Chronique ” Gaza Urgence Déplacé.e.s” | Gaza : Faim, mort, déplacement dans un silence mondial accablant
17 juillet 2025Le 17 Juillet le compte rendu des actions menées par les équipes de l’UJFP à Gaza raconte une situation humanitaire de survie dans une injustice systématique.
Dans un petit coin de ce vaste monde, sur une étroite bande côtière assiégée appelée Gaza, environ deux millions de personnes vivent sous le joug de la faim, sous le poids de la peur, au cœur d’une catastrophe humanitaire sans précédent dans l’histoire contemporaine. La bande de Gaza ne subit pas simplement un blocus : elle endure au quotidien les chapitres d’une injustice systématique, où les gens sont privés de leurs droits les plus élémentaires, où des vies sont fauchées alors qu’ils attendent patiemment un morceau de pain ou un sac de farine, pendant que le monde observe, et qu’une partie de ce monde participe par son silence et sa complicité.
La faim est devenue à Gaza une arme supplémentaire, qui consume les corps comme le font les bombes. Les images d’enfants émaciés, de mères dissimulant leur propre douleur pour ne pas transmettre leur détresse à leurs enfants, sont devenues des scènes quotidiennes banales. Il n’est plus question ici de confort ou de dignité, mais simplement de survie.
Chaque jour, des dizaines de personnes perdent la vie dans les lieux de distribution d’aide humanitaire établis par l’occupant et gérés par des entreprises américaines. Des personnes sont tuées en cherchant de la nourriture, écrasées par des camions, abattues par des snipers ou piétinées dans des bousculades. Ces victimes ne sont pas des “émeutiers affamés” comme certains voudraient le faire croire, mais bien des victimes d’une politique de famine délibérée, dans laquelle l’aide est utilisée comme une arme de contrôle, d’humiliation et de domination.
Et tandis que les chaînes d’information diffusent les images de camions d’aide entrant à Gaza, que les réseaux sociaux relaient, ces camions traversent parfois nos rues dévastées sous les yeux des affamés. Mais nul ne sait où vont ces aides, ni quand elles seront distribuées, ni qui en bénéficiera. La seule vérité tangible : les marchés saignent toujours sous des prix exorbitants, la nourriture reste inaccessible, et la faim continue d’assiéger les foyers et de menacer les familles chaque jour.
Au cœur de cette tragédie, les équipes de l’UJFP poursuivent sans relâche leur mission humanitaire, malgré les immenses difficultés et les dangers environnants. Nos équipes sont toujours présentes sur le terrain, aux côtés des habitants, cuisinant et préparant des repas chauds pour les familles qui n’ont plus les moyens de cuire ou d’acheter de la nourriture.
Dans la région de Muwasi Khan Younès, où certaines familles ont pu se réfugier après avoir été déplacées de force, nos équipes participent chaque jour à la distribution de repas chauds dans le camp d’Al-Fajr principalement, ainsi que dans d’autres camps comme Al-Sumoud et Al-Baraka à certaines occasions. Ces camps dépendent presque entièrement de cette aide quotidienne. Il n’existe que très peu de cuisines dans cette zone, surtout depuis que les centres de World Central Kitchen ont cessé leurs activités en raison du blocus et de la fermeture des points de passage. Sans ces repas, des milliers d’estomacs seraient restés vides, et les corps des enfants encore plus affaiblis qu’ils ne le sont déjà.
Sur le plan éducatif, les centres éducatifs de l’UJFP continuent de fonctionner avec discipline et détermination, conscients que la bataille de la conscience et de l’éducation est tout aussi cruciale que celle de la faim. Dans le camp d’Al-Fajr à Muwasi Khan Younès, notre centre éducatif reste ouvert aux enfants de familles déplacées et d’agriculteurs, coupés de toute scolarisation depuis le début de la guerre à cause des bombardements et du déracinement. Pour ces enfants, le centre représente leur unique fenêtre vers le savoir et vers la vie.
Un peu plus au nord, dans la région de Nuseirat Ouest, notre deuxième centre éducatif continue de servir des centaines d’élèves, indifférent aux bombardements, aux dangers ou à l’abandon du monde. Dans l’obscurité qui recouvre les lieux, ces petits centres éducatifs allument les bougies du savoir, préservent l’espoir de générations entières, pour que l’ignorance ne vienne pas s’ajouter à la tragédie quotidienne.
Ce qui se passe aujourd’hui à Gaza n’est pas une simple catastrophe naturelle ou une crise passagère, mais une injustice historique cumulative, une punition collective flagrante, où les méthodes les plus ignobles de mise à mort lente sont pratiquées sous un silence international honteux, une défaillance arabe douloureuse et une complicité institutionnelle qui se réclame hypocritement de la neutralité et de l’humanisme.
Malgré cela, nous sommes là. Nous ne possédons pas d’armes, mais nous avons des casseroles pour nourrir, des livres pour éveiller les consciences, et des couleurs pour dessiner l’espoir. Nos équipes travaillent depuis sous les décombres, malgré l’insécurité, l’abandon des grandes institutions, et la trahison de la conscience humaine.
À Gaza, le temps ne se mesure pas en heures, mais au nombre de repas que nous pouvons livrer, au nombre de vies que nous pouvons sauver de la faim, au nombre de leçons que nous pouvons donner aux enfants avant qu’un nouveau bombardement ne retentisse. Nous sommes là, et nous continuerons, car nous croyons que la compassion est un acte de résistance, que cuisiner pour les déplacés est une forme de justice, et qu’ouvrir une salle de classe pour les enfants est une déclaration que la vie est plus forte que l’oppression.
En fin de compte, Gaza ne réclame pas de pitié, mais de la justice. Elle n’a pas besoin de promesses creuses, mais que le bourreau cesse de la faire mourir de faim, de l’assassiner, de l’expulser. En attendant que cela arrive, il nous appartient de rester la voix de ceux qui n’en ont pas, la main de ceux qui n’ont plus de soutien, et le battement de cœur de ceux dont le cœur menace de s’arrêter sous le froid, la peur et la faim. Nous continuerons d’écrire, de cuisiner, d’enseigner… jusqu’à ce que la lumière revienne dans les yeux de Gaza.
Lien vers les photos et vidéos
travail humanitaire
https://drive.google.com/drive/folders/12ZpK9sno52hSskhQZVwNZU4KTMXvL_9i
Programmes éducatifs
https://drive.google.com/drive/folders/1fM7qu4S08mgt50oFuI3yi7lnvuOH8Z1p
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