L’observatoire des libertés Montpelliérain dénonce un “usage disproportionné” du canon à eau le 10 septembre

Lors de la manifestation du 10 septembre à Montpellier, les forces de l’ordre ont fait usage du canon à eau devant l’office de Tourisme. Selon l’observatoire des libertés Montpelliérain, cette utilisation s’inscrit en dehors du cadre du maintien de l’ordre fixé par le ministère de l’Intérieur
La vidéo, prise le 10 septembre à Montpellier, est devenue virale sur les réseaux sociaux : on y voit un jeune homme s’écraser au sol, projeté en arrière par le jet d’un canon à eau devant l’office de Tourisme. Contactée par Mediapart le le 11 septembre, la mère de la victime racontait : « Il souffre d’un traumatisme crânien, il a des points au niveau de l’arrière de la tête et s’est vu prescrire deux jours d’ITT [interruption temporaire de travail – ndlr] » […] « Il ne se rappelle rien, il regarde la vidéo en boucle pour essayer de se souvenir. Il ne se rappelle pas non plus des jours précédents. »
Aujourd’hui à Montpellier, un manifestant a été grièvement blessé par un tir de canon à eau ciblé dans le visage. Les images parlent d’elles-mêmes.
— Ricardo Parreira (@ParreirRicardo) September 10, 2025
Ce manifestant est actuellement hospitalisé, dans un état grave : perte de mémoire, incapacité de parler, etc.
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Principe de gradation
Selon l’observatoire des Libertés Montpelliérain, groupe d’observateurs lié à la Ligue des Droits de l’Homme, l’usage du canon à eau ce jour-là était disproportionné. Une instruction du ministère de l’Intérieur datée du 21 avril 2017 sur le maintien de l’ordre rappelle que “l’emploi de la force dans le cadre du maintien de l’ordre public consiste à mettre en œuvre des moyens coercitifs strictement nécessaires à la dispersion d’un attroupement, suivant un principe de gradation“. Ce principe de gradation stipule que les forces de l’ordre doivent d’abord réaliser des sommations audibles par la foule, puis des charges, et, ensuite, le cas échéant, utiliser des “moyens intermédiaires” (armement non classé en tant qu’arme à feu, – bâtons, engins lanceur d’eau, containers lacrymogènes à main, grenades lacrymogènes…-)
“Le 10 septembre, alors que la manifestation, non interdite, s’était bien passée et que les gens étaient en train de manger à la cantine populaire en haut de la place de la Comédie, il n’y a eu ni sommations audibles au mégaphone ni charges de la part de la police avant l’usage du canon à eau”, affirme de son côté Sophie Mazas, avocate montpelliéraine spécialiste en libertés fondamentales.
“Éviter tout impact excessif”
Par ailleurs, Amnesty International précise, dans un rapport dédié à l’utilisation du canon à eau, que celui-ci doit être utilisé “en utilisant la puissance de jet prévue de manière à éviter tout impact excessif”, et sans viser la tête ou le haut du corps. l’ONG note également que “la police ne peut utiliser de canons à eau en mode haute pression qu’en cas de violence généralisée, et non dans un simple objectif de dispersion ou pour maîtriser une résistance passive opposée à un ordre, par exemple des personnes qui ne font que s’asseoir sur le sol.” Pour l’avocate Sophie Mazas, “il y a eu un problème de méthode ce jour-là, les forces de l’ordre n’étaient pas assez nombreuses pour réaliser des charges en haut de la Comédie”. A noter que cette arme a déjà provoqué des lésions pouvant faire perdre la vue, voire des décès, comme en Corée du Sud en 2016.
Outre le canon à eau, la Ligue des Droits de l’Homme de Montpellier précise dans un communiqué paru ce mercredi 17 septembre que “des policiers municipaux ont été observés, casqués et équipés de boucliers, disposés en ligne au sein du dispositif répressif de la manifestation place de la Comédie, prenant part de manière évidente et parfaitement illicite à des opérations de maintien de l’ordre, ce que la mairie de Montpellier a nié en prétendant qu’ils étaient présents pour « faire la circulation ».”
Contactée, la préfecture de l’Hérault n’a pas donné suite à nos sollicitations.
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