Après le 10 septembre à Montpellier, le préfet de l’Hérault en plein déni de réalité ?

Alors que la manifestation montpelliéraine du 10 septembre a été marquée par des violences policières, notamment sur un journaliste, et qu’une personne a dû être transportée à l’hôpital après un coup de canon à eau, François-Xavier Lauch, préfet de l’Hérault s’est fendu d’un communiqué pour blanchir la police. Pourtant, les faits sont têtus
“Circulez, il n’y a a rien à voir.” C’est en substance ce qu’on peut retenir du communiqué publié par la préfecture de l’Hérault au lendemain de la manifestation du 10 septembre à Montpellier, pour démentir des “rumeurs colportées sur les réseaux sociaux par des personnes qui cherchent à atteindre l’honneur de la Police Nationale.”
Dans celui-ci, François-Xavier Lauch, préfet de l’Hérault, affirme qu’“il n’y a pas eu de blessé grave à la suite de l’emploi du camion lanceur d’eau à Montpellier.” Cette déclaration fait suite à la publication par le journaliste Ricardo Parreira d’une vidéo où l’on voit un jeune manifestant prendre un jet de canon à eau en pleine face et s’écraser au sol dans un mouvement de recul.
Aujourd’hui à Montpellier, un manifestant a été grièvement blessé par un tir de canon à eau ciblé dans le visage. Les images parlent d’elles-mêmes.
— Ricardo Parreira (@ParreirRicardo) September 10, 2025
Ce manifestant est actuellement hospitalisé, dans un état grave : perte de mémoire, incapacité de parler, etc.
🧵⬇️ pic.twitter.com/3lg02QaG8j
Contactée par Mediapart, la mère de la victime affirme que son fils a été transporté à l’hôpital. « Il souffre d’un traumatisme crânien, il a des points au niveau de l’arrière de la tête et s’est vu prescrire deux jours d’ITT [interruption temporaire de travail – ndlr] » […] « Il ne se rappelle rien, il regarde la vidéo en boucle pour essayer de se souvenir. Il ne se rappelle pas non plus des jours précédents. Cette nuit, d’une minute à l’autre, il ne se souvenait pas de ce qu’il venait de dire…» . Pour François Xavier-Lauch, un traumatisme crânien et de l’amnésie, ce n’est visiblement pas “grave”…
La police protège-t-elle vraiment les journalistes ?
Pire, le préfet de l’Hérault va jusqu’à affirmer que “les policiers ne ciblent pas les journalistes mais les protègent.” Et d’ajouter “En revanche il est illégal que des personnes, fussent-elles journalistes, entravent les interpellations rendues nécessaires par l’action des manifestants.”
Le journaliste Samuel Clauzier, étudiant à l’école de journalisme de Montpellier et alternant à Rue89 Bordeaux, appréciera. Dès le matin du 10 septembre, au rond-point de Près d’Arènes, il se fait gazer à bout portant par la police. Et peu après 14 heures, alors qu’il tente de filmer une interpellation, un policier essaie de l’étrangler.
Alors que je filme une interpellation, un policier de la CDI 34 me prend à partie et m’agresse à plusieurs reprises (étranglement, coups dans mon smartphone). Nombreuses entraves au travail de la presse depuis le début de la journée à Montpellier. pic.twitter.com/arOy00ldL1
— Samuel Clauzier (@Masleuu) September 10, 2025
“Un cordon de sécurité s’est mis en place et j’ai tenté de le contourner pour m’ouvrir un angle de vue. Un policier a tapé une première fois avec sa main en faisant tomber mon smartphone. J’ai continué à filmer et c’est là qu’il m’a attrapé à la gorge et qu’il m’a projeté vers l’arrière”, explique-t-il à Midi Libre. . “Ils se mettaient systématiquement devant moi pour que je n’aie pas les images”, précise-t-il à Mediapart, où il évoque également une scène qui s’est déroulée environ une heure avant, avec le même policier : “Il s’est mis à nous filmer, Ricardo et moi. Ça a enclenché une discussion assez cordiale mais vaseuse dans laquelle il disait que les journalistes gagnent leur vie sur la misère du monde. Voyant mon brassard presse, il m’a lancé : “Garde-le, ton brassard, c’est bien.”
L’affirmation du préfet de l’Hérault soutenant que la police protège les journalistes est encore plus douteuse à l’heure où les journalistes sont justement menacés d’être évincés des manifestations : fin juillet, le ministère de l’intérieur a publié un “schéma national des violences urbaines” qui précise que “la prise en compte du statut des journalistes (…) ne trouve pas à s’appliquer dans un contexte de violences urbaines“. Le document a fait bondir les syndicats de la profession, qui dénonce une atteinte à la liberté d’informer.
De son côté, la direction de l’école de journalisme de Montpellier, à laquelle Samuel Clauzier est inscrite, “condamne fermement les violences dont [Samuel Clauzier] a été victime.” “Agressé physiquement, l’étudiant, dont une partie du matériel a été cassé, était en situation pédagogique, encadré par notre établissement, et remplissait pleinement sa mission d’observation et de reportage. […] L’exercice du métier de journaliste, y compris en formation, doit pouvoir se faire dans des conditions de sécurité et de respect. […] Ce type d’agression est non seulement inadmissible, mais aussi profondément inquiétante pour la liberté de la presse.”
Nos articles sont gratuits car nous pensons que la presse indépendante doit être accessible à toutes et tous. Pourtant, produire une information engagée et de qualité nécessite du temps et de l’argent, surtout quand on refuse d’être aux ordres de Bolloré et de ses amis… Pourvu que ça dure ! Ça tombe bien, ça ne tient qu’à vous :
ARTICLE SUIVANT :
