Montpellier. Karnaval nassé, Karnaval surveillé, mais Karnaval fêté !
Le Poing
Publié le 7 mars 2019 à 17:56
Ça fait des années que ça dure, et c’est devenu la lubie du préfet de l’Hérault et du maire de Montpellier : « le Karnaval des Gueux n’aura pas lieu ». Et il a mis le paquet cette année ce bon Philou : petit courrier envoyé au ministre de l’intérieur en personne – Castaner de son nom –, et hop, on se retrouve avec presque autant de flics que de karnavaliers ! Dès 17h30, je glande sur les pelouses du Peyrou tel un gueux sans karnaval, et six camions de CRS me font de l’ombre. Le ton est donné… Avec les copains, on blague sur un reportage pourri de « 90 minutes enquête » où l’on aperçoit Daniel de la BAC en train de pourchasser des karnavaliers… Ça nous ferait bien rire de le voir ce soir !
Un peu avant 19h, les camions de condés s’arrachent du Peyrou et les fêtards affluent devant les grilles du parc, bientôt rejoints par des musiciens. La soirée peut commencer. Au milieu de cette foule bariolée, qui sent l’herbe et l’éthanol, je discute avec un habitué du Karnaval, plutôt satisfait : « Bah ce n’est pas mal, on est beaucoup ! ». En effet, on est à peu près cinq cents ! « C’est bien que cette tradition perdure, l’an dernier les flics nous avaient empêchés de faire la fête très tôt, j’ai peur que ça soit pareil cette année, mais au moins on est là. Il faut que le Karnaval perdure. Au-delà de toutes convictions politiques, c’est une belle tradition populaire quand même ! »
Et qui dit tradition karnavalesque dit chars et effigies à brûler. Je me retourne et tombe nez à nez avec le visage de papier de l’ancien doyen de la fac de droit Philippe Pétel, rongé par les flammes. Ça lui apprendra à laisser une milice fasciste s’introduire dans la fac pour frapper du gauchiste. Peu après, un Macron fait de bric et de broc prend feu vers Albert Ier.
Les gens rient, chantent et dansent pendant que les CRS, présents à toutes les intersections, nous toisent et nous empêchent d’accéder à l’Écusson. Malgré l’armada, l’ambiance reste à la joie et à la débauche, et je ne sais plus si je suis en manif’ ou dans une free party en milieu urbain. Des « Siamo tutti antifascisti » et autres slogans anti-flics fusent dans tous les sens et donnent un ton revendicatif et militant à ce drôle de charivari. Le débordement reste cependant bien cadré : les condés sont partout et nous mènent à la baguette. Un pote coincé dans le turfu se met à gueuler « ACAD ! » pour « All Cops Are Daniel ! », et nous rions sur la gueule de ce triste sire. Les gueux déambulent vers Antigone à la lueur du fumigène rouge et très vite, des distributeurs de banque et des vitrines d’assurances explosent.
À partir de ce coup d’éclat, la légendaire désorganisation du karnaval se heurte aux assauts policiers. Les baceux font leur footing en rang d’oignons dans notre direction, et la populace éméchée se met à courir dans tous les sens. Dans la confusion générale, je me retrouve à courir à côté d’un gilet jaune perdu sans ses collègues, d’un pirate et d’Alexandre Benalla. La panique et l’ivresse nous emmènent dans un quartier bourgeois, et nous voilà coincés par les casqués. « Ils sont pas beaux vos déguisements ! » hurle un karnavalier à des condés. Très vite, la fumée des lacrymos vient remplacer celle du pétard et je crache pendant que des gens escaladent le portail d’une résidence pour se cacher. Oh magie, quelques minutes plus tard, aucun policier à l’horizon : nous ne sommes plus que quelques groupes errants à la recherche de nos frères karnavaliers. Une partie d’entre eux débarque de nulle part en courant et en gueulant : « Ils sont derrière ! » La folle course-poursuite s’engage, et on apprend que les policiers sont en train de nasser une centaine de camarades sur la place Carnot.
Déçus que les policiers soient parvenus à gâcher la fête si tôt, je décide de rentrer m’achever chez moi. J’apprendrais plus tard que les nassés se sont fait libérer au compte-goutte, après s’être fait fouiller. Mais qu’on se le dise haut et fort : jamais répression ne tuera Karnaval, et s’il le faut, nous apprendrons à danser sous les balles !
Un peu avant 19h, les camions de condés s’arrachent du Peyrou et les fêtards affluent devant les grilles du parc, bientôt rejoints par des musiciens. La soirée peut commencer. Au milieu de cette foule bariolée, qui sent l’herbe et l’éthanol, je discute avec un habitué du Karnaval, plutôt satisfait : « Bah ce n’est pas mal, on est beaucoup ! ». En effet, on est à peu près cinq cents ! « C’est bien que cette tradition perdure, l’an dernier les flics nous avaient empêchés de faire la fête très tôt, j’ai peur que ça soit pareil cette année, mais au moins on est là. Il faut que le Karnaval perdure. Au-delà de toutes convictions politiques, c’est une belle tradition populaire quand même ! »
Et qui dit tradition karnavalesque dit chars et effigies à brûler. Je me retourne et tombe nez à nez avec le visage de papier de l’ancien doyen de la fac de droit Philippe Pétel, rongé par les flammes. Ça lui apprendra à laisser une milice fasciste s’introduire dans la fac pour frapper du gauchiste. Peu après, un Macron fait de bric et de broc prend feu vers Albert Ier.
Les gens rient, chantent et dansent pendant que les CRS, présents à toutes les intersections, nous toisent et nous empêchent d’accéder à l’Écusson. Malgré l’armada, l’ambiance reste à la joie et à la débauche, et je ne sais plus si je suis en manif’ ou dans une free party en milieu urbain. Des « Siamo tutti antifascisti » et autres slogans anti-flics fusent dans tous les sens et donnent un ton revendicatif et militant à ce drôle de charivari. Le débordement reste cependant bien cadré : les condés sont partout et nous mènent à la baguette. Un pote coincé dans le turfu se met à gueuler « ACAD ! » pour « All Cops Are Daniel ! », et nous rions sur la gueule de ce triste sire. Les gueux déambulent vers Antigone à la lueur du fumigène rouge et très vite, des distributeurs de banque et des vitrines d’assurances explosent.
À partir de ce coup d’éclat, la légendaire désorganisation du karnaval se heurte aux assauts policiers. Les baceux font leur footing en rang d’oignons dans notre direction, et la populace éméchée se met à courir dans tous les sens. Dans la confusion générale, je me retrouve à courir à côté d’un gilet jaune perdu sans ses collègues, d’un pirate et d’Alexandre Benalla. La panique et l’ivresse nous emmènent dans un quartier bourgeois, et nous voilà coincés par les casqués. « Ils sont pas beaux vos déguisements ! » hurle un karnavalier à des condés. Très vite, la fumée des lacrymos vient remplacer celle du pétard et je crache pendant que des gens escaladent le portail d’une résidence pour se cacher. Oh magie, quelques minutes plus tard, aucun policier à l’horizon : nous ne sommes plus que quelques groupes errants à la recherche de nos frères karnavaliers. Une partie d’entre eux débarque de nulle part en courant et en gueulant : « Ils sont derrière ! » La folle course-poursuite s’engage, et on apprend que les policiers sont en train de nasser une centaine de camarades sur la place Carnot.
Déçus que les policiers soient parvenus à gâcher la fête si tôt, je décide de rentrer m’achever chez moi. J’apprendrais plus tard que les nassés se sont fait libérer au compte-goutte, après s’être fait fouiller. Mais qu’on se le dise haut et fort : jamais répression ne tuera Karnaval, et s’il le faut, nous apprendrons à danser sous les balles !
Crédits photos : Nathanaël Dahan
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