Université de Montpellier : le CNRS se retire du laboratoire de science politique, les chercheurs inquiets

Le Centre d’études politiques et sociales (CEPEL), unité mixte de recherche associant l’Université de Montpellier et le CNRS, vient d’apprendre que le CNRS mettra fin à sa tutelle à la fin de l’année 2026. Cette décision suscite l’incompréhension des universitaires, qui dénoncent une “concentration des chercheurs sur la place parisienne”
Le 22 septembre dernier, la direction du Centre d’études politiques et sociales (CEPEL), le laboratoire de science politique situé au sein de la faculté de droit, a reçu une notification du CNRS-SHS (Sciences humaines et sociales) confirmant le retrait définitif de sa tutelle. Ce désengagement, officialisé après une première annonce fin 2024 et presque un an d’incertitudes et de discussions, marque la fin d’un lien institutionnel vieux de quatre décennies.
Si les contrats et partenariats en cours sont maintenus, cette décision a un impact certain pour le CEPEL. “Concrètement, cela veut dire 10 000 euros en moins par ans et et le retrait de trois personnes du laboratoire”, indique Emmanuel Négrier, directeur de recherche CNRS en science politique au CEPEL (Centre d’études Politiques et Sociales) à l’Université de Montpellier. Trois personnes, soit des postes administratifs, de secrétariat, et un cartographe, à qui l’institution proposera une nouvelle affectation. Outre la dimension matérielle, c’est la portée “symbolique” de ce retrait qui inquiète Emmanuel Négrier : “C’est une rétrogradation qui va entrainer une visibilité moindre, et l’impossibilité de répondre à certains appels à projets.” L’Université de Montpellier, elle, a affirmé son plein soutien au laboratoire, ainsi que le reste de la communauté scientifique et des sociétés savantes.
Absence de « présomption d’attractivité »
Après la première annonce, fin 2024, le personnel du laboratoire s’était mobilisé afin de proposer des solutions alternatives, dont un projet d’Équipe Mixte de Recherche (EMR) censé maintenir, sous une forme allégée, une partie de l’équipe au sein d’une structure universitaire élargie autour d’un projet de recherche labellisé par le CNRS. Le CEPEL avait alors présenté un projet autour de l’étude des “nouvelles politiques de bien-être”, appuyé par une directrice de recherche CNRS de Lyon. “On nous a dit que c’était un bon projet scientifique mais qu’il y avait une absence de « présomption d’attractivité »”, précise Emmanuel Négrier, pour qui “l’annonce-même du retrait du CNRS fragilisait notre attractivité.”
Une situation qui a conduit à des troubles psycho-sociaux chez certains universitaires du laboratoire. “Imaginez l’état des gens, qui doivent gérer le laboratoire, procéder à des évaluations, qui s’investissent dans l’élaboration d’un projet, finalement retoqué… C’est un véritable yo-yo émotionnel auquel peut s’ajouter l’angoisse de la réaffectation pour le personnel concerné… Tout ça, alors que les gens du CNRS sont normalement formés au management, aux risques psycho-sociaux et la communication non-violente…”, décrit le directeur de recherche.
Pour lui, cette décision est moins la résultante d’une volonté d’économies que d’une stratégie de concentration de moyens sur un nombre limités de laboratoires, parisiens. “En sciences sociales, il y a un grand nombre de petits laboratoires comme le notre. On constate une concentration progressive de la recherche à Paris, et la science politique est en train de mourir de cette centralisation, alors que la République est censée être décentralisée depuis une loi constitutionnelle de 2003…”, déplore le responsable de l’une des dernières unités mixtes de recherche à dominante de science politique dans le sud de la France.
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