Montpellier : polémique après une conférence de presse du RN au Club de la presse

Elian Barascud Publié le 10 avril 2025 à 11:17 (mis à jour le 10 avril 2025 à 11:28)
Le Club de la presse Occitanie est située sur la place du Nombre d'Or, dans le quartier Antigone, à Montpellier. ("Le Poing")

Vendredi 4 avril, la Fédération Rassemblement National de l’Hérault organisait “une conférence de presse pour présenter les enjeux après la condamnation de Marine le Pen”, dans les locaux du Club de la presse d’Occitanie de Montpellier. Une quarantaine de journalistes ont écrit une lettre pour dénoncer cette venue. Pire, le RN local a fait mine de s’inquiéter au sujet de la liberté de la presse

Depuis quarante ans, le Club de la presse Occitanie à Montpellier regroupe journalistes, communicants (dont ceux des partis politiques, nous y reviendrons) et acteurs de l’information. Sa mission est de défendre la liberté de la presse, favoriser les échanges entre professionnels, soutenir les jeunes journalistes, et promouvoir l’éducation aux médias. Il organise régulièrement des débats, des formations, des rencontres et des conférences de presse, moyennant 160 euros par jour pour la location de sa salle.

C’est justement ce dernier point qui a suscité des crispations ce vendredi 4 avril, à l’annonce d’une conférence de presse organisée par la fédération Héraultaise du Rassemblement National pour évoquer “les enjeux après la condamnation de Marine le Pen”. Une quarantaine de journalistes (dont l’auteur de ces lignes, par ailleurs adhérent au Club) signent alors une lettre ouverte adressée à Dominique Antoni, président du club de la presse, pour dénoncer cette venue.

Nous nous permettons de protester vigoureusement contre la tenue de cette conférence de presse du RN sous l’égide du club de la presse. Des médias comme Cnews ont ouvert un boulevard aux discours de haine de l’autre forgés par le RN, Zemmour, etc., et voilà que le club de la presse Occitanie trouve normal de faire pareil ! Concernant la condamnation d’élus du RN pour détournement de fonds publics, laisser le RN diffuser dans les locaux du club de la presse un discours niant et refusant cette condamnation, attaquant les magistrats, un discours déjà diffusé par Europe 1 et C8, contre lesquels il y a des plaintes à l’Arcom qui doit prendre une décision, c’est tout sauf éthique.Le RN est contre la démocratie, contre la presse libre. Des journalistes ont été menacés par l’extrême-droite sur les réseaux sociaux, de même que des magistrats, etc., voire menacés physiquement. Comment pouvez-vous scier la branche (la démocratie) sur laquelle nous tous sommes assis”, pouvait-on y lire.

Le Club est “neutre”

Une lettre ouverte qui “fausse la réalité”, selon la réponse adressée par Dominique Antoni, président du club de la presse Occitanie : “Le Club n’organise pas des événements pour le compte d’un parti politique, quel qu’il soit. Le Club de la presse ne transgresse pas son éthique. Il joue son rôle de lieu ouvert comme l’est notre démocratie. Sous la mandature précédente, la question de l’acceptation ou non des partis politiques ou organisations extrêmes a été largement débattue. Chaque demande de conférence de presse est examinée par le Bureau et tranchée par lui. Concernant le Rassemblement national, il a déjà tenu, par le passé, des conférences de presse dans les locaux de la place du Nombre d’or à Montpellier, comme le font ELV, LR, le Parti socialiste, LFI, etc.”

Plus loin dans sa réponse, Dominique Antoni écrit : “En refusant de le recevoir, il [Le Club de la presse] se draperait dans une posture ou un militantisme qui ne dit pas son nom – qui, certes, peut satisfaire quelques egos ou pensées contraires – mais il mépriserait les fondamentaux du journalisme qui reposent sur le respect, l’équité et la transparence.” Insinuerait-il que les signataires de cette lettre ouverte sont des militants ?

Quand le RN se grime en défenseur de la liberté de la presse

Les communicants héraultais du RN, membres du club de la presse à titre individuel, ont répondu dans un communiqué pour déplorer “un climat d’intolérance” et “une atmosphère où toute opinion dissidente est immédiatement rejetée”. (On pourrait disserter sur la notion “d’opinion dissidente” à l’heure où les cadres de la macronie reprennent les éléments de langage et des bouts du programme du parti à la flamme, déjà allègrement distillés par la presse dominante, mais bon, passons…)

Pire, dans son communiqué, le RN 34 affirme son “attachement à une presse libre”. Les journalistes agressés par Bruno Gollnisch, cadre du parti, lors d’un défilé, ou Paul Larrouturou, de Quotidien, violemment chassé après une question à Marine le Pen, apprécieront…

L’extrême-droite s’en prend aux journalistes, mais le Club de la presse ne voit pas de contradiction entre le fait de défendre nos camarades de l’Empaillé, attaqués en diffamation par la municipalité RN de Perpignan, et d’inviter des députés du même parti pour défendre leur cheffe condamnée par la justice… 160 euros la salle, est-ce finalement le prix auquel la démocratie est bradée ? A méditer…

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