Montpellier : les kurdes rassemblés contre le remplacement d’un maire démocratiquement élu en Turquie

Le Poing Publié le 11 juin 2024 à 16:37

Quelques dizaines de membres de la diaspora kurde montpelliéraine se sont retrouvés sur la Comédie ce lundi 10 avril. Objectif : dénoncer le remplacement et la condamnation d’un maire kurde démocratiquement élu par le pouvoir turc. Mais aussi pointer du doigt la détention du leader kurde Ocalan et l’utilisation d’armes chimiques contre les combattants kurdes au nord de l’Irak.

On apprenait le 3 juin dans un communiqué du parti politique de l’élu, le Dem Parti (Parti de l’égalité et de la démocratie des peuples, à gauche), que celui-ci a été arrêté en plus d’être démis de ses fonctions. Les autorités turques lui reprochent d’appartenir au PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan, une organisation importante dans la gauche kurde, toujours classée comme organisation terroriste par l’Union Européenne. Memet Sıddık Akış, l’ancien maire de Hakkari démis de ses fonctions, a été condamné le 5 juin à 19 ans et six mois d’emprisonnement par un tribunal turc, pour des liens présumés avec le PKK que le Dem Parti nie.

« Le dossier d’enquête utilisé pour justifier cette opération est entièrement basé sur des allégations sans fondement de la police et du procureur. La destitution de M. Akış, qui a été élu démocratiquement, est un coup d’Etat flagrant contre la volonté des habitants de Hakkari, dont la majorité de la population est kurde. La tentative de la coalition AKP-MHP [NDLR : coalition droite-extrême droite au pouvoir en Turquie et dirigée par le président Erdogan] de se venger de sa sévère défaite aux élections locales en attaquant les municipalités du DEM Parti signifie l’abolition du droit constitutionnel de voter et d’être élu. Les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme ont montré que la définition large et vague du terrorisme formulée par le système juridique turc s’est transformée en un instrument utilisé par le gouvernement pour éliminer ses rivaux politiques. », peut-on lire dans le communiqué du Dem Parti.

Début avril 2024, des manifestations de masse avaient forcées le gouvernement turc à reculer dans sa tentative d’invalider l’élection du maire de Van, l’une des plus grandes villes kurdes de l’est de la Turquie, lui aussi membre du Dem Parti.

Le 7 avril, le Centre Démocratique Kurde en France (CDK-F) publiait par ailleurs un nouveau communiqué dénonçant l’usage « d’armes chimiques [NDLR : interdites par les conventions internationales sur la guerre] par l’armée turque contre les combattants kurdes du Sud-Kurdistan (Nord de l’Irak) au cours du mois de mai 2024. » Avant de demander « aux organisations de la société civile française, aux experts en la matière, aux partis politiques d’agir pour pousser l’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques (OIAC) à enquêter sur l’utilisation d’armes chimiques et faire condamner la Turquie pour crimes de guerre. »

La gauche kurde propose dans son opposition au régime d’Erdogan une alternative foncièrement progressiste, qui allie auto-détermination du peuple kurde, cohabitation avec les autres communautés ethniques et religieuses de la région, exploration d’une voie vers la démocratie directe, émancipation poussée des femmes envers les carcans patriarcaux, refondation d’institutions traditionnellement à la botte des pouvoirs comme la police et la justice, et élaboration d’une économie coopérative tentant de dépasser le capitalisme et de répondre à l’urgence écologique, et qui est expérimentée à grande échelle depuis plusieurs années dans certaines régions du Rojava syrien sous l’impulsion du PYD ( Parti de l’Union Démocratique, proche du PKK).

Pourtant, alors que son leader Abdullah Ocalan est emprisonné par la Turquie depuis 1999, à l’isolement, sans que personne n’ait de nouvelles de son état de santé depuis trois ans, le PKK est encore listé comme une organisation terroriste par l’Union Européenne et les États-Unis.

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