L’Etat policier n’est pas un slogan, c’est une réalité

Le Poing Publié le 20 décembre 2020 à 18:46
Mobilisation de policiers devant le commissariat central de Montpellier, le 16 décembre 2020

Dans un contexte sécuritaire marqué par des violences policières agitant jusqu’aux députés macronistes et mobilisant même les sportifs de haut niveau, le pouvoir a choisi son camp : la défense aveugle des intérêts des forces de l’ordre. Jusqu’à l’absurde.

Il y a moins d’un mois, les images insoutenables du tabassage de Michel Zecler à Paris secouaient la France entière. Jusqu’au Président de la République qui se disait choqué, et annonçait dans une interview quelques timides mesures visant à calmer la colère montante contre les violences policières. Pas de chance pour l’exécutif, qui espérait faire passer sa loi « sécurité globale » par la méthode actuelle : vite, sans débat, et en profitant d’un contexte de menace terroriste islamiste.

Mais que le Président ose prononcer les mots de « violences policières », c’était déjà trop pour la police ! Celle-ci vit de plus en plus dans un monde parallèle, inversant la charge accusatoire, se présentant en victime éternelle d’une société qui ne la remercierait pas assez, n’en ferait jamais assez… Malgré les faits démentant chaque jour ce discours, il reste une vérité politique indépassable : la police protège le pouvoir. Le pouvoir a donc besoin de sa police. Qu’importe que celle-ci entretienne un rapport hystérique à la réalité. On aura donc eu droit ce mois-ci à une nouvelle campagne d’agitation proflic, partie des syndicats d’extrême-droite, reprise par l’exécutif, et déclinée dans les médias.

Premier acte : les manifestants sont des criminels. Qu’importe les centaines de blessés, les dizaines de mutilés. Qu’importe également les centaines d’arrestations préventives de « casseurs », d’individus « ultra-violents » (dixit le ministre de l’intérieur), pour la plupart relâchés sans charges suite à la manifestation parisienne du 12 décembre, car innocents. Le message aura tourné en boucle, affirmant que des policiers avaient été violemment agressés, ce qui était inacceptable.

Second acte : branle-bas de combat des syndicats de la profession, Alliance en tête. Avec des manifestations illégales, durant les heures de travail, en armes, aux domiciles d’élus (comme à Rennes), dérangeant des quartiers entiers en défilant sirènes hurlantes, menaçant le pouvoir d’un coup de force – car de quoi s’agit-il quand la police elle-même s’affranchit du cadre légal ? La palme de l’abject se trouve peut être à Tours, où les policiers ont protesté, dos tourné au palais de justice (tout un symbole), contre la condamnation (à du sursis !) d’un de leurs collègues. Celui-ci prétendait avoir réanimé un jeune homme, pour maquiller ses coups…

Troisième acte : le pouvoir licencie les factieux. Non, on rigole, il cède, bien sûr, comme toujours. Il cède sur tout. Gérald Darmanin joue son rôle, en éructant sur les plateaux télé et en s’accroupissant servilement devant les demandes policières. Vous voulez une structure administrative pour mettre la pression sur la justice en votre faveur ? Bien sûr ! Des transports publics gratuits, une mutuelle subventionnée par le contribuable ? Immédiatement ! Et en prime, le ministre de l’intérieur réaffirme la défense du fameux « article 24 », restreignant la diffusion d’image de policiers, qui avait suscité la mobilisation la plus large de la population. Tout pour la police.

Ainsi, sous prétexte de « consolider les liens de confiance avec les Français », un « Beauvau de la sécurité » sera organisé pour confirmer l’impunité policière. Creusant davantage encore le fossé séparant cette caste du reste de la population. Car comment interpréter les innombrables cadeaux et privilèges dont bénéficient des forces de l’ordre en roue libre, là où le reste de la société subit une dégradation affolante des conditions d’existence ? Il ne sera plus possible de s’étonner que selon un récent sondage OpinionWay, 47% des 18-30 ans disent ne plus avoir confiance en la police (79% constante l’évidence, à savoir que les violences policières sont une réalité). La fuite en avant ne peut mener qu’à une situation explosive. Soyons prêts !

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