Archives - Littérature 18 novembre 2015

Trois philosophes pas encore séchés à (re)découvrir

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Ngugi wa Thiong’o

Intellectuel kenyan, écrivain talentueux aussi bien en anglais qu’en kikuyu, tel est Ngugi wa Thiongo, dont nul n’est jamais parvenu à prononcer le nom correctement hormis peut-être lui-même. Il dénonce dans son manifeste Décoloniser l’esprit l’invasion intellectuelle des puissances occidentales par l’annihilation systématique des cultures et langues locales, au profit d’une homogénéité de l’anglais et du modèle de pensée européen. Sa liberté de parole lui a valu l’emprisonnement, la torture, 22 ans d’exil et plusieurs attentats.

Miranda Fricker

Wouhou de la donzelle ! Si vous avez kiffé Judith Butler et la performativité du genre – l’idée selon laquelle le sujet, et notamment son corps, sont soumis à un pouvoir social extérieur –, vous allez adorer Mimi et l’injustice épistémique. Cette universitaire anglaise, diplômée d’Oxford, explique que l’individu, et en particulier la femme, souffre d’une perte de crédibilité dans son discours émetteur, justement parce que c’est une femme (on parle en ce cas de testimonial injustice). Cette discrimination peut être doublée d’une hermeneutical injustice, c’est-à-dire être incompris(e) par un public n’ayant pas partagé la même expérience ou ne possédant pas les mêmes codes sociaux.

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Zygmunt Bauman

Le doyen de la sélection. Plus proche du caveau que du comptoir de l’Ol Dirty Bar, l’homme n’en demeure pas moins un MC de l’Histoire, tour à tour combattant anti-nazi durant la Seconde guerre mondiale, opposant au régime communiste et spécialiste des dictatures et de la manipulation des masses. Son concept le plus fameux : l’État-jardinier, métaphore bucolique qui explique comment la modernité a conduit au massacre de masse industriel et
bureaucratique. À 89 ans, pépé Zygmunt n’a probablement plus toutes ses dents mais conserve un esprit critique intact. Au moment des attentats contre Charlie Hebdo, il a pris position pour dénoncer une société moderne liquide, hypocrite et matérialiste, conduisant à un repli communautaire méfiant et favorisant le fanatisme.

« Un multiculturalisme superficiel, une fascination pour la diversité ont envahi nos vies, qui se traduisent par un goût de la cuisine ethnique ou des festivals du dimanche, de simples flirts avec un brin d’exotisme. Des variantes du consumérisme mondial au temps de Facebook. Un système qui reconnaît la légitimité de cultures différentes de la nôtre, mais ignore ou refuse tout ce qu’elles comportent de sacré et de non négociable. »

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