Chaude journée à Montpellier contre la loi sécurité globale

Le Poing Publié le 28 novembre 2020 à 18:44 (mis à jour le 28 novembre 2020 à 22:28)

Environ 6000 personnes ont battu le pavé aujourd’hui à Montpellier pour protester contre la loi sécurité globale. Un cortège deux à trois fois plus massif que la semaine dernière, une manif’ sauvage pleine de pèche et une police étrangement calme, malgré deux arrestations. Le Poing débriefe pour vous cette intense journée qui donne espoir pour la suite de la mobilisation.

À 11 heures, devant le parvis de la mairie, l’ambiance s’anime. Le lieu de départ de la manifestation n’a pas été choisi au hasard ; au-delà de l’aspect liberticide de la loi sécurité globale, il s’agissait également de rappeler au maire PS Michaël Delafosse ses engagements, lui même obsédé par des velléités sécuritaires. Mais la véritable bataille est ailleurs. Un slogan, adressé à la police et vu dans la rue aujourd’hui, vaut mieux que mille explications : « On peut pas vous voir en peinture mais on veut vous voir en photo ». Le ton est donné, la foule se met en marche.

Un premier tour tranquille mais déterminé

Les rangs grossissent au fur et à mesure qu’on se rapproche du centre-ville. On s’observe, on se compte, on se retrouve avec plaisir après parfois des mois sans s’être croisés, et rapidement, la joie de manifester à nouveau emplit les esprits et se communique sur la chaussée. Avec presque 6 000 personnes dans la rue, le confinement paraît être un lointain souvenir, avec comme un goût du « monde d’avant » dans la bouche. Et pour cause : on n’avait pas vu autant de monde manifester à Montpellier depuis le mouvement Black Lives Matter, ou peut-être même depuis la dernière grosse émeute gilet-jaunesque.

Arrivé à la préfecture, le cortège s’arrête pour quelques prises de paroles qu’on écoutera à peine, complètement galvanisé par l’ambiance. Au niveau du parc du Peyrou, le collectif « Danger Loi Sécurité Globale », emmené, par l’avocate de la Ligue des Droits de l’Homme Sophie Mazas, s’arrête pour discuter des suites de la mobilisation. Pendant ce temps, un gros groupe, peut-être la moitié du cortège, part déjà en manif’ sauvage du côté du jeu de Paume. Pas le temps d’attendre, la liesse populaire continue.

Flottement devant le commissariat

Devant la gare, on marque un bref arrêt, surpris de l’absence de dispositif policier. Mais derrière les vitres du hall du bâtiment, des uniformes en armes toisent le cortège, et les manifestants s’étonnent de leur calme. Ni une ni deux, le cortège repart déter’ comme jamais en direction du commissariat central au niveau de Voltaire. Là, la scène devient surréaliste. Plusieurs centaines de personnes envahissent le parvis désert de l’institution (normalement bien gardée à l’accoutumée) en criant « tout le monde déteste la police ». Quelques minutes plus tard, des camions de gendarmeries arrivent en bas de la rue, et des officiers sortent.

Photo de Staein

Face à eux, quelques personnes disposent des poubelles en travers de la route, et certaines prennent même feu. S’ensuit un long moment de flottement, où l’on se demande qui va foncer le premier. Mais du côté de la police, les consignes semblent être claires : pas question de se retrouver avec plus d’images de violences policières sur le dos dans un climat déjà bouillant, marqué par l’évacuation du camp de migrants place de la République à Paris et du tabassage de Michel, producteur de musique. Exit la répression violente. Pas de gaz, pas de charges, pas de LBD. On en serait presque étonné vu l’ardeur du cortège, qui finit par faire demi tour pour rejoindre le centre-ville.

Deux interpellations en fin de manif’

Après un second passage devant la préfecture face à une police toujours aussi calme, beaucoup de gens commencent à se disperser. Néanmoins, les plus motivés décident de descendre sur la Comédie, où ils sont accueillis par plusieurs escadrons de gendarmes mobiles. Une poubelle s’embrase, ça s’agite sur la place, mais encore une fois, ni gaz lacrymogène, ni charge. Deux interpellations ciblées sont cependant à déplorer. Quelques personnes restent plantées devant les flics en dansant, et eux restent immobiles, ça sent la fin, mais la scène est cocasse et on aurait presque envie de rester. Mais la BAC qui se déploie sur la place nous en fait rapidement passer l’envie, dispersion. Bien qu’on n’aura pas fait la révolution, on rentrera de cette manif’ avec un sourire, même dissimulé sous un masque.

La colère semble se propager au sein de la population, et la mobilisation contre la loi sécurité globale prend de l’ampleur à Montpellier comme partout en France. Signe que malgré la pandémie, les rues sont encore prenables ! Le collectif « Danger Loi Sécurité Globale Montpellier », composé d’une soixantaine d’associations et d’organisations, ne compte pas en rester là. De nouvelles manifestations sont prévues et seront annoncées sur la page facebook du collectif.

Comme dirait Roland Veuillet, syndicaliste et gilet jaune récemment sorti de prison, lui même victime des politiques répressives de l’État : « Révolution ou barbarie, tout reste possible ». À nous de faire les bons choix.

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