À Montpellier, Attac et CGT ont retrouvé l’argent magique de l’Hôpital
Le troisième “mardi de la colère”, sur le giratoire de Lapeyronie, a instruit le procès de la privatisation des services du soin. Transformera-t-on l’essai pour la journée nationale de grève et d’action mardi 16 juin ?
« Il n’y a pas d’argent magique » répondait Emmanuel Macron à des infirmières qui lui adressaient leurs récriminations lors d’une récente visite sur le terrain. Faux, « on a la volonté politique de le trouver et le répartir, ou pas » répondait l’oratrice d’ATTAC, pour le troisième “mardi de la colère” des agents hospitaliers sur le grand rond-point d’entrée de l’hôpital Lapeyronie ce 9 juin à midi. Sa démonstration insistait sur le cas de Sanofi, bien connu à Montpellier.
Sanofi, qui a versé quatre milliards de dividendes à ses actionnaires : la santé est un filon extrêmement rentable pour l’affairisme capitaliste. Sanofi à qui les pouvoirs publics ont accordé cent cinquante millions d’euros de nos impôts en Crédit Emploi Recherche. Sanofi qui a répondu à cette aide à l’emploi et à la recherche en réduisant de près de moitié le nombre de ses chercheurs (passé de six mille trois cent à trois mille huit cent). Sanofi qui obtient imperturbablement l’autorisation d’augmenter le prix de vente public de l’insuline, grevant le budget de la sécurité sociale, pour une molécule tombée dans le domaine public et ne nécessitant plus le moindre investissement.
Et pendant qu’on habille Sanofi, citadelle du business de la santé, on déshabille l’hôpital public, tel que l’a décrit, par une foule d’exemples, Rémy Ruiz responsable CGT du CHU, Centre hospitalier universitaire, de Montpellier. Car ce “mardi de la santé” voyait se constituer cet attelage peu habituel entre le syndicat CGT, et l’organisation d’experts militants altermondialistes ATTAC. Plutôt déterminée nationalement qu’effectivement vécue en local, cette alliance prolonge l’esprit convergent d’appels du genre “Plus jamais ça”, où l’on voit des associations, syndicats, ONG, individus, formations politiques, s’entendre dans la promotion d’« un monde d’après qui ne soit pas celui d’avant ».
Le syndicaliste a traité de « mascarade » le “Ségur de la santé”, cette grand messe orchestrée par le gouvernement, où trois cents participants devraient conjurer les astreintes techniques de la visio-conférence. Parmi eux une bonne moitié de médecins, un bon nombre d’administrateurs hospitaliers, toute une série de « propriétaires d’entreprises privées » du monde du soin ; toutes proportions qui marquent « notre spoliation de ne pouvoir décider de ce qui doit être fait des moyens financiers alloués à la santé, moyens qui ne sont rien d’autre qu’une collecte de fruits du travail de tous, mis au pot commun du système de soins ».
Dans le système en cours, « les soignants sont mis en concurrence les uns avec les autres » (cf. l’attribution des primes COVID à partir d’un barème au nombre de morts), « les services sont mis en concurrence les uns contre les autres », et « les hôpitaux de Nîmes contre celui de Montpellier, qui doit se battre avec celui de Toulouse ! », toutes évaluations « sur la base de tableaux Excel conçus à huit cents kilomètres, quand ça devrait être aux soignants, aux soignés, d’effectuer les bons choix, parce que ce sont ceux qui savent et qui pratiquent ».
Cent vingt personnes s’étaient réunies sur le grand giratoire d’entrée de l’hôpital Lapeyronie, pour écouter ces discours. Parmi eux : un tiers de blouses blanches, et au moins moitié d’usagers de fibre gilet jaune (toutefois sans la tenue). Le coup de collier sera énorme, pour qui voudrait faire du quatrième et dernier “mardi” du genre, le 16 juin, « une grande démonstration de force, journée nationale d’action » avec, cette fois, appel à la grève. En revanche, c’est par timidité sécuritaire, au risque d’une discrétion dommageable, que le rassemblement restera confiné dans le périmètre géographique hospitalier, excentré (rassemblement à 10h à Saint-Eloi, enchaînant ensuite sur Gui de Chauliac, puis La Colombière/Balmes, Lapeyronie, enfin pour conclure à midi à Arnaud De Villeneuve).
Dans l’attente, les manifestants de ce 9 juin, ont semé des graines dans la terre du giratoire d’un jour : « Ce sont les graines du vivant, les graines d’un nouveau monde hospitalier que nous souhaitons voir grandir. Nous avons préféré ce symbole à la lourdeur d’une première pierre ».
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