Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Les différentes phases de l’accord à Gaza et le chaos
16 octobre 2025Deux textes d’Abu Amir sur la nouvelle situation à Gaza suite à la mise en place de l’accord.
Un texte du 15 Octobre qui précise la réalité des étapes de la mise en œuvre de l’accord de fin de guerre et la situation dans la bande de Gaza.
Ces derniers jours ont été marqués par des développements rapides dans la mise en œuvre de l’accord visant à mettre fin à la guerre entre Israël et les factions palestiniennes. La première phase de l’accord a été achevée, la deuxième phase a officiellement commencé, tandis que les parties attendent avec prudence l’entrée dans la troisième et dernière phase, censée définir les contours du statut final de la bande de Gaza.
Première phase de l’accord : retrait partiel et échange de prisonniers
Selon les dispositions convenues, la première phase s’est achevée par un retrait partiel de l’armée israélienne vers les abords de la bande de Gaza, en préparation d’un redéploiement visant à réduire la tension militaire.
Durant cette phase, un échange de prisonniers a été effectué entre les deux parties : 20 prisonniers israéliens ont été remis vivants à Israël, en plus de quatre dépouilles de captifs morts pendant leur détention à Gaza.
En contrepartie, Israël a libéré 1 969 prisonniers palestiniens de ses prisons, dont des femmes, des enfants et de jeunes hommes ayant passé de longues années en détention. Ils ont été renvoyés en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.
Cette étape a été considérée comme un signe positif du respect mutuel des termes de l’accord, malgré quelques violations limitées dans certaines zones du territoire.
Deuxième phase : retrait plus profond et restitution des dépouilles palestiniennes
Le président américain a annoncé hier le début de la deuxième phase de la mise en œuvre de l’accord, visant à réduire davantage la présence militaire israélienne à l’intérieur de la bande de Gaza.
L’armée israélienne s’est retirée d’environ deux kilomètres supplémentaires dans les zones orientales, septentrionales et méridionales du territoire, tout en maintenant quelques points de contrôle pour la surveillance et le commandement sur le terrain.
L’un des éléments les plus importants de cette phase est la restitution d’environ 900 dépouilles de Palestiniens tués lors des attaques israéliennes du 7 octobre, ainsi que celles de prisonniers morts en détention ou durant les interrogatoires.
Cette étape est l’une des plus sensibles sur le plan humanitaire, car elle touche des centaines de familles qui cherchent depuis des années à connaître le sort de leurs proches disparus.
Troisième phase attendue : arrangements finaux et reconstruction
La troisième phase, qui n’a pas encore commencé, devrait être consacrée aux arrangements politiques et sécuritaires définitifs.
Elle prévoit un retrait total des forces israéliennes de l’intérieur du territoire, le lancement d’un vaste programme de reconstruction sous supervision internationale, ainsi qu’une réorganisation du cadre sécuritaire et administratif de Gaza pour empêcher tout retour des hostilités.
Cette phase devrait inclure des négociations élargies sur la gestion des points de passage, le rétablissement des services essentiels et la mise en place d’une administration conforme à un accord politique global entre les parties concernées.
Des engagements internationaux sont également prévus pour la réhabilitation des infrastructures détruites et l’apport d’une aide humanitaire urgente aux populations sinistrées.
Situation sur le terrain et conditions humanitaires à Gaza
Depuis l’entrée en vigueur de la trêve, un retour progressif des habitants vers la ville de Gaza a commencé, malgré l’ampleur des destructions.
Dans un premier temps, les hommes s’y rendent seuls pour inspecter leurs maisons et commerces, afin d’évaluer les dégâts et de déterminer si les conditions permettent le retour de leurs familles.
Certains ont découvert que la destruction totale rend toute vie impossible et ont préféré rester dans les zones centrales et méridionales, jugées relativement plus sûres.
D’autres sont revenus dans leurs maisons en ruine ou se sont installés dans des tentes de fortune érigées par les habitants eux-mêmes — une scène qui reflète à la fois l’ampleur de la souffrance et l’attachement profond à la terre malgré des conditions extrêmement dures.
Cependant, la ville est en proie à un chaos sans précédent, marqué par l’absence d’institutions administratives et sécuritaires, et la présence de groupes armés agissant sans contrôle légal.
Montée du désordre interne et actions du Hamas
Dès le cessez-le-feu, les forces du Hamas ont lancé une vaste campagne d’arrestations visant des centaines d’habitants du territoire, accusés de « collaboration avec l’occupation ».
Des témoins ont rapporté que des exécutions sommaires ont eu lieu dans les rues de Gaza, sous les yeux des civils, provoquant peur et indignation parmi la population.
Le Hamas a déclaré que les personnes exécutées étaient impliquées dans la transmission d’informations militaires et sécuritaires à Israël pendant la guerre.
Cependant, des observateurs estiment que ces pratiques visent surtout à rétablir l’emprise du mouvement sur le terrain après une période de désordre et de vide sécuritaire.
Interrogé sur la présence du Hamas à Gaza, le président américain Donald Trump a affirmé que Washington autorisait temporairement les membres du mouvement à intervenir pour rétablir l’ordre et calmer la situation, tout en précisant que le Hamas ne jouerait aucun rôle politique ou administratif dans un avenir proche — signal clair de la volonté de la communauté internationale d’exclure le mouvement de toute administration permanente du territoire.
Situation humanitaire et avenir de Gaza
La situation humanitaire dans la bande de Gaza demeure catastrophique. Des milliers de familles vivent encore à ciel ouvert ou dans des écoles détruites, souffrant d’un grave manque d’eau, d’électricité et de nourriture.
Les organisations humanitaires mettent en garde contre une crise sanitaire et environnementale si les points de passage ne sont pas entièrement ouverts pour laisser entrer les aides médicales et alimentaires.
En parallèle, la population vit dans une angoisse permanente face à l’incertitude de l’avenir, notamment quant à la mise en œuvre de la troisième phase de l’accord, qui déterminera le sort du territoire pour les décennies à venir.
On peut dire que l’accord de fin de guerre à Gaza est entré dans une phase d’exécution sérieuse, malgré les tensions et les désordres persistants. La première étape a accompli ses principaux objectifs, la deuxième avance avec d’importants défis humanitaires, tandis que la troisième représente le dernier espoir pour les habitants de Gaza de sortir des affres de la guerre et de reconstruire leur vie.
Cependant, la route reste longue avant d’atteindre une paix durable et une stabilité réelle, en raison des divisions internes, des ingérences régionales et des conditions humanitaires dramatiques qui pèsent sur le territoire depuis des années.
De l’occupation au chaos
Un texte du 16 Octobre décrivant un nouveau chapitre difficile de la situation à Gaza nécessitant une réponse: la justice
Lorsque l’armée israélienne se retira de certaines parties de la bande de Gaza, les gens pensèrent qu’une nouvelle aube commençait. Mais à peine leurs chars disparurent-ils que réapparut une autre nuit sur la ville. La joie qui avait rempli les cœurs dans les premiers instants se transforma rapidement en une peur indicible.
Personne n’aurait cru que de nouvelles balles s’élèveraient et pourtant elles s’élevèrent. Des balles qui ne venaient pas d’un ennemi extérieur, mais de nos propres compatriotes. Les rues se remplirent de chuchotements en colère et de cris tremblants.
Une scène sanglante se mit à se répéter devant les enfants et les femmes, comme si la guerre n’était jamais finie. Dans les ruelles étroites, les gens couraient à la recherche d’un abri, non plus des avions cette fois, mais les uns contre les autres. Des visages familiers devinrent effrayants, des noms autrefois prononcés avec fierté furent désormais accusés de trahison. Le sang palestinien coula à nouveau, mais cette fois par des mains palestiniennes. C’est de là que commence une histoire que personne n’attendait.
Au moment où tout le monde crut s’être libéré de l’ennemi, l’ennemi caché éclata à l’intérieur. Des accusations de trahison, de collaboration, d’espionnage emplirent l’air.
Certaines étaient fondées, d’autres n’étaient que des soupçons, mais le résultat restait le même : la mort dans la rue. Des hommes sont exécutés devant leurs enfants sans procès, sans défense, sans juge pour entendre, sans avocat pour parler. Des scènes qui ébranlent la conscience et troublent l’esprit.
Qui leur a donné le droit d’exécuter des sentences de mort sans preuves ?
Qui les a nommés juges et bourreaux en même temps ?
Est-ce là la liberté dont les gens rêvaient ? Avons-nous quitté l’injustice de l’occupation pour sombrer dans l’injustice entre nous ?
Une femme sanglote : « Ils ont tué mon voisin sous mes yeux… Ils disaient qu’il était un traître, et personne n’a prouvé quoi que ce soit. »
Un jeune homme répond d’une voix brisée : « Les traîtres méritent le châtiment, mais pas de cette manière. »
Ailleurs, un autre jeune tombe, atteint par une balle inconnue, simplement parce que quelqu’un l’a désigné comme suspect.
Les visages qui brandissaient des slogans de victoire se cachent maintenant, couverts par la peur d’être accusés. Personne ne sait qui sera le prochain. Chacun est présumé coupable jusqu’à preuve du contraire. Mais qui prouvera le contraire dans une rue gouvernée par les embouts des fusils ?
Où est la justice ? Où est l’État ? Où est la loi ? Qui décide qui doit vivre et qui doit être exécuté ?
Le monde qui pleurait sur Gaza commence à se demander : que se passe-t-il là-bas ?
Où est cette image pure d’un peuple qui lutte pour sa liberté ?
Comment le monde continuera-t-il à compatir pour nous, si nous tuons nos propres fils et filles devant les caméras ? Chaque balle tirée dans la rue ne tue pas seulement une personne, elle tue aussi la sympathie de millions de personnes.
Chaque exécution publique détruit l’image d’un peuple qui a tenu tête à l’occupation pendant des décennies. Combien il est douloureux de perdre ce que nous avons construit par le sang des martyrs à cause d’un moment de chaos.
Combien il est cruel que l’opprimé devienne l’oppresseur dans un accès de colère.
Allons-nous nous autoriser à devenir l’image de la violence que nous avons toujours condamnée ? N’y a-t-il personne parmi nous pour crier : « Assez » ?
La justice ne se forge pas avec des balles, mais dans les tribunaux.
La patrie ne se construit pas par la vengeance, mais par la loi.
Le sang ne lave pas le sang, et l’injustice n’efface pas l’injustice.
Nous avons besoin d’un système judiciaire équitable qui dise son mot, pas de groupes en colère qui jugent sur la base de soupçons.
Que celui qui accuse présente la preuve, et que l’accusé ait le droit de se défendre.
Tel est le cœur de la justice, et c’est ce qui rétablit la confiance entre les gens. Si nous voulons protéger la patrie, nous devons d’abord protéger notre conscience. Arrêter cette hémorragie interne qui ne sert que le véritable ennemi. Car l’occupation regarde et sourit.
Chaque balle que nous tirons les uns sur les autres est un cadeau gratuit pour lui.
Aujourd’hui, nous vivons le moment le plus dangereux de notre histoire. Un moment où nous pouvons prouver que nous sommes un peuple conscient, ou bien nous effondrer face à nous-mêmes. Soit nous choisissons la voie de la justice, soit nous empruntons celle du chaos.
Qui gouvernera demain si la loi meurt aujourd’hui ?
Qui reconstruira l’avenir de Gaza si la morale s’effondre ?
Le monde nous observe, et chaque acte que nous posons est enregistré et raconté.
L’image de Gaza n’est pas seulement parmi les décombres, mais dans les yeux des gens. Nous voient-ils comme des opprimés ? Ou nous voient-ils en train de devenir des oppresseurs ?
Chaque scène diffusée sur Internet change une opinion quelque part. Chaque nouvelle vidéo d’exécution affaiblit notre cause.
Les organisations internationales commencent à demander des comptes et à dénoncer.
Des déclarations exigent des enquêtes sur les exécutions sommaires. Des voix appellent au respect du droit international et des droits de l’homme.
Même les habitants de Gaza commencent à crier : nous voulons un État, pas le chaos.
Nous voulons une véritable justice, pas des slogans. Nous voulons vivre en sécurité, pas avoir peur d’être la prochaine cible. La cause palestinienne a toujours été une cause de droit et de justice ; comment préserverons-nous ce droit alors que nous nous enfonçons dans des scènes d’atrocité ?
Comment convaincre le monde que nous sommes des victimes si nous faisons du tort à nos semblables ? Comment demander la liberté alors que nous la retirons aux autres ? L’exécution sommaire ne se justifie en aucun cas. Même le traître a droit à un procès avant la sentence. Quelle différence y-a-t-il entre nous et ceux qui nous ont opprimés si nous faisons la même chose ?
Celui qui tue sans preuve tue aussi la patrie. Et celui qui se tait face au crime en est complice.
Il doit y avoir une voix qui dise « Arrêtez », une voix qui s’élève au-dessus des armes : la voix de la loi. La loi seule préserve la dignité de l’État et la dignité humaine.
Sans loi, nous devenons des tribus en guerre, non un peuple uni.
Sans justice, il n’y a ni liberté, ni dignité, ni patrie.
Le temps est venu d’arrêter. De nous remettre en question avant de juger les autres.
De penser à nos enfants qui voient tout cela et demandent : pourquoi ? Que leur dirons-nous ?
Dirons-nous que la justice était dans les balles ?
Dirons-nous que la liberté s’est construite sur le sang intérieur ?
Non, la liberté se construit par la loi. La dignité se sauvegarde par les institutions, non par les bandes armées. Le droit ne fleurit pas dans l’ombre de la peur, mais dans la lumière de la justice. La justice commence par l’arrêt immédiat des exécutions.
Nous devons appeler à des enquêtes transparentes pour chaque homicide.
Redonner au système judiciaire sa prestance, et à l’homme son droit à la défense.
Tenir pour responsables ceux qui ont profité du chaos pour se venger ou imposer leur autorité. Dire au monde : nous n’avons pas peur de la justice, nous la demandons.
Gaza n’est pas seulement un lieu de mort, mais un lieu de vie.
Rétablissons la confiance entre nous avant de réclamer celle des autres. Protégeons notre sang de nos propres mains, car l’occupation n’est plus le seul à nous tuer.
Apprenons à nos enfants que la trahison est un crime, mais que tuer sans jugement est un crime plus grand encore. Rendons aux gens la foi que la justice est possible.
Tout ce qui se passe maintenant profite à l’ennemi. Chaque balle intérieure affaiblit notre voix à l’étranger. Chaque corps abandonné dans la rue ouvre une nouvelle porte à la haine.
Nous devons choisir : être une nation de droit, ou une jungle de chaos.
Protéger notre dignité par la loi, ou l’enterrer sous la vengeance. Vivre comme un peuple digne de la liberté, ou disparaître comme des groupes en conflit.
L’histoire ne pardonne pas, et le monde n’oublie pas. Elle écrira ce que nous faisons aujourd’hui en lettres claires.
Soit nous serons écrits comme des champions de la justice, soit comme des victimes de nous-mêmes.
Levons-nous aujourd’hui avec sincérité. Élevons la voix contre les exécutions, contre les meurtres, contre le chaos. Faisons de la loi notre arme la plus forte, et prouvons que nous méritons d’être respectés, non redoutés.
Que notre slogan soit : la justice d’abord.
Que notre promesse soit : pas de mort sans procès, pas de sentence sans loi.
Ainsi seule la dignité humaine sera préservée, ainsi seule Gaza sera protégée de l’engloutissement par le chaos.
Ainsi seulement mériterons-nous qu’on dise de nous : Ce peuple mérite la vie.
Et ainsi seulement, nous écrirons la fin que nous désirons : la fin du chaos et le commencement de la justice.
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