« Vous aviez l’honneur déjà bien sali par la corruption, vous voilà maintenant les mains pleines de sang » Lettre de Sonia de Bessan
Lors d’une conférence de presse contre la répression qui s’est tenue devant la préfecture de Montpellier le mardi 15 janvier, une gilet jaune de Bessan a lu un discours criant de vérité. Le Poing vous le retranscrit en intégralité :
« À vous messieurs les politiques, qu’avez-vous fait de notre si belle et si juste devise ? Devise de notre pays, notre France – liberté, égalité, fraternité –, notre devise nationale salie, piétinée, bafouée, dans le pays des droits de l’Homme.
Liberté quand le 17 novembre 2018 nous sommes sortis dans les rues demander des comptes et revendiquer des droits, et avoir pour réponse de la part d’un président mandaté : ‘‘ce sont des Gaulois réfractaires, des gueux’’ et plus les jours passent, plus les injures fusent : ‘‘homophobes, xénophobes, talibans, terroristes’’ et j’en passe. Des réponses si minimes, si petites et pourtant si humiliantes. Vous ne dites pas de nous monsieur Macron : ‘‘ils n’ont rien ou vivent de rien’’, non, vous dites de nous ‘‘ils ne sont rien’’. Honte à vous et à tous les politiques qui cautionnent cette façon de gouverner notre pays. Que répondre à ça monsieur Macron, hormis que c’est vous, vous et vos complices, qui ‘‘ne sont rien’’ sans nous. La peur de perdre le contrôle et le pouvoir a provoqué chez vous et tous vos complices une pathologie nommée ‘‘gentophobie’’. Vous gouvernez la France dans une démocratie, mais vous avez assassiné nos droits constitutionnels.
Le gouvernement viole notre liberté. Quand nous, citoyens, sommes privés du droit de manifester, privés de nous exprimer, surveillés, fouillés, placés en garde à vue sans raison et injustement. Où est la liberté quand les policiers armés agressent violemment, nous dispersent à coups de grenades lacrymogènes dangereuses et nocives. Grenades lacrymogènes ou tirs de flashball capables de mutiler des citoyens à vie. On ne parle pas, monsieur Macron, de quelques jours d’ITT. Non. On parle bien de mutilations irréversibles : un œil en moins, une main en moins, un visage tuméfié et défiguré, pour avoir pris la parole et manifester des revendications légitimes. Est-ce réellement utile ?
Égalité, parlons-en. Bafouée depuis si longtemps. Égalité quand un capitaine des forces de l’ordre se voit récompensé de la légion d’honneur alors que cet homme a perdu tout sens de l’honneur en faisant taire à coups de poing des manifestants pacifistes. Un capitaine connu pour des excès de violence répétitifs et récurrents au sein même du GIPN, ‘‘grande élite’’ de la police nationale.
Liberté quand un groupe de manifestants pacifistes assied à même le sol, main levés implorant la paix, se voit jeter à moins de dix centimètres une grenade lacrymogène. À quelle attaque ou agression les forces de l’ordre répondaient-elles ?
Liberté, égalité quand au petit matin, un groupe de forces de l’ordre armé entre chez nous, nous menottant devant enfants, maris, femmes, parents afin de nous enfermer et nous assommer de longs et insupportables interrogatoires allant jusqu’à quatre-vingt-seize heures de garde à vue – tels des criminels ou des terroristes ; ce ne sont que des citoyens, hommes, femmes, retraités, handicapés – nous privant de toute information et nous interdisant ainsi toute aide extérieure.
Liberté quand l’accès aux institutions nous est interdit, comme la préfecture et les tribunaux. À quel moment sommes-nous en démocratie, monsieur Macron ? Quand des manifestants pacifistes en possession de masques en papier et sérums physiologiques se voient placés en garde à vue dite préventive et dès le lendemain présentés en comparution immédiate pour l’accusation suivante : possession d’arme par destination dans le but de commettre des violences et des dégradations.
À quand pourrons-nous juger monsieur Castaner et tous ses complices pour leurs actes anti-démocratiques. Car il a en sa possession la plus grande arme par destination : l’autorité et le pouvoir sur une armée de forces de l’ordre zélée et bien dressée ? Il est bel et bien coupable de tous nos blessés.
Liberté, égalité, démocratie quand nous sommes soumis à l’intimidation, à la pression et à la répression sous toutes ses formes ; à une intimidation politico-judiciaire par le biais d’une justice expéditive et répressive sans précédent. Quand nos amis, familles, collègues se voient mis en examen et pour certains écroués en attente d’être présentés aux assises, je ne reconnais pas là notre justice, mais bel et bien une stratégie répressive ordonnée par le gouvernement afin d’éradiquer le mouvement des gilets jaunes sans aucune limite légale, morale et humaine.
Nous n’oublierons jamais le fossé creusé entre les forces de l’ordre et le peuple depuis au moins trois décennies, et bien plus profond et flagrant aujourd’hui. Nous sommes gouvernés par des politiques pour les riches, et les forces de l’ordre qui promettent la sûreté d’un peuple sont devenus les sbires de la dictature et des capitalistes.
Messieurs, vous aviez l’honneur déjà bien sali par la corruption, vous voilà maintenant les mains pleines de sang qui empestent de loin le déshonneur et la trahison. Monsieur Macron, nous sommes dans les rues, et nous n’avons pas l’intention de rentrer. Vous laissez tuer notre France. Nous ne lâchons rien car nous avons sauvé notre fraternité. »
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