Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Sous blocus et fermeture des passages, la crise humanitaire s’aggrave

6 mars 2025
Distribution de repas dans le camp des agriculteurs

Mais au milieu de cette détresse, l’action solidaire continue, elle est le dernier espoir qui reste aux habitants de Gaza. Les équipes de l’UJFP travaillent sans relâche pour atténuer la souffrance des familles, en particulier celles des agriculteurs qui ont perdu leur unique source de revenus. Abu Amir en rend compte le 6 Mars comme chaque fin de semaine.

Les ateliers de soutien psychologique pour les femmes organisés par l’UJFP

Le premier atelier a eu lieu dans le camp Al-Israa, au centre de Gaza, avec la participation de 30 femmes. Il a mis l’accent sur l’importance du soutien psychologique pour les femmes en période post-conflit et sur leur rôle clé dans la gestion de la famille et de la société malgré les conditions extrêmes imposées par la situation actuelle.

Quant au deuxième atelier, il s’est déroulé dans le camp d’Al-Suwaidi, à Deir al-Balah, également en présence de 30 femmes. Cet atelier portait sur le renforcement de la santé mentale des femmes pendant le mois sacré du Ramadan, tout en leur fournissant des stratégies pratiques pour maintenir leur équilibre psychologique durant cette période exigeante.

Premier atelier : Camp Al-Israa, Gaza

Dans une tente au cœur du camp Al-Israa, en plein centre de Gaza, trente femmes se sont réunies, portant sur leurs visages les marques de la fatigue et dans leurs yeux des histoires encore inexprimées. Le bruit extérieur ne pouvait masquer le silence pesant qui régnait au début de la séance. Les animatrices prirent place face aux femmes, et l’une d’elles leur adressa un message

Aujourd’hui, nous sommes ici pour alléger un peu votre fardeau… Pour parler… Pour nous reposer… Pour nous accorder quelques instants de sérénité. 

La séance débuta par des exercices de respiration profonde. La spécialiste demanda aux participantes de fermer les yeux, d’inspirer profondément, puis d’expirer lentement. Certaines hésitèrent au début, mais à mesure que l’exercice était répété, la tension commença à s’échapper de leurs épaules lourdes. C’était comme si chaque expiration emportait avec elle un fragment du poids accumulé durant les longs mois de guerre.

Ensuite, l’animatrice invita les femmes à pratiquer la méditation guidée. Elle leur demanda d’imaginer un endroit sûr, loin des bombardements et des sirènes d’alerte, un lieu où règne la paix. L’une d’elles s’imagina dans sa maison avant la guerre, avec son petit jardin qu’elle arrosait chaque matin. Une autre vit la mer, où elle emmenait ses enfants les jours d’été. Une troisième imagina les bras de sa mère qu’elle avait perdue dans la guerre, et durant un instant, elle eut l’impression de la retrouver.

Pour renforcer ce sentiment de quiétude, une musique thérapeutique douce fut diffusée en arrière-plan. Ses mélodies étaient légères, comme une brise caressant les visages fatigués. Certaines fermèrent les yeux et s’abandonnèrent à la relaxation, tandis que d’autres commencèrent à pleurer en silence. Mais les larmes, ici, n’étaient pas une faiblesse ; elles étaient une libération, une façon de laisser s’échapper la douleur longtemps enfouie dans leurs cœurs.

le cercle de soutien. Une femme brisa le silence d’une voix tremblante :

Au début de la guerre, je courais d’une maison à l’autre avec mes enfants. Il n’y avait nulle part où aller, nous fuyions simplement. Une nuit, je n’ai trouvé qu’un coin étroit parmi les ruines d’un immeuble détruit. J’ai serré mes enfants contre moi en priant pour que la nuit se passe sans drame. 

Cette nuit-là, j’ai compris que je devais être forte, que je devais être à la fois leur mère et leur père. Il n’y avait pas d’autre choix.

Encouragées par ce témoignage, d’autres femmes prirent la parole, racontant leurs souffrances, la peur qu’elles dissimulaient derrière des visages résignés, les questions de leurs enfants auxquelles elles n’avaient pas de réponse.

L’ambiance changea progressivement : la salle, auparavant remplie d’un silence pesant, se transforma en un espace vibrant de récits et d’émotions partagées. Quelque chose de rare était en train de se produire : une libération… Une parole libre, sans crainte… Une douleur partagée au lieu d’être portée seule.

À la fin de la séance, l’animatrice observa les femmes et constata sur leurs visages une expression nouvelle, différente de celle qu’elles avaient en entrant. Certaines souriaient pour la première fois depuis longtemps, d’autres semblaient éprouver un soulagement, même temporaire. Cet atelier était un moment de réappropriation d’une part d’elles-mêmes que la guerre leur avait arrachée.

Dans cet instant, une femme brisa le silence et déclara, d’une voix douce mais emplie de détermination :

« Je veux vivre, non seulement pour mes enfants, mais aussi pour moi… Je veux être forte, non pas parce que j’y suis obligée, mais parce que je le mérite. »

Deuxième atelier : Camp Al-Suwaidi, Deir al-Balah

Dans l’une des tentes dispersées dans le camp Al-Suwaidi à Deir al-Balah, trente femmes se sont réunies, marquées par la fatigue. L’atmosphère était calme malgré le bruit extérieur, comme si elles attendaient un instant de répit au milieu du chaos environnant.

L’atelier débuta par des exercices de respiration profonde, puis les participantes furent invitées à visualiser un endroit qui leur procurait un sentiment de sécurité. Certaines imaginèrent leurs maisons avant la guerre, d’autres la mer, et d’autres encore l’étreinte de leurs mères disparues.

Peu à peu, la parole se libéra. Une femme déclara d’une voix tremblante :

« Ce ramadan n’a rien à voir avec ceux que j’ai connus. Je ne ressens plus la joie du mois sacré. Je passe mon temps à courir d’un marché à l’autre, à rentrer exténuée, à cuisiner, à nettoyer, sans jamais trouver un moment de répit pour moi-même. »

Une autre femme ajouta en retenant ses larmes :

« J’ai perdu mon mari dans la dernière guerre. Maintenant, tout repose sur moi. Je jeune, je cuisine, j’élève mes enfants et j’essaie de rester forte. Mais à l’intérieur, je suis brisée. Je ne vis plus pour moi, je survis uniquement pour eux. »

Les animatrices de l’UJFP encouragèrent alors les participantes à partager leurs angoisses et à échanger sur les moyens de surmonter ces épreuves. Des stratégies pratiques furent proposées : gestion du temps, importance du soin de soi, et soutien mutuel entre voisines et amies.

À la fin de la séance, les femmes semblaient différentes. L’une d’elles sourit légèrement et dit :

« Je pensais que prendre soin de moi était un luxe que je ne pouvais pas me permettre, mais aujourd’hui, je réalise que c’est une nécessité. Si je ne vais pas bien, je ne pourrai pas être forte pour mes enfants. »

Ainsi, malgré les épreuves, ces ateliers offrent aux femmes de Gaza un moment pour respirer, s’écouter, et se rappeler qu’elles méritent aussi d’exister.

Lien vers les photos et vidéos des ateliers de soutien psychologique pour les femmes

https://drive.google.com/drive/folders/1W_ueVIgXEx3HluQ1gmW7kLH5ItAzrFMf

Lien vers les photos et vidéos du programme éducatif dans la région d’Abu Taima

https://drive.google.com/drive/folders/1VemfoSHoUCGaHdz-FoIQhnMQ8ZOjj7b7

La souffrance des habitants de Gaza ne cesse de s’intensifier, malgré la fin des bombardements. Comme si la fin de la guerre n’était que le début d’un nouveau cycle de tourments. La bande de Gaza, soumise à un blocus étouffant, est confrontée à une crise humanitaire sans précédent, exacerbée par la fermeture des points de passage et le renforcement des restrictions. Cela a entraîné une flambée vertigineuse des prix des produits de première nécessité, transformant la vie quotidienne des habitants de Gaza en un cauchemar permanent.

Avec la poursuite des restrictions sur l’entrée des marchandises et des produits essentiels, la nourriture se fait rare et les prix sont devenus inabordables. Ceux qui espéraient un soulagement après la fin des hostilités se retrouvent face à une nouvelle réalité infernale, où il leur est presque impossible de subvenir à leurs besoins fondamentaux. Les marchés sont pratiquement vides, et ceux qui parviennent à trouver de la nourriture doivent payer des sommes exorbitantes, alors qu’aucune solution immédiate ne semble se profiler à l’horizon.

Pression psychologique et menaces constantes : une vie sous la peur permanente

La souffrance ne se limite pas à la faim et à la pauvreté ; elle s’étend également à la dimension psychologique. Les habitants de Gaza vivent sous une pression écrasante en raison des menaces continues du gouvernement israélien. Entre les déclarations de responsables israéliens évoquant la volonté de « faire mourir de faim la bande de Gaza » et les menaces d’une nouvelle invasion, la population vit dans une angoisse perpétuelle, prise au piège dans un cycle sans fin de souffrances et d’oppression.

Chaque jour apporte son lot de craintes et d’incertitudes, non seulement à cause des conditions de vie insupportables, mais aussi en raison du discours raciste et extrémiste adopté par le gouvernement de Netanyahou, qui prône ouvertement l’anéantissement de Gaza et de ses habitants. Les déclarations des ministres israéliens sont devenues plus radicales que jamais, traitant les Palestiniens comme de simples chiffres sans valeur, et parlant de la bande de Gaza avec un langage de destruction totale et d’extermination.

Malgré le manque de ressources, les équipes sur le terrain redoublent d’efforts pour garantir l’acheminement de l’aide aux plus nécessiteux, conscientes que chaque repas distribué représente une lueur d’espoir pour une famille piégée dans une situation intenable. L’action de l’UJFP ne se limite pas à l’aide alimentaire, mais vise aussi à préserver la dignité des habitants qui, aujourd’hui, sont incapables de satisfaire leurs besoins les plus élémentaires en raison du siège imposé.

La crise de l’eau à Abu Taima : une lutte pour la survie

Parmi les nombreuses crises qui ravagent la bande de Gaza, celle de l’eau figure parmi les plus critiques, notamment dans la région d’Abu Taima, où les habitants et les agriculteurs souffrent d’une grave pénurie d’eau. L’interruption de l’approvisionnement a eu un impact direct sur la vie quotidienne des habitants et a paralysé l’activité agricole, aggravant ainsi une crise économique déjà profonde.

Dans un effort pour trouver des solutions durables, les équipes de l’UJFP ont récemment achevé la première phase d’un projet visant à résoudre la crise de l’eau à Abu Taima. Une citerne d’eau d’une capacité de 150 mètres cubes a été construite pour stocker et redistribuer l’eau aux habitants de la région, leur offrant ainsi une source d’approvisionnement vitale en ces temps de pénurie aiguë.

Finalisation du projet : une dernière étape vers la solution

Les efforts se poursuivent pour compléter ce projet, avec des équipes techniques actuellement mobilisées pour réparer le puits numéro 2 du système d’eau géré par l’UJFP. Une fois ces travaux achevés, les puits 1 et 2 pourront pomper l’eau directement vers la citerne, qui sera ensuite reliée au réseau de distribution desservant la région d’Abu Taima.

D’ici la semaine prochaine, le projet sera pleinement opérationnel, permettant à des centaines de familles d’accéder à une ressource vitale dont elles ont été privées pendant trop longtemps. Les agriculteurs, contraints d’abandonner leurs terres par manque d’eau, pourront enfin les cultiver à nouveau, après des mois de désespoir et d’incertitude.

Malgré le blocus… l’espoir persiste

En dépit de l’ampleur de la crise, les habitants de Gaza s’accrochent à la vie et cherchent une lueur d’espoir dans l’obscurité imposée par l’occupation. Malgré le blocus et les restrictions incessantes, l’aide humanitaire demeure leur seule bouée de sauvetage pour tenir bon dans ces conditions.

En fin de compte, aucun siège ne pourra briser la volonté d’un peuple qui croit en son droit à vivre dignement. Aucune privation, aucune oppression ne pourra effacer leurs rêves d’un avenir meilleur, quelles que soient les épreuves et les injustices auxquelles ils sont confrontés.

Lien vers les photos et vidéos des repas

https://drive.google.com/drive/folders/1VtfK28FPCEZv0FHLNunSfM_3ZpOK8WLI

Lien vers les photos et vidéos du bassin d’eau

https://drive.google.com/drive/folders/1X1sEIT5_z-Ui9xB9KFnZvxcdCPfU11yF

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