Béziers, Olargues, Agde, Pézenas, Nîmes, Alès, Albi, Castres, Rodez, Narbonne… : l’Occitanie en lutte !

Le Poing Publié le 19 décembre 2019 à 08:00 (mis à jour le 19 décembre 2019 à 11:54)
Manifestation contre la réforme des retraites à Nîmes mardi 17 décembre 2019 (photo de Patrick Frilet) Image d'illustration
Quasiment aussi suivie que celle du 5 décembre, la journée de mobilisation interprofessionnelle du 17 contre la réforme des retraites a été un franc succès, et pas que pour sa grande manifestation montpelliéraine ! Gilets jaunes et syndicalistes se sont bien souvent retrouvés côte à côte dans les centre-villes des agglomérations ou sur les points de blocage. Avec une grève des cheminots qui fait largement son effet, puisqu’un TGV sur cinq seulement circulait mardi en Occitanie, trois TER sur dix pour l’ancienne région Languedoc-Roussillon et cinq sur dix pour le côté Midi-Pyrénées. Aucun intercité de la région n’a pu prendre le rail mardi ! Le Poing vous offre un petit tour d’horizon des différents défilés et autres initiatives de la région.

8000 manifestants à Béziers

Sur Béziers, la journée de mobilisation du 17 a commencé tôt pour les surveillantes pénitentiaires, avec un blocage de la prison : « On a décidé de ce petit prélude pour accentuer la pression mise sur le gouvernement. », nous glisse Nicolas Burtz, secrétaire bitterois du syndicat Force Ouvrière Pénitentiaire. « Pour autant nous ne souhaitons pas mettre en avant nos revendications spécifiques en tant que surveillants de prison, même si on a un métier difficile, parce que l’essentiel c’est ce dossier des retraites. Le sort qui nous est réservé si la réforme passe n’est pas très enviable. » Pas moins enviable que celui des centaines de gilets jaunes enfermés. « En tant que syndicat ce n’est pas notre rôle de savoir pourquoi les gens sont en prison répond M. Burtz, ou de remettre en question des décisions de justice. Les prisonniers sont des prisonniers, point barre, on est des professionnels ! » Pour les détenus, les possibles conséquences de cette grève, ce sont des parloirs supprimés, des distributions aléatoires des repas, voire la séquestration pure et simple des détenus en cellule. Le personnel infirmier et médical n’a cependant pas été empêché de rentrer. Louper son train à Noël et moisir en cellule, ce n’est pas tout à fait la même chose…

Les grévistes ont rejoint le gros des manifestants au centre-ville de Béziers en milieu de matinée. Le cortège qui s’élance à 10h30 compte au moins 8000 manifestants, du jamais vu depuis bien longtemps !

Manifestation interprofessionnelle contre la réforme des retraites, Béziers, mardi 17 décembre
Et la lutte en pays biterrois ne s’arrête pas aux jours de grandes manifs : mercredi matin dès l’aube, environ 80 syndicalistes et gilets jaunes ont organisé un blocage devant l’entrée de la base de traitement des déchets ménagers du biterrois. Et l’Union Locale de la CGT promet « une mobilisation de plus en plus dense dans les jours à venir. »

Blocage mêlant gilets jaunes et syndicalistes, devant la base de traitement des déchets ménagers à Béziers, le 18 décembre au matin
Ce jeudi matin à l’aube, rebelote, 80 gilets jaunes, syndicalistes et soutiens aux grévistes ont bloqué la base logistique d’Intermarché de Béziers.

Blocage mêlant gilets jaunes et syndicalistes, à la base logistique d’Intermarché de Béziers, le 19 décembre au matin

Sète, un petit tour et puis s’en va

1500 contestataires défilaient mardi dans les rues de Sète. Partis du parvis de la mairie, ils ont ensuite fait le tour de la ville avant de se disperser dans le calme.

Manif, AG et concert de soutien à Pézenas

À Pézenas, c’est une centaine d’enseignants, gilets jaunes, cheminots et personnels hospitaliers qui ont tenus à marquer une présence dans les rues du bourg pour le 17. L’assemblée interprofessionnelle de Pézenas-Agde organise d’ailleurs ce jeudi soir une soirée de soutien aux grévistes, au Campotel de Pézenas.

Fonctionnaires mobilisés à Lunel

Quelques dizaines d’agents territoriaux de Lunel ont eux aussi fait le choix de rester manifester à domicile, dans l’après-midi de mardi.

Le village d’Olargues dans la place

Le village d’Olargues, dans les Hauts cantons de l’Hérault, n’a pas échappé à l’agitation du mardi : des agents territoriaux de la communauté de communes du Minervois au Caroux et du Sictom Agde-Pézenas en formation CHSCT ont accroché une banderole à l’entrée de la bourgade. Pendant que certains de leurs collègues, bien reçus, organisaient une distribution de tracts au village.

Des agents territoriaux de la CGT dans le petit village d’Olargues pendant la journée de mobilisation du 17 décembre

150 manifestants à Agde

Sur Agde, environ 150 personnes ont manifesté mercredi matin, entre l’hôpital et la mairie. Parmi eux, les professeurs du lycée Loubatière, du collège René Cassin et des écoles primaires, des cheminots, des hospitaliers, aides soignants et infirmiers, des gilets jaunes… Le Poing a pris la température dans le cortège. En discutant raisons de la colère, stratégie et pronostics avec ce caténairiste syndiqué à SUD Rail par exemple : « Le métier que j’exerce est un métier dangereux et prenant où, contrairement à M. Delevoye, on n’a pas le droit ni à l’oubli ni à l’erreur. Donc partir en retraite à 55 ans c’est bien mérité ! Quand on travaille de nuit au-delà de 60 ans, on peut facilement oublier une consigne de sécurité, comme c’est arrivé récemment à Béziers, et c’est l’accident tout de suite ! Sur un autre sujet, les gilets jaunes nous demandent pourquoi on ne prend pas toutes leurs revendications, pourquoi on s’en tient à cette réforme des retraites. Bien sûr, ce mouvement est beaucoup plus profond qu’une opposition à la réforme des retraites, mais dans un mouvement syndical on est obligés de cadrer ses revendications. Si on veut davantage de revendications, il nous faut un rapport de forces plus en notre faveur qu’aujourd’hui ! Bien sûr le but pour moi c’est la grève générale, mais on n’y est pas encore ! Mais enfin je suis enthousiaste et optimiste. Pour le moment on n’a pas assez de secteurs en grève, et nous on est déjà à notre deuxième semaine, on ne tiendra pas éternellement ! Mais si on doit reprendre au moins en partie le travail, on trouvera d’autres moyens. Regardez les gilets jaunes, ça fait plus d’un an qu’ils sont dehors, peut-être qu’on va faire pareil de notre côté ! Et on est pas seuls : même les cheminots de la CFDT sont avec nous depuis le tout début du mouvement, pour le moment ils sont d’accord avec nous, pas avec leur direction syndicale et Laurent Berger [secrétaire général de la CFDT] » Même optimisme chez Emmanuel, enseignant dans le premier degré sur Agde et syndicaliste encarté SNUIpp-FSU : « Ici on décide de manifester encore aujourd’hui parce qu’en plus de la mobilisation sur les retraites, ça fait très longtemps qu’on demande à être classés en Zone d’éducation prioritaire. Localement, c’est un sujet qui touche beaucoup de collègues grévistes, surtout dans le primaire et au collège. Évidemment cette réforme des retraites nous atteint aussi : pour un enseignant dans les conditions actuelles on ne peut guère espérer plus comme pension pour nos vieux jours que le minimum assuré par la réforme, 1000 euros par mois ! Mais je suis optimiste sur la suite, la mobilisation enfle ! Ce matin on a organisé une diffusion de tracts sur le parking d’Intermarché pour expliquer aux gens qu’il faut venir nous rejoindre. Et ensuite on a proposé à des personnels enseignant en formation éducative de nous rejoindre, et je dirais que le taux de réussite est presque de 100% ! » Autre entretien avec un membre du personnel du collège René Cassin, en grève illimitée depuis le 5 décembre : « L’interpro à l’échelle d’Agde c’est nouveau, on n’avait pas vu ça lors des mouvements sociaux précédents. C’est qu’on veut faire quelque chose chaque jour où on est en grève, comme la soirée de soutien aux grévistes ! C’est l’occasion de tisser des liens entre les différents secteurs, on en manque encore cruellement pour le moment. Par exemple en soutenant les cheminots qui sont à la pointe du mouvement, sinon leur grève va s’essouffler ! » Peut-être fatiguée par de longs mois de lutte, la femme gilet jaune que nous avons abordé s’est montré réservée sur cette question de la convergence des luttes : «  La convergence avec les syndicats c’est difficile pour nous gilets jaunes. Après il ne faut pas non plus généraliser, à Béziers ça s’est très bien passé. Mais on nous prend pour des alcooliques, des fainéants, des gueux, alors qu’on est juste des gens qui souffrent ! »

Manifestation contre la réforme des retraites à Agde ce mercredi 18 décembre
Un groupe de gilets jaunes à la manifestation contre la réforme des retraites d’Agde, mercredi 18 décembre
Manifestation contre la réforme des retraites à Agde ce mercredi 18 décembre

15 000 manifestants à Nîmes

Direction le Gard maintenant. Sans surprise, le plus gros cortège de mardi dans le département se trouvait à Nîmes. C’est environ 15 000 personnes qui ont manifesté. Notons la présence du comité de libération de Roland Veuillet, gilet jaune et syndicaliste incarcéré à la maison d’arrêt de Nîmes. Le cortège du personnel de radiologie du CHU de Nîmes, en grève une heure par jour jusqu’au retrait de la réforme, a fait une apparition très applaudie. Tôt le matin, une centaine de manifestants, cheminots, salariés d’Ennedis et des usines Haribo, avaient bloqué le dépôt de bus du réseau Tango. Une nouvelle manifestation est prévue pour ce jeudi 19 décembre à 14h30 au départ des jardins de la fontaine. Et l’intersyndicale promet une vague d’actions revendicatives pendant la période des fêtes !


Le comité de libération de Roland Veuillet, gilet jaune et syndicaliste incarcéré, à la manifestation contre la réforme des retraites à Nîmes ce mardi 17 décembre .

Alès, Bagnols-sur-Cèze, Villeneuve-les-Avignon

Les villes gardoises plus petites ne sont pas en reste : 6000 gilets jaunes et syndicalistes à Alès le 17 décembre, 800 à Bagnols-sur-Cèze où une nouvelle manifestation est programmée pour ce jeudi à 14h30 au départ de la place Mallet. Les grévistes de Villeneuve-lez-Avignon, réunis en assemblée générale mercredi, invitent aussi les habitants des communes voisines à une nouvelle journée de manifestation ce mercredi à 18h au rond-point Jacques Chirac. La consigne est de ramener des casseroles !

4000 manifestants à Narbonne, 3000 à Carcassonne

Cap sur l’Aude. Plus de 4000 personnes mardi à Narbonne, et 3000 à Carcassonne, dont des gilets jaunes et des membres de la Confédération paysanne. Le taux de grévistes à Carcassonne, était selon l’inspection académique, de 55% dans le primaire, et de 10% chez les personnels de restauration scolaire. Aucun train ne circulait, et la veille, des cheminots grévistes s’étaient assemblés autour d’un feu de palettes devant la gare pour expliquer à la population les raisons de la grève. Il faudra par contre attendre le 12 janvier pour pouvoir assister sur Carcassonne à la prochaine réunion de convergence des luttes ouverte aux non-syndiqués !

Manif sauvage à Rodez, profs mobilisés à Millau

Dans l’Aveyron la mobilisation du 17 s’est concentrée entre Millau et Rodez. Millau où des enseignants se sont assemblés devant le lycée Jean Vigo pour protester contre la nouvelle réforme du lycée, avant de rejoindre le cortège interprofessionnel dans l’après-midi. Sur Rodez le grabuge a commencé particulièrement tôt : dès 6h, des gilets jaunes ont installé un barrage filtrant sur le rond-point de Calcomier, à l’entrée de la ville, ralentissant ainsi très fortement la circulation vers le centre-ville, Villefranche et Decazeville. En fin de matinée ce ne sont pas moins de 9000 personnes qui ont battu le pavé à Rodez, parcours prolongé l’après-midi par une manif sauvage de 200 personnes, très encadrée par les policiers malgré son calme.

Mobilisation historique à Albi

Albi a vu la plus grosse mobilisation du Tarn, avec 15 000 manifestants mardi ! Forte présence étudiante et lycéenne. Dès 5h du matin, quelques centaines de grévistes avaient installé un barrage filtrant au rond-point situé en face de la gare, avant de bloquer tous les accès à la place centrale du Vigan avec de grands feux de palettes. 1000 manifestants ont fait le choix d’aller à Castres. Dans la zone industrielle de Mélou-Chartreuse, un départ de ligne moyenne tension a été sectionné, provoquant une grande et longue panne de courant !


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