Changement climatique : retour sur un week-end de mobilisation de la jeunesse montpelliéraine
Le Poing
Publié le 23 septembre 2019 à 20:19
Le nouveau rapport des grands laboratoires de climatologie est formel : la hausse des températures sera pire que prévue. Les quatre millions de jeunes mobilisés dans plus de 160 pays ce weekend pour la troisième grève scolaire pour le climat nous montrent la voie. À titre de comparaison, ils étaient moins de deux millions en mai. En France, ils étaient entre 30 et 40 000 vendredi à manifester à l’appel de Youth for Climate et de 56 autres organisations, et environ 150 000 le samedi pour la marche contre le réchauffement climatique, contre 350 000 en mars. À Montpellier aussi, les jeunes ont passé un week-end vert.
Manifestation, répression, occupation
Entre 1000 et 1500 lycéens ont manifesté à Montpellier vendredi, du Peyrou à la mairie, dans une ambiance festive. Aucun blocage, mais des rassemblements devant les lycées, comme à Jules Guesde. Deux élèves de cet établissement nous racontent les pressions administratives : « Vendredi matin à 7h15, on était devant le lycée avec nos banderoles, on ne bloquait pas le passage, les élèves pouvaient rentrer, on voulait juste être visible et ramener des gens pour partir à la manifestation. Le proviseur du lycée, monsieur Paolo Regnery, nous a poussés, nous a arrachés une banderole et nous a dit : “ça commence comme ça puis ça finit avec des poubelles brûlées ! Vous allez ramener tous les casseurs des lycées pro ! Je vous garantis que vous allez vous faire exclure ! Il y a d’autres manières de lutter, allez en cours ! Ne contestez pas, l’éducation, c’est pas à vous de la faire !” Et il nous a pris en photo. » Les parents d’une élève ont reçu un mail précisant que leur enfant « ne pourra pas accéder aux cours sans avoir justifié ses absences ».
Malgré les pressions, la manifestation s’élance et les jeunes, accompagnés de quelques syndicalistes, notamment de Sud Éducation, s’égosillent : « on est plus chaud, plus chaud que le climat » ou « et un, et deux, et trois degrés, c’est un crime contre l’humanité ! » Beaucoup d’entre eux ont le visage grimé de deux traits verts, symbole de la mobilisation. Des motards de la police municipale encadrent le cortège et quelques voitures de la nationale apparaissent ici ou là, mais globalement, le dispositif répressif est minime. Et pourtant, un lycéen, accusé d’avoir écrit sur un poteau avec un marqueur, a été interpellé. Lors de son audition libre, les jeunes font un sit-in devant le commissariat. Il aurait finalement écopé d’un rappel à la loi. Devant la mairie, les jeunes prennent la parole pour annoncer la tenue d’une assemblée générale et l’occupation du parvis de l’hôtel de ville.
Deux jours plus tard, ils sont encore quelques-uns à camper devant la mairie pour protester contre l’inaction de Philippe Saurel face à l’urgence climatique. Quelques gilets jaunes du rond-point de Prés d’Arènes apportent du thé. Les jeunes sont fatigués, mais déterminés, comme cette étudiante en sciences : « On est là depuis vendredi, on a passé le weekend ici. Pour manger on a fait de la récup’ d’invendus. On n’a pas beaucoup dormi mais on est fiers, on a pu mener plein de choses ! » Entre les formations à la désobéissance civile et aux gardes à vue, l’entretien avec un délégué du maire, et des débats avec les gilets jaunes, les jeunes n’ont pas chômé. Des policiers ont demandé le retrait des pancartes « Montpellier décrète l’État d’urgence climatique » collées à la mairie, mais les jeunes ont prétendu qu’elles étaient produites par la métropole, alors qu’il s’agissait en fait d’un détournement des affiches officielles. La police n’y a vu que du feu… Ils ont fini par lever le camp, mais pas pour longtemps : ils se sont promis de retourner régulièrement devant la mairie jusqu’au vendredi 27, avant de participer à la marche pour le climat, initialement prévue samedi dernier, mais reportée au dimanche 29… pour cause de climat !
Un rapport de force à construire
À Montpellier comme ailleurs, bon nombre de ces jeunes ont acté qu’une seule journée de manifestation ne changera rien. Une autre grève internationale est prévue pour le 27 septembre, pendant l’assemblée générale des Nations-unies, suivie a minima par une autre grève le 29 novembre. Dans le même temps, la campagne internationale Clean Walk Challenge se lance : à Montpellier une action collective de tri sélectif est organisé le dimanche 29 à partir de 10h à l’arrêt de tram Château d’Ô. Extinction Rébellion appelle aussi à des actions coup-de-poings à partir du 7 octobre.
Dans plusieurs pays, la lutte contre le réchauffement climatique passe les portes de l’entreprise. Aux États-Unis, des grévistes de l’entreprise ultra-polluante Amazon se sont rassemblés devant le siège de la multinationale sur des motifs écologiques. En France, la plupart des centrales syndicales soutiennent ces mobilisations, mais les préavis de grève restent marginaux. Seuls Solidaires et la FSU Éducation ont franchi le pays, comme plusieurs dizaines de syndicats à travers la planète. Le capitalisme détruit la planète, détruisons le capitalisme !
Crédits photos : Félix Rachas
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