union Départementale des syndicats CGT de l’Hérault
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