Au CAO de Montpellier, les migrants dorment dans des « chambres » de 4 à 6 m²

Le Poing Publié le 23 novembre 2017 à 14:40 (mis à jour le 25 août 2021 à 12:39)

Dans la perspective du démantèlement de la « jungle » de Calais, le gouvernement a décidé de créer en octobre 2015 une structure d’hébergement temporaire : le centre d’accueil et d’orientation (CAO). À la différence des centres de rétention administrative, le CAO n’est pas un lieu de privation de liberté et se veut un lieu d’accompagnement des réfugiés. Le Poing vous fait la visite.

Un conteneur, trois « chambres »

On compte plus de 164 centres d’accueil et d’orientation en France, tous gérés par des associations conventionnées par l’État. Le CAO de Montpellier,  ouvert à l’automne 2016(1) dans le quartier Millénaire, héberge 120 migrants, tous des hommes adultes. Bienvenue dans un parking clôturé avec des conteneurs divisés en trois « chambres » de 4 à 6m² comportant chacune un lit, un micro-onde et un frigo. Il existe un conteneur pour les douches, et un autre pour les toilettes. À la demande des réfugiés, un évier a été placé à l’extérieur pour qu’ils ne soient plus obligés de faire la vaisselle dans la salle de bain ou à côté de la cuvette. Il y a aussi une pièce pour les travailleurs sociaux et un espace de « convivialité » avec un accès wi-fi. Des agents de sécurité surveillent l’entrée du CAO 24h/24. Après 21h, les visiteurs ne sont plus autorisés mais les réfugiés peuvent continuer d’aller et venir après vérification de leur identité.
L’éte dernier, deux occupants se sont ouverts le pied après que les portes métalliques se soient refermées sur eux. Ils ont été emmenés aux urgences par des membres d’associations extérieures au CAO car les salariés présents étaient trop peu nombreux pour quitter le centre.

Un réfugié est censé rester trois mois maximum au CAO, mais ça fait trop peu pour trouver un autre logement, faire sa demande d’asile et enclencher le versement des aides, alors ils y restent plutôt cinq mois. Ils sont ensuite redirigés vers des foyers ou des Prahda (programme d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile).

 Les réfugiés habitent en Prahda

Le Prahda est un «  dispositif d’hébergement d’urgence  » sous-traité par l’État à la société Adoma. On en compte 62 en France, la plupart dans des anciens hôtels Formule 1 réaménagés, à l’écart des centres-villes, le long des nationales. Alors forcément, pour faire ses courses et se faire des amis, c’est pas l’idéal. De nombreux gérants de Prahda interdisent l’installation des plaques de cuisson dans les chambres et mettent seulement à disposition deux plaques, installées dans les zones communes, et disponibles seulement quelques heures par jour et sur inscription(2). Avec le peu de présence associative sur place, les occupants n’ont plus rien à faire que se morfondre. Et l’ennui est mortel.

De nombreux collectifs dénoncent les Prahda comme des facteurs aggravant de l’isolation territoriale et sociale des migrants et y voient une plateforme de pré-expulsion, où on place les personnes en fin de procédure Dublin(3). Il n’est en effet pas rare que des migrants soient assignés à résidence directement dans les Prahda, ce qui rend leur expulsion plus facile. Le plus proche de Montpellier se trouve dans le Formule 1 situé à quelques dizaines de mètres de la prison de Villeneuve-lès-Maguelone. Des dizaines de migrants y vivent, dont des femmes et des enfants, pour seulement deux travailleurs sociaux.

300€ par mois pour 7m²

La société Adoma gère aussi un foyer plus proche du centre-ville, où se retrouvent certains anciens du CAO qui ont obtenu un titre de séjour. Ici, on franchit un cap dans la qualité de l’accueil : des « chambres » de 4 à 6 m² du CAO, on passe à des « espaces individuels » de 7m². Le luxe a un prix : 300 € par mois, à la charge des réfugiés, mais éligibles aux APL. De quoi se plaint-on ?

Notes et sources :

(1) C’est le second CAO de Montpellier, le premier a fermé en 2015.
(2) « Les Pradha : isoler, invisibiliser, expulser », Paris-luttes.info, 30 août 2017, lien.
(3) Si un migrant est sous procédure Dublin, cela signifie qu’il est en attente d’expulsion vers le premier pays qui a enregistré sa demande d’asile

Exemple d’une “chambre” au CAO de Montpellier

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266 pages d'archives sur les luttes contre la loi travail du printemps 2016 à Montpellier