“Gaza : mort vie espoir” : le livre qui chronique le quotidien sous les bombes

Elian Barascud Publié le 22 mai 2025 à 15:19
Brigitte Challande et Pierre Stambul étaient présents à Montpellier le 21 mai pour présenter l'ouvrage "Gaza : mort vie espoirs". ("Le Poing")

Ce mercredi 21 mai, Brigitte Challande et Pierre Stambul, porte-parole de l’Union juive française pour la paix, étaient à la Carmagnole de Montpellier pour présenter “Gaza : mort vie espoir”, un ouvrage collectif dont ils sont co-auteurs, qui compile des récits quotidiens d’habitants de Gaza depuis le 7 octobre. Un livre essentiel, qui témoigne autant de l’ignominie que subit la société palestinienne que de sa faculté de résilience

Septembre 2023, une délégation accompagne le député LFI Thomas Porte pour documenter les activités de la société civile palestinienne. Brigitte Challande, fine connaisseuse de Gaza et chroniqueuse à Altermidi, et Pierre Stambul, porte-parole de l’Union Juive Française pour la Paix (UJFP), en font partie. Mais tout ne se passe pas comme prévu : la délégation reste coincée au Caire, en Égypte, où elle est rejoint par Abu Amir, correspondant de l”UJFP à Gaza, en charge du suivi des projets paysans soutenus par l’association.

Quelques jours plus tard, le Hamas lance l’attaque du 7 octobre et les bombes israéliennes se mettent à pleuvoir sur Gaza. La délégation rentre en France, et Pierre Stambul et Brigitte Challande commencent à recevoir des témoignages quasi-quotidien d’Abu Amir ainsi que d’autres correspondants locaux impliqués dans la vie associative locale, qui racontent la vie au jour le jour dans l’enfer du génocide. Brigitte Challande se met alors à les compiler quotidiennement sous la forme de chroniques, nommées ”Gaza Urgence Déplacé.e.s” (lisibles sur l’Agora du Poing). “L’été dernier, on s’est dit que le matériel qu’on avait était inestimable d’un point de vue de témoignages, d’infos, de réflexion politique et de résistance, il fallait en faire quelque chose”, explique-t-elle. “Pour Abu Amir, écrire est devenu un acte de résistance.”

Pierre Stambul abonde : “Ce génocide est rendu possible par le silence complice d’une partie de notre personnel politique. Notre but était de déconstruire l’image qu’on à de Gaza comme une société antisémite entièrement contrôlée par le Hamas. En fait, c’est une société extrêmement pluraliste, avec énormément de partis politiques. Quand vous allez dans une famille à Gaza, chaque enfant est membre d’une organisation différente. Et le discours est unanime : moi, en temps que juif, j’ai toujours été bien accueilli, car pour eux, le problème, ce n’est pas les juifs, c’est l’occupation.”

Entre horreur et espoir

Le livre, agrémenté de cartes montrant le déplacement des populations palestiniennes, témoigne avec précision des atrocités commises par l’armée d’Israël. “Gaza est une prison, une cage”, déplore Pierre Stambul. “On y meurt d’au moins six façon différentes : les drones, les vedettes maritimes, les tanks, les avions, les hélicoptères et les tours tueuses automatiques qui tirent sur les paysans qui cultivent trop près du mur de séparation.”S’ajoute à cela la famine : “Depuis le 18 mars, on reçoit des photos d’enfants la peau sur les os, en tant que juif, cela me rappelle les camps de concentration nazis.”

Mais au-delà de l’horreur, l’ouvrage souligne aussi l’espoir d’une société qui continue de s’organiser en plein génocide. Y sont documentés des ateliers de soutiens psychologiques mis en place pour vivre la famine, des actions de scolarisation d’enfants, de culture de tomates ou encore l’organisation de distributions de trois repas par semaine à destination de 1 800 familles. “A Gaza, le fait même de respirer est un acte de résistance”, commente Brigitte Challande. “La société palestinienne est extrêmement résiliente. Dans l’heure qui a suivi la trêve, des milliers de gens étaient déjà en train de rentrer chez eux même si tout avait été rasé.”

L’appel de l’UJFP

Pour Pierre Stambul, “Le fascisme organisé commence à perdre la bataille idéologique, ils risquent un procès pour complicité de génocide. Même au sein de la diplomatie française, une partie des fonctionnaires sur place ne supporte plus la position française, ils envoient des rapports accablants.”

Pour l’UJFP, l’enjeu est donc de maintenir et d’accroître la pression sur les dirigeants autour de quatre mots d’ordre : le renvoi des ambassadeurs israéliens dans leur pays, la suspension de l’accord entre l’Union Européenne et l’État d’Israël, l’arrêt immédiat des ventes d’armes et de composants à Israël et l’exigence d’envoi d’aide humanitaire par des organismes internationaux reconnus. À ce propos, six personnalités (Étienne Balibar, Sophie Bessis, Rony Brauman, Mona Chollet, Annie Ernaux et Edgar Morin) ont récemment lancé un appel au gouvernement Français pour demander à Israël “l’ouverture des points de passage afin que l’aide humanitaire soit distribuée par des organisations internationales, selon les normes du droit international”. Cet appel, relayé par l’Union Juive Française pour la Paix, vise à être signé par le plus grand nombre (lien pour signer en cliquant ici). “L’objectif est de le faire signer par des partis, associations et syndicats”, précise Pierre Stambul. Le dimanche 22 mai, cet appel sera lu dans l’espace public dans plusieurs villes de France. Dans l’Hérault, cela se passera à Sète à 15 heures sur la place de la mairie.

Le livre “Gaza : mort vie espoir” sera présenté sur le parvis de la faculté Paul-Valéry (la présidence de l’université ayant refusé le prêt d’une salle) le 27 mai, et la présentation sera suivi de la projection du film “Aimer la mer à Gaza” en présence de sa réalisatrice, Sarah Katz, à 20 heures au cinéma Utopia à Montpellier.

D’autres présentations du livre auront lieu le 28 mai à 18 h 30 au Bousquet-d’Orb, salle Noël Chirac, le 13 juin à 18 h 30 à Béziers dans les locaux du Parti Communiste, rue Voltaire, et e 19 juin à 18 h 30 au local militant La Grève à Frontignan, là encore suivie de la projection du film “Aimer la mer à Gaza”.

“Gaza : mort vie espoir”, par Béatrice Orès, Sarah Katz, Brigitte Challande, Mutasem Eleiwa dit Abu Amir, Pierre Stambul, Kamel Elias, aux éditions Terreneuve, 20 euros. Tous les bénéfices seront reversés à des associations venant en aide au peuple palestinien.

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