Le Pink bloc a relevé le défi de la Marche des fiertés à Montpellier

Jules Panetier Publié le 26 juin 2022 à 11:32 (mis à jour le 26 juin 2022 à 11:43)

Plusieurs centaines de manifestant·es ont clamé leurs slogans clairement politiques, en se détachant, bien visibles à l’avant de la marche officielle, dont le premier rang est toujours laissé à Michaël Delafosse et même une élue suspectée d’accointances avec La Manif pour tous.

Théoriquement, le petit effectif de police nationale dépêché sur la Marche des Fiertés serait Gay Friendly, tant cet évènement a cherché à standardiser une image des gays homologués dans la société dominante. Comme à l’accoutumée, les organisateurs montpelliérains commettent la grave erreur politique de placer un rang d’élus en tête du cortège qui, cette année encore, a réuni environ douze mille personnes au départ du Peyrou, ce samedi 25 juin dans l’après-midi.

Ceints de leurs écharpes tricolores, on trouve là Michaël Delafosse en tête, le sénateur PS Hussein Bourghi, mais aussi une nouveauté : Laurence Cristol, juste élue députée LREM pour la 3e circonscription de l’Hérault, face à la NUPES. Un pur exemple de tripatouillage puisque cette maire de la très bourgeoise et très droitière Saint-Clément-la-Rivière était membre de LR voici très peu. C’en est au point que même des militants macroniens se sont insurgés contre sa désignation, non sans rappeler qu’elle aurait souscrit à la charte de la Manif pour Tous, le mouvement ultra-réac qui a mené le combat contre le mariage gay.

Laurence Cristol jure n’avoir rien fait de plus qu’accepter l’invitation à un débat. Mais une photo prise ce soir-là la montre nullement gênée de figurer debout au côté d’un responsable de la Manif pour tous en train d’égrener sur un paper board les points de sa charte homophobe. Mais l’erreur politique n’est pas à chercher entre LR et PS. L’erreur politique des organisateurs montpelliérains de la Marche des Fiertés consiste à ne pas encourager l’autonomie d’un mouvement de défense et de lutte mais de désarmer une supposée communauté gay en la rangeant sous la supposée protection des détenteurs du pouvoir, trop contents de la récupérer à peu de frais. Alors autour de ses chars musicaux, à fond la techno, cette marche est surtout une fête de la musique bis, pleine d’un tonus juvénile qui file la pêche, sans aucun doute, mais juste teintée d’affirmation identitaire, largement vidée d’acuité politique.

En comparaison, le Pink Bloc de tête se distingue par une profusion de pancartes et banderoles, réellement fabriquées par qui les brandit. Ça n’est pas qu’un détail. Ça signifie un engagement, perso et collectif, de l’intime et du politique. Les deux calicots les plus visibles, tout à l’avant, disaient “Queer précaires – Queer véners”, et l’autre “Montpellier t’aime un jour par an”. Réponse cinglante au mot d’ordre municipal officiel, asséné avec tous les moyens de la puissance publique, qui prétend que “Montpellier t’aime”, et basta. Oui mais le pouvoir de Delafosse ne représente surtout pas la Montpellier des dizaines de milliers de précaires en galère. Et quand on est jeune, en transition de genre, ou handi, racialisé.e, travailleur.ses du sexe, harcelé.e, désignée aux violences sexistes, c’est double et triple peine, et ça ne fait pas du gay standard.

Voilà comment les supposés policiers gay friendly, ont dû être désarçonnés d’entendre de puissants “An, anti, anti-capitalistes”, et “Tout le monde déteste la police” et “Darmanin démission” criés par des centaines de jeunes devant la Préf ; jeune créateurs des codes corporels et vestimentaires qui déjouent l’ordre établi des sexualités, aussi bien que du gay à paillettes, que continue dépeindre obstinément la presse mainstream, dont on se demande si elle envoie vraiment des journalistes sur place. Entre autre, le site France 3 Occitanie se fait loufoque, en montrant très clairement ces premiers rangs sous la bannière “Montpellier t’aime une fois par an” mais noyé dans l’habituel commentaire lénifiant sur les valeurs lisses de la tolérance, et basta.

Appelant aussi, et entre autres, à la solidarité avec tous les sans papiers, rappelant le propre monde gay à l’importance de ses propres minorités (les handis méprisés sur le marché des séductions body-buildées), rejetant la main-mise médicale sur les parcours de transition, ou la mutilation des nouveaux-nés intersexe, les revendications du monde queer, non binaire, ont appuyé là où fait toujours mal la question du précaire et du minoritaire.

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