A Montpellier, les fachos souillent la mémoire de Lola à leur profit

Le Poing Publié le 24 octobre 2022 à 20:38 (mis à jour le 24 octobre 2022 à 20:39)
Les fachos locaux sont de sortie à Montpellier ce dimanche 23 octobre, pour la "marche blanche" pour Lola. Capture d'écran extraite d'une vidéo publiée sur le compte Twitter Décolonial News.

L’extrême-droite est ces derniers jours aux avants-postes d’une ignoble récupération politicienne de l’assassinat sordide de la jeune Lola, utilisant les origines de la principale suspecte pour distiller le poison du racisme. Sur Montpellier, un cortège d’environ deux cents personnes a réuni le gratin de la fachosphère locale ce dimanche 23 octobre.

La fachosphère locale au premier rang

Environ deux cent personnes ont manifesté ce dimanche 23 octobre entre la préfecture et la place de la Comédie à Montpellier. Prétendant rendre hommage à la jeune Lola, et contre l’avis de la famille de celle-ci qui aura préféré appeler au respect et à la dignité en refusant toute récupération politique, le rassemblement a réuni tout le gratin de la fachosphère locale.

On notera la présence de Victor Alzingre, conseiller municipal à Béziers et adhérent du parti de Florian Philippot, Les Patriotes, de Gilbert Collard, député européen élu sous les couleurs du Rassemblement National, passé depuis chez Reconquête, le mouvement d’Eric Zemmour..

Également de la partie : certains des membres de la Ligue du Midi, groupuscule fasciste responsable de nombreuses exactions dans la région, qui a fait la campagne de Zemmour pendant les présidentielles, et les membres des Frères Dissidents, régulièrement présents dans les rassemblements montpelliérains contre le pass sanitaire et l’obligation vaccinale. Le média Décolonial News rapporte sur son compte Twitter une salve d’insultes racistes proférées devant la préfecture de Montpellier par des membres du service d’ordre de la manifestation.

Les vautours sont de sortie

La manifestation du jour s’inscrit dans un contexte de récupération éhontée de l’affaire Lola par l’extrême-droite, afin d’amalgamer criminalité et immigration. Le 17 octobre, quelques jours à peine après l’atroce assassinat de Lola, l’équipe de Zemmour achète des noms de domaines sur internet en utilisant le nom de la jeune victime, «manifpourlola.fr» et «justicepourlola.fr». Compassion ? Les auteurs présumés du crime semblent plus intéresser les vautours fascistes que la victime. La principale suspecte est effectivement une algérienne, sans nationalité française, qui avait reçu une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF). Zemmour dénonce un « francocide » de plus, comme si l’affaire participait du grand remplacement que la haine raciale lui fait fantasmer. L’association Damoclès, lancée par un Samuel Lafont à la communication chez Reconquête, lance une pétition en ligne qui permet sous couvert d’émotion et de solidarité avec la famille de Lola de récupérer des dizaines de millier d’adresses mails en vu des campagnes du parti…

Alors même que la famille de Lola fait très vite savoir qu’elle ne souhaite aucune récupération politique autour du drame, les appels à manifester, soit disant pour Lola, se multiplient, lancés par des personnalités de la fachosphère et autres instituts proches de leurs thématiques. « L’immigration tue », « On est chez nous », « Les Arabes au bled » : partout les slogans et banderoles au racisme décomplexé se multiplient, pour ce qui était censé s’apparenter à des marches blanches. Sur Montpellier, en milieu de semaine dernière, des tags sont retrouvés près de la fac de lettres. « Justice pour Lola. Mort aux arabes. » Ambiance.

Côté Rassemblement National, on la joue un peu plus fine. Les cadres du parti reprennent la communication raciste qui fait de l’assassinat de Lola le symptôme d’un ensauvagement de la société lié à l’immigration de masse. Jordan Bardella annonce dans un premier temps sa présence au côté de Zemmour au rassemblement parisien, avant de se rétracter, et de tenter de faire oublier sa première réaction par une surenchère dans l’invective contre les rivaux de Reconquête. Les députés RN se retrouvent devant l’Assemblée Nationale pour une minute de silence, à l’issue de laquelle Marine Le Pen, qui a lancé auparavant un très explicite « trop d’immigrés clandestins commettent des crimes », se rue vers la foule de journalistes venus couvrir l’événement.

Le gouvernement n’est pas en reste. Le ministre de l’Intérieur Darmanin s’insurge de la récupération politique sur Twitter. Le porte-parole du gouvernement Olivier Véran fait de même, avant de lâcher lui aussi qu’il « faut faire mieux sur les OQTF », comme si le meurtre en question était effectivement lié à l’origine de la suspecte.

Heureusement, les manifs organisées aux quatre coins de la France ne rassemblent que peu de personnes, malgré la vive émotion populaire face au calvaire de la jeune Lola.

L’extrême-droite s’intéresse plus aux origines des criminels qu’à leurs victimes

L’indignation de l’extrême-droite est trop sélective pour ne pas relever de l’instrumentalisation pure et simple.

Dans la nuit du 12 au 13 octobre dans le Var, un enfant de 7 ans était battu à mort chez lui. Pourquoi cette affaire n’a pas intéressée l’extrême-droite ? Parce que le coupable, François H., porte un nom bien de chez nous. En août dernier, dans le Pas-de-Calais, le fils aîné d’une famille révèle l’existence de maltraitances sur les dix enfants du foyer. Parce que les deux parents s’appellent Marc et Christine. L’extrême-droite ne s’est pas saisie de l’enlèvement, de la séquestration et du meurtre de la petite Maëlys par Nordhal Lelandais. Encore moins de l’affaire qui a vu Oleg Sokolov, proche de Marion-Maréchal Le Pen qu’elle avait recruté à l’ISSEP, démembrer une de ses étudiantes. Zemmour assume d’ailleurs qu’il n’aurait pas organisé d’évènement si le coupable avait été français.

Entre 1997 et 2006, le nombre d’homicides volontaires d’enfants était de 79 cas recensés en moyenne chaque année, puis de 57 homicides en moyenne entre 2007 et 2016 (on ne parle ici que des homicides, et non des violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner). L’extrême-droite se saisit d’un de ces cas d’homicide, dont les coupables sont des étrangers extra-européens, pour avancer dans son agenda de promotion de la haine raciale.

On verra même les plus culottés représentants de la fachosphère tenter une attaque en règle contre les féministes, accusées de ne pas verser comme eux dans la surenchère raciste, puisque la jeune Lola a été violée pendant son calvaire. 160.000 mineurs sont victimes de violences sexuelles chaque année dans ce pays. D’après l’Inserm 5,5 millions de femmes et d’hommes ont été victimes de violences sexuelles dans leur enfance, soit un adulte sur dix. Mais Zemmour, Le Pen et leurs acolytes choisissent de monter en épingle les faits divers les plus aptes à les aider à propager leur haine.

Si peu de monde par contre parmi ceux-là pour rappeler les choses suivantes. La principale suspecte souffrait visiblement de graves troubles psychiques. Il ne s’agit pas de la repeindre en victime. Simplement de comprendre que le démantèlement néo-libéral des services de psychiatrie, comme des autres services de santé publique d’ailleurs, ne permet plus aussi bien qu’avant de prévenir les violents épisodes psychotiques. Au sortir du confinement, de nombreux professionnels alertaient sur cette dégradation des services psychiatriques, et sur ces conséquences, y compris en terme de sécurité des personnes.

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