Montpellier : le bras de fer continue entre le préfet et les soutiens à la Palestine

Elian Barascud Publié le 8 septembre 2024 à 09:59 (mis à jour le 8 septembre 2024 à 10:11)
Les soutiens à la Palestine ont manifesté aux côtés des organisations de gauche qui demandaient la destitution de Macron ce samedi 7 septembre.. (Photo de Mathieu Le Coz/ Hans Lucas)

Ce samedi 7 septembre marquait le troisième samedi consécutif d’interdiction de manifestation en soutien au peuple palestinien à Montpellier. Jeudi 5 septembre, les organisateurs des manifestations étaient reçus en préfecture pour dialoguer avec les autorités, qui accusent BDS et la Libre Pensée d’avoir tenu “des propos diffamatoires envers la communauté juive”, sans préciser lesquels

Nouvel épisode dans le feuilleton des arrêtés préfectoraux à l’encontre des manifestations de soutien à la Palestine dans le Clapas, interdites coup sur coup depuis maintenant trois samedis, après l’attaque de la Synagogue de la Grande-Motte le 27 août dernier.

Lors de leur conférence de presse du 3 septembre devant la préfecture pour dénoncer la décision du tribunal administratif de rejeter leur recours contre ces interdictions de manifester, BDS et la Libre Pensée, associations motrices dans la lutte de soutien au peuple palestinien à Montpellier, avaient annoncé former un recours auprès du Conseil d’État pour faire annuler cette décision.

Deux jours plus tard, le 5 septembre, les voilà invités par le directeur de cabinet du préfet pour discuter d’une nouvelle manifestation, déposée pour le samedi 7 septembre. La préfecture se montrerait-elle ouverte au dialogue ? A la suite de cette réunion, La Libre Pensée, BDS et la Ligue des Droits de l’Homme, présents à ce rendez-vous, reçoivent un courrier du préfet, posant des conditions quant à la manifestation prévue le samedi : “que ces manifestations se déroulent sans la moindre insulte, injure publique, ou provocation à l’endroit de quiconque […]” , “que vous vous engagiez à l’absence de propos attentatoires à la communauté de nos concitoyens juifs, à l’absence de propos d’apologie d’un acte de terrorisme” ; “que soit respecté le le caractère statique de ces manifestations, comme le précisent généralement vos déclarations, malheureusement non respectées, sans déboucher, notamment, sur une déambulation incontrôlée -car sans services d’ordre- en centre-ville ; “que d’autres sites que la place de la Comédie soient soient retenus pour vos rassemblements, afin d’éviter notamment les troubles à l’ordre public pouvant résulter de la fréquentation de ces sites et afin d’éviter la concomittance avec d’autres manifestations ou évènements.”

Et le lendemain, alors que les organisation sus-mentionnées étaient selon elles en train de préparer une réponse au préfet, un nouvel arrêté d’interdiction de manifester tombe, en reprenant en bonne partie les arguments des semaines précédentes : l’auteur de l’attaque de la synagogue de la Grande-Motte portait un keffieh et un drapeau Palestinien, une recrudescence des actes antisémites, et les « troubles à l’ordre public » constatés précédemment (stands de BDS installés en ville sans autorisation d’occupation, plaintes déposées par plusieurs édiles du Parti Socialiste pour diffamation après diffusion d’une affiche les désignant comme complices, gouache rouge déversée sur une plaque commémorant le jumelage de Montpellier avec la ville de Tibériade).

L’arrêté mentionne également le fait que BDS ait manifesté le 30 août alors que la manifestation avait été interdite (ce qui a conduit à la verbalisation de 17 personnes). Mais surtout, le fait que “le mardi 3 septembre 2024, les deux associations “Libre Pensée 34” et “DBS” *sic* ont tenu une conférence de presse devant la préfecture en réaction à la décision du tribunal administratif, et qu’à cette occasion, des propos injurieux et diffamatoires ont été tenus à l’encontre de la communauté juive, du président du tribunal administratif et du préfet“, sans préciser lesquels.

Un argument qui indigne BDS et La Libre Pensée, lesquels répondent dans un communiqué : “Affirmer sans preuve à l’appui que nous avons porté des « propos attentatoires à la communauté denos concitoyens juifs » est une accusation qui sème l’insinuation d’antisémitisme et frôle la diffamation.L’association de juifs et juives intitulée « Union Juive Française pour la Paix » est membre de BDS France et active dans le comité BDS Montpellier depuis sa création. L’UJFP soutient toutes nos manifestations auxquelles participent ses membres. C’est facile à vérifier, depuis le 7 octobre 2023 sa représentante prend régulièrement la parole lors des manifestations. Vos services auraient dû vous en informer. Nous vous recommandons leur site et vous verrez si c’est le genre à tolérer le poindre acte, propos ou insinuation antisémite. Nous affirmons que nous n’avons jamais tenu de propos attentatoires à la communauté juive, que nous combattons l’antisémitisme à égalité avec toutes les autres formes de racisme et nous nous engageons à continuer dans ce sens. Au jour où des personnalités importantes de la vie politique dont nombreux parlementaires, souvent de manière totalement abusive, sont poursuivi.e.s pour « apologie du terrorisme », il est évident que si le moindre propos dans ce sens avait été prononcé nous serions déjà poursuivis. Nous n’avons pas à nous justifier d’un délit que nous n’avons pas commis.”

Ces deux associations ont tenté un nouveau recours en annulation de cet arrêté au près du tribunal administratif, qui a refusé de le juger.

Samedi 7 septembre, les soutiens à la Palestine ont donc manifesté aux côtés des organisations de gauche qui demandaient la destitution d’Emmanuel Macron, et ont effectué quelques prises de paroles sur la place de la Comédie en fin de manifestation pour dénoncer “l’extension du génocide en Cisjordanie”.

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