A Montpellier, la contestation contre le pass sanitaire monte en puissance

Jules Panetier Publié le 17 juillet 2021 à 21:23

Près de 5 000 personnes ont défilé ce samedi 17 juillet dans les rues de Montpellier. Une mobilisation qui étonne donc par son ampleur. Le Poing s’est glissé dans le cortège, petit récit.

Trois jours après la première journée du 14 juillet qui a rassemblé 2 000 manifestants, un nombre étonnant de personnes ont répondu à un appel émanant des réseaux sociaux ce samedi. Des milliers de personnes ont tourné dans les rues de l’Ecusson, pendant plusieurs heures, pour protester contre l’instauration d’un pass sanitaire et l’obligation pour certains professionnels de se vacciner.

Dès 14h une foule compacte et déterminée se masse sur la place de la Comédie. Des milliers de personnes ont répondu à cet appel à manifester. Ce qui donnera lieu à de nombreux tours du centre-ville, entre la gare Saint-Roch, le Peyrou et le boulevard Albert Ier.

Une chose frappe : malgré un certain nombre de têtes connues dans la galaxie gilets jaunes, et la présence de quelques militants politiques et sociaux, le gros de la manif’ semble constitué de personnes pas particulièrement habituées des manifs. Après tout, c’est une caractéristique de la période, aussi. Entre gilets jaunes, manifs succédant l’assassinat de George Floyd, mouvement des retraites, et maintenant mobilisation contre le pass sanitaire, on est en droit de se demander s’il restera encore un seul primo-manifestant sur le territoire français à la fin de la décennie 2020.

Sans incidents, la manif était un peu plus encadrée, puisqu’un peu plus prévue aussi, par les forces de l’ordre, avec quelques barrages de CRS non-casqués empêchant l’accès trop rapproché de la préfecture.

Cette pancarte dénonce le fait que la vaccination obligatoire concerne le personnel soignant, les pompiers ou bien encore les bénévoles d’association en contact avec du public… mais pas les forces de l’ordre.

Si les discours au mégaphone prononcés par les figures émergentes du mouvement –en manif en tout cas – se sont cette fois-ci concentrées sur des appels très éthérés à la défense de la liberté et des principes républicains, on n’oubliera pas pour autant les bribes de discours pour le moins farfelus entendus le 14 juillet : le vaccin serait un poison, Macron aurait fait semblant d’attraper le covid pour qu’on lui foute la paix à propos de sa propre vaccination… De fait, l’une des intervenantes appelle à s’inscrire sur un obscur canal Telegram, « La Rose Blanche », dont la ligne éditoriale, semble assez simple : il n’y a pas d’épidémie, les gouvernements tirent les ficelles pour instituer une tyrannie, et, conséquence logique de la première proposition, toute tentative d’instaurer des gestes barrières est une tentative de dressage. Un autre des tribuns de la lutte naissante est un médecin, anciennement engagé dans la lutte contre la loi sécurité globale à Montpellier, et connu lui aussi pour ses positionnements farfelus en matière de pseudo-épidémiologie.

De l’autre côté, il y a la foule. La foule qui applaudit les tribuns à l’évocation d’une nécessaire lutte pour la liberté. Et quand on la pénètre, qu’on y discute avec quelques personnes, qu’on y lit les pancartes brandies et ce qu’elles expriment, l’impression de loufoquerie s’estompe. Si un manifestant a tenté de convaincre l’auteur de ces lignes que l’on est capable de guérir toutes les maladies avec de l’eau de mer, la plupart tiennent un discours raisonnable. Contestable, mais raisonnable.

Défense des libertés individuelles, défiance envers des autorités publiques qui se sont illustrées depuis toujours par la bonne gestion de leurs propres intérêts seuls, et depuis le début de l’épidémie par une succession de politiques dirigistes et autoritaires, doublées de quelques bon gros mensonges d’Etat, révélés ET documentés par la presse indépendante. Inquiétude, aussi, face à une société de contrôle qui se met en place. Au final, quasi aucune pancarte ne porte de messages hostiles aux vaccins. Si les gens sur place le sont, ils ont tout à fait l’air d’en faire une affaire privée. L’affaire publique étant ici le respect du choix de chacun. Des slogans traditionnels de manifs sont repris, et prennent dans la foule. « Travaille, consomme, et ferme ta gueule » connais un certain succès, signe que le malaise dépasse largement la crise sanitaire. Le « Macron démission » des gilets jaunes est tombé dans le registre commun visiblement, et devient parfois « Macron en prison », sans que le nombre de voix participant au chœur ne baisse significativement.

Quelques références aux réformes des retraites et de l’assurance chômage peuvent être aperçus, mais restent marginales. C’est certainement là la plus grande limite qu’on trouvera à la comparaison parfois faite avec le mouvement social des gilets jaunes tel qu’il a pu démarrer à l’automne 2018 : l’absence de terreau social, apte à faire une quasi-unanimité parmi les couches populaires de la population.

L’ étoile de David, qui établit un parallèle entre juifs pendant l’occupation nazie et opposants au vaccin et qui sert de symbole à certains antivaxs, est quasi-absente dans la foule.

On attendra donc la prochaine mobilisation, prévue dès le 24 juillet, pour savoir si cette mobilisation contre le pass sanitaire va s’ancrer durablement dans le paysage.

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