Une nuit pas comme les autres à Montpellier : quand le mouvement social s’encanaille
19 h 30, ce lundi 20 mars, place des Martyrs de la Résistance : environ 700 personnes ont répondu sentes au rassemblement devant la préfecture montpelliéraine, en réaction à l’échec de la motion de censure présentée contre le gouvernement d’Élisabeth Borne. Le cortège s’élance rapidement dans le centre historique et gagne de l’ampleur au fil des carrefours piétons. Les visages sont jeunes, la foule compacte, les slogans vindicatifs. Une ambiance qui marque par son contraste avec celle des cortèges syndicaux traditionnels, cœur de la mobilisation contre la réforme des retraites depuis deux mois.
Après un premier face à face avec les forces de l’ordre devant la préfecture le cortège s’enfonce dans les ruelles sinueuses menant vers la gare Saint-Roch. Le pas est déterminé, la foule se densifie, des barricades fleurissent autour de l’Écusson – la police elle, peine à s’organiser face à une mobilisation aussi volatile. Les camions de CRS arrivent en trombe devant l’entrée principale de la gare alors que les manifestants ne sont qu’à quelques dizaines de mètres des portes : à tribord, toute ! Ça repart vers la Comédie. La spontanéité de la mobilisation déroute, surtout que les passants semblent apprécier le spectacle : la maréchaussée n’a pas fini d’enfiler ses boucliers, mais, vite, il faut retourner dans les camions. Un jeu du chat et de la souris aux lumières des feux de poubelles qui durera près de deux heures, sans que la police ne parvienne à reprendre la main sur une mobilisation si imprévisible.
Ce quatrième jour de mobilisation consécutif en France depuis le recours au 49.3 semble marquer une rupture avec les précédents du mouvement contre la réforme des retraites. De Paris à Brest, de Strasbourg à Saint-Étienne, de Montpellier à Lille : l’émeute parcourt le pays comme un écho au vote qui se déroulait plus tôt dans la soirée à l’Assemblée nationale. Ici les signes d’une mobilisation au tournant sont nombreux : des gilets jaunes présents dans le cortège, quelques drapeaux d’organisations syndicales, des étudiants… Et des fenêtres qui s’ouvrent devant les manifestants pour les applaudir. Avant de se disperser on entend les rendez-vous pris pour demain, ça foisonne, ça bout. Les prochains jours vont être chargés. Le nombre et la diversité des mobilisations partout en France laissent entrevoir une inversion du rapport de force amorcé par Emmanuel Macron : reste à savoir qui cédera le premier.
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