« Dégage – toi de l’ OMBRE » – Entretien avec J M R Cazic
Un récit, témoignage d’une vie d’engagement en terres occitanes : entre une forme fictionnelle et autobiographique, rendre compte du concert de la vie entre intimité et aventure collective
Un balèti (bal-concert) est organisé pour alimenter une caisse de solidarité avec des militants poursuivis en justice. Des gens occupent des places puis un cinéma désaffecté, subissent des tracasseries policières. Un ample mouvement de protestation agite la rue et les ronds-points, entraînant une répression policière et judiciaire. A cela s’ajoute l’expansion opportune d’un virus qui disperse et isole, permet des mesures de soumission et de contrôle. Le narrateur suit son personnage d’âge mûr, qu’il tutoie, un peu décalé dans ce contexte. Mais un passé d’engagements se rappelle à son souvenir… »
Le Poing a rencontré J M R Cazic pour lui poser quelques questions sur son livre, « Dégage -toi de l’ OMBRE ».
Peux-tu nous dire quelle nécessité est à l’origine de l’écriture de ce qui est ton premier livre ?
J’ai repris mon engagement militant en 2015 au moment de la promulgation de l’état d’urgence dans le pays après les attentats, et le mouvement des Gilets Jaunes ensuite a révélé, puis précipité mon écriture. Professionnellement je changeais de statut et je me retrouvais à partager la vie militante avec une nouvelle génération. Je me suis questionné sur ce qui peut motiver un engagement militant radical, sachant que moi j’étais dans les contradictions de fonctionnement de la petite bourgeoisie culturelle ce qui expliquera dans mon récit les moments de décalage dans lesquelles se trouve le personnage principal.
Comment est venue l’écriture et quelle forme a t elle prise ?
C’est une écriture de remémoration, je me suis souvenu des moments, des détails, des évènements et c’est ça qui a déclenché l’écriture, je n’ai pas pioché dans des écrits préalables sur ces situations de vie. La forme de l’écriture, elle, est fictionnelle et historique, ce qui lui permet l’ouverture de nombreuses pistes, sujets à traiter : je voulais m’éloigner d’un récit autobiographique, et en même temps on est en plein dedans ! Cela donne une forme de dédoublement du personnage avec une part d’invention, mais c’est bien avec le mensonge que l’on fait la vérité !
Justement tu parles de nombreuses pistes, pourquoi avoir d’une certaine façon voulu tout dire, t’aventurer sur tous les terrains ?
Il s’agit bien d’accumulation de savoirs, d’une tension entre une histoire ancestrale, géographique et sociale à laquelle s’ajoute une culture littéraire de par ma formation. Du coup on retrouve une écriture d’autofiction qui traverse tous les fléaux comme le sida par exemple, avec l’intime au centre du politique. En fait on n’invente rien dans une vie, ce sont les mécanismes littéraires et psychiques qui recollent tous les morceaux dans l’enchaînement des souvenirs, les collages les superpositions, même s’il reste un aspect chronologique. Je tenais surtout dans mon récit à éviter les condamnations trop faciles des erreurs et des faiblesses humaines, je ne voulais absolument pas les attaquer; j’ai fait un travail psychique pendant l’écriture me permettant d’être dans une posture qui éviterait de juger les humains ! En revanche je dénonce le pouvoir et les instruments de la domination.
On retiendra de la lecture de ce roman l’écume des mots, leur mise au travail qui a d’ailleurs été l’objet du débat quand le livre a été présenté au Barricade début avril. Quelle peut être la forme de l’écriture des témoignages ? Cela pourrait être l’aventure collective d’ateliers d’écriture à venir par exemple.
Le livre est déposé en librairie, sur Montpellier et dans la région.
« Dégage toi de L’Ombre » JMR CAZIC aux éditions Il est midi , prix de vente : 20 euros
Nos articles sont gratuits car nous pensons que la presse indépendante doit être accessible à toutes et tous. Pourtant, produire une information engagée et de qualité nécessite du temps et de l’argent, surtout quand on refuse d’être aux ordres de Bolloré et de ses amis… Pourvu que ça dure ! Ça tombe bien, ça ne tient qu’à vous :