Le SNALC, syndicat enseignant réactionnaire, souhaiterait participer à la manifestation du 22 mars
Avec 140 cortèges prévus dans toute la France, la manifestation du 22 mars pour la défense des services publics s’annonce comme une étape décisive pour la construction d’un mouvement social d’envergure. Si les partisans de cette mobilisation peuvent se réjouir de la participation de nombreux secteurs en lutte (étudiants, cheminots, personnels des EHPAD…), il est en revanche légitime de s’interroger sur la pertinence politique de la venue de plusieurs organisations dont les revendications sont aux antipodes de celles portées par le mouvement social. C’est bien évidemment le cas d’Alliance police nationale, mais aussi du SNALC (Syndicat NAtional des Lycées et Collèges), dont les représentants diffusent une idéologie réactionnaire. Selon nos informations, le SNALC souhaiterait défiler à Montpellier, derrière le cortège de Solidaires.
Un syndicat « apolitique » ni de gauche, ni de gauche
Créé en 1905 sous la forme d’une association professionnelle, le SNALC se constitue en syndicat en 1925, après la levée de l’interdiction pour les fonctionnaires de se syndiquer. A la différence de nombreux syndicats d’éducation du primaire, le SNALC a toujours refusé de s’affilier à la CGT, contribuant ainsi à forger sa réputation de syndicat de droite. Il est même parfois considéré comme proche de l’extrême-droite étant donné que le collectif Racine, affilié au Front National, lui a apporté son soutien lors des élections professionnelles de l’hiver 2014. Jean-Rémi Girard, secrétaire national à la pédagogie du SNALC, dément toute proximité avec l’extrême-droite : « Notre organisation a dû lutter […] pour pouvoir s’exprimer sans que ses propos soient immédiatement suspectés d’être nauséabonds, voire fascistes. Le SNALC réaffirme donc avec force qu’il est un syndicat professionnel, indépendant de tout parti politique (et donc ni de droite, ni de gauche) ».(1) La lecture des articles publiés sur le site du SNALC permet pourtant rapidement de comprendre que le SNALC n’est ni de gauche, ni de gauche. Pourquoi l’école va mal ? Parce que depuis « trop longtemps […], le climat scolaire de nos établissements a été en proie à la culture soixante-huitarde de l’excuse ».(2) Qu’est-ce qui pose problème dans les programmes scolaires ? « Des sujets hallucinants (‘‘socialisme, communisme et syndicalisme en Allemagne depuis 1875’’, sérieusement ?) »(3) Qu’est-ce qui affaiblit la pédagogie des professeurs ? « La critique des cadres traditionnels d’apprentissage »(4) Dans de nombreuses publications, le SNALC défend une école régie par l’autorité et la discipline.
Laïcité ou islamophobie ?
Le SNALC développe aussi une rhétorique laïque qui cache mal une obsession portée sur l’islam. Le syndicat a relayé une tribune intitulée « Foulard islamique : ‘‘Profs, ne capitulons pas !’’ », notamment rédigée par Alain Finkielkraut.(5) Le SNALC s’oppose aux menus de substitution, comme les assiettes sans porc pour les musulmans, car selon le syndicat, « la cantine, service public facultatif, n’exclut aucun élève ; ce sont des élèves qui excluent certains aliments de leurs assiettes. »(6) Après les attentats du Bataclan, le SNALC a publié un communiqué pour affirmer que « si la guerre existe et que nos valeurs existent, il faut apprendre à les défendre. »(7) Et pour ceux qui n’auraient pas compris que c’est surtout l’islam qui est visé, le syndicat précise qu’ « en filigrane de ces débats [sur la laïcité] se pose également la question de la place de l’Islam en France. »(8) « Jusqu’où ira-t-on au nom du vivre-ensemble, au nom d’une tolérance bienveillante pour ne pas dire complaisante ? »(9) s’interroge le SNALC, qui dénonce les tièdes : « On ne fait pas de vagues… par peur. De paraître réactionnaire, intolérant ou raciste ? »(10) Les partisans d’une école critique et émancipatrice, fondée sur l’égalité et non sur l’autorité, considèrent en effet que l’idéologie portée par le SNALC est « réactionnaire » et qu’elle n’a pas sa place dans une manifestation du mouvement social.
Sources :
(1) « Syndicats et partis politiques : enfin la vérité ! », communiqué de presse du SNALC-FGAF du 2 avril 2014
(2) « Une inadmissible violence », Le mot du président du SNALC, 23 février 2018
(3) « Aménagements d’Histoire-Géographie : une victoire du SNALC », 27 janvier 2014
(4) La quinzaine universitaire, numéro 1405, page 9, juin 2017
(5) « Foulard islamique : ”Profs, ne capitulons pas !” », appel paru dans Le Nouvel Observateur le 2 novembre 1989, publié sur le site du SNALC le 1er septembre 2015
(6) « Vers une laïcité de substitution ? », 20 septembre 2015
(7) La quinzaine universitaire, numéro 1388, page 8, janvier 2016
(8) La quinzaine universitaire, numéro 1405, page 5, juin 2017
(9) « Vers une laïcité de substitution ? », 20 septembre 2015
(10) « Laïcité : Deuxième lettre ouverte au Président de la République », août 2015
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