Rassemblement kurde pour la journée mondiale de Kobané à Montpellier

Le Poing Publié le 2 novembre 2017 à 01:22 (mis à jour le 28 février 2019 à 22:23)

Une cinquantaine de personnes se sont rassemblées hier soir sur la place de la Comédie à l’occasion de la journée mondiale pour Kobané. Cette ville située dans le nord de la Syrie, à quelques kilomètres de la frontière turque, est un symbole de la résistance kurde contre l’État islamique. Un petit rappel des faits s’impose. En août 2014, galvanisés par la proclamation du califat deux mois auparavant(1), les djihadistes envahissent la ville de Sinjar, située dans le nord-ouest de l’Irak, près de la frontière syrienne, et massacrent des milliers de Kurdes yézidis (communauté kurdophone particulièrement présente dans le Kurdistan irakien)(2). Le 15 septembre 2014, l’État islamique lance une offensive sur Kobané avec le soutien indirect de l’État turc(3), qui a toujours considéré les revendications kurdes comme une menace pour les intérêts de la Turquie. Kobané est alors défendue par les troupes kurdes des YPG (unités de protection du peuple, branche armée du PYD, le parti de l’union démocratique syrien) et du PKK (parti des travailleurs du Kurdistan, surtout implanté en Turquie)(4). Pour les Kurdes, cette bataille est décisive car la perte de Kobané ruinerait le vieux projet de création d’un Kurdistan occidental unissant enfin les différentes communautés kurdes de la région.

Depuis la réalisation de cette carte, les forces kurdes ont libéré la ville de Rakka et l’armée syrienne a conquis Maadan (carte du Monde diplomatique de Cécile Martin, septembre 2017)

Face à l’État islamique, les forces kurdes mènent la bataille

Pour les Kurdes, l’objectif n’est pas la création d’une nation kurde indépendante, comme le réclamaient historiquement les militants et soldats du PKK, mais la mise en place du confédéralisme démocratique. Pour le leader kurde Abdullah Öcalan, emprisonné sur une île turque depuis 1999, « l’appel à la création d’un État séparé représente les intérêts de la classe dirigeante et ceux de la bourgeoisie, mais ne reflète en aucun cas les intérêts du peuple »(5)Il prône alors une société démocratique, écologique et antisexiste fondée sur des conseils populaires autogérés et reliés entre eux par un système de fédéralisme intégral, le tout étant assuré par une économie collectiviste. Ces idées, empruntées au théoricien anarcho-communiste Murray Bookchin, sont appliquées petit à petit au Rojava, la région sous le contrôle des trois « cantons » kurdes d’Afrin, de Kobané et de Cezire.

La victoire, en juin 2015, des forces kurdes à Kobané n’est donc pas simplement un succès militaire contre l’État islamique(6), c’est aussi et surtout une victoire du progressisme et de l’émancipation face à l’obscurantisme et au totalitarisme. « Le confédéralisme démocratique est un souffle d’air frais pour la démocratie, qu’on a perdu, ici, en France nous confie Pesheng, présente au rassemblement en tant que membre du centre démocratique kurde de Montpellier, mais qui ne parle ici qu’en son nom propre. L’idée, au Rojava, c’est d’inclure tout le monde dans la politique. Assad [le président syrien] et les Occidentaux veulent tous profiter de la chute de Daech [État islamique], prendre leur part du gâteau, mais je ne pense pas qu’ils seront en mesure de remettre en cause les droits obtenus par les Kurdes. Les gens qui ont versé le sang, ce sont les Kurdes sur place, les Syriens qui ont rejoint les forces démocratiques, et les Européens qui ont rejoint le combat du PKK et du YPG. Sans homme au sol, la région aurait été perdue. Les Occidentaux ont un peu aidé avec les bombardements, mais pas assez. Si on avait donné des armes plus tôt aux Kurdes, beaucoup de morts auraient pu être évités. »

Aujourd’hui, Kobané est libre mais le combat continue. Pour le soutenir, rendez-vous samedi prochain à 16h devant le Peyrou à l’appel du centre démocratique kurde de Montpellier.

Sources :

(1) « Les islamistes de l’EIIL proclament un “califat islamique” entre l’Irak et la Syrie », Le Monde, le 29 juin 2014, lien.
(2) « L’EI accusé de “nettoyage ethnique et religieux” », La Presse, le 25 août 2014, lien.
(3) « Kobané, victime du grand jeu turc », Orient XXI, le 15 octobre 2014, lien.
(4) « YPG, la milice kurde qui défend Kobané », Institut kurde de Paris, le 8 octobre 2014, lien.
(5) Abdullah Öcalan, Le confédéralisme démocratique, Londres, International Initiative Edition, “Liberté pour Abdullah Ocalan – Paix au Kurdistan”, 2011, 50 pages, (l’extrait cité est à la page 21), lien.
(6) « Nouvelle victoire kurde face à Daesh », L’Humanité, le 17 juin 2015, lien.

Lire d’autres articles du Poing sur le sujet :

« Le municipalisme libertaire », une alternative kurde pour le Moyen-orient ? », Le Poing n°11, novembre 2014, lien.
« Conflit au Kurdistan : la Turquie mise sur le feu », Le Poing n°18, septembre 2015, lien.

Tract diffusé et lu publiquement lors du rassemblement :

1er novembre, Journée mondiale pour Kobanê

Avec le début des affrontements armés en Syrie, Daesh a occupé de plus en plus de territoires en Syrie et en Irak, devenant un réel danger pour l’humanité entière. Malgré les objectifs obscurantistes de cette organisation barbare, les puissances régionales et internationales ne se sont pas privées de l’instrumentaliser pour réaliser leurs sales ambitions. La Turquie s’en est servi pour empêcher les Kurdes d’acquérir un statut. L’Arabie saoudite et le Qatar l’ont soutenu pour des raisons confessionnelles. Et certains États occidentaux ont laissé faire par soif de profit et de pouvoir. Daesh n’a pas seulement sévi dans la région, il s’est livré à des actes terroristes partout dans le monde. Il a semé la barbarie et la terreur, provoquant l’exode effaré de centaines de milliers de personnes.

En août 2014, Daesh a envahi la ville de Shengal (Sinjar en arabe), massacrant des milliers de Kurdes yézidis et enlevant près de 5 000 femmes pour en faire des esclaves sexuelles.

Peu de temps après, le 15 septembre 2014, il a, sous l’incitation de l’État turc, assailli la ville de Kobanê dans le but d’y détruire l’administration kurde fondée sur la laïcité, l’égalité, la coexistence des différents peuples et confessions. Kobanê a alors été le théâtre de l’affrontement entre, d’une part, l’ordre fondamentaliste et archaïque prôné par Daesh et, d’autre part, le paradigme représenté par les Kurdes, fondé sur la liberté des femmes, la démocratie et l’écologie. De ces deux conceptions du monde totalement opposées, c’est la seconde qui a finalement triomphé.

Ainsi, Kobanê est devenue un symbole pour le monde démocrate et progressiste et en particulier pour les femmes. C’est grâce à leurs profondes valeurs humaines que les combattantes et combattants kurdes de la liberté ont vaincu Daesh à Kobanê. La défaite de Daesh à Kobanê a sonné le glas de cette organisation. Kobanê a eu raison du régime de la terreur fondé par Daesh.

Cette réalité a bien été perçue par les peuples du monde. Le 1er novembre 2014, partout dans le monde, les gens sont descendus dans la rue pour exprimer haut et fort leur soutien à Kobanê et dénoncer les puissances qui soutiennent Daesh.

Aujourd’hui, Kobanê est libre, mais le combat continue. Pour rendre hommage aux combattantes et combattants de la liberté et fêter la victoire de Kobanê qui est devenue le symbole de la résistance pour une société libre, nous vous invitons à nous rejoindre, à l’occasion de la Journée mondiale pour Kobanê, le 1er novembre.

  • Partout dans le monde, le 1er novembre, chantons les chants pour la liberté et soutenons le combat pour la création d’une société fondée sur l’écologie, la liberté des femmes, la démocratie.
  • Le 1er novembre, élevons la voix de la paix et de la démocratie pour dire stop aux forces qui attisent les guerres pour assouvir leurs intérêts économiques et impérialistes.
  • Pour dire stop à l’intégrisme et aux politiques nationalistes et dictatoriales des Etats de la région, rejoignons-nous le 1er novembre !
  • Pour renforcer l’internationalisme et la solidarité internationale, participons aux manifestations du 1er novembre.

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