Réunion syndicats/gilets jaunes ; Une convergence impossible ?
Six mois après le début du mouvement et à la suite de quelques tentatives de convergence qui n’aboutissent jamais, une réunion débat autour de la question de la convergence entre gilets jaunes et syndicats a eu lieu ce jeudi 23 mai à l’initiative des gilets jaunes de la commission convergence 34 et du Rond-point des près d’arènes, au bar le Dôme a Montpellier. Plusieurs organisations syndicales ont été conviées à cette réunion dont la CGT, FO, solidaires ou encore la CFDT.
Si les gilets jaunes ont pris l’initiative de tendre la main aux organisations syndicales, leur appel est resté lettre morte et seulement deux syndicats (la CGT et l’union syndicale Solidaires), parmi les huit conviés, ont répondu à leurs invitations.
La réunion débat débute alors à 18h25 au moment où deux gilets jaunes montpelliéraines ont lancé un appel aux dons pour Dylan, gilet jaune d’à peine 18 ans éborgné lors de l’acte XXIII à Montpellier. Les prises de paroles se sont dès lors enchainées et se sont cristallisées autour du rejet d’une grande partie des gilets jaunes, représentés par leurs mandatés, d’une éventuelle convergence avec les organisations syndicales malgré la tentative de quelques-uns de recentrer le débat autour des actions communes à mener.
« Telle était l’espérance de tous ceux qui ont participé à ce mouvement »
Une gilet jaune a pris la parole et a souligné le fait que selon elle la convergence semblait être naturelle « dans toutes les assemblées générales des secteurs en lutte (hôpitaux, écoles…) les Gilets jaunes se mobilisent et sont présents » et que même si « au début il y avait une méfiance à l’égard des syndicats et toute tentative de rentrer dans un cadre », aujourd’hui le contexte est tout autre et que « la situation l’exige ». Il existe selon elle un lien de complémentarité entre les syndicats et les gilets jaunes « nous on a notre force de mobilisation et vous votre force d’organisation ».
Cette intervention, autant bienveillante que complaisante à l’égard des organisations syndicales, n’a pas eu l’effet attendu. Richard, gilet jaune de Montpellier a participé au défilé du 1er mai où gilets jaunes et organisations syndicales ont tenté une convergence « Il y a eu des discussions autour de cette convergence, discussions qui ont été l’objet de controverse. Dans toutes les assemblés générales les gilets se sont mis d’accord sur leur volonté de rester indépendant, chacun participait à ce mouvement avec ces appartenances; CGT, parti communiste, anarchistes etc… et puis ils ont essayé d’abandonner leurs idéologies qu’elles soient extrémistes, sectaires ou autre pour essayer de créer une grève générale et avancer. Telle était l’espérance de tous ceux qui ont participé à ce mouvement. Cela étant dit, ça n’empêche pas de parler de ce qui s’est passé le 1 er mai. La CGT est arrivée avec ses gros bars, son camion et a voulu prendre le cortège de tête avec madame Ressiguier drapé de stickers de la FI et ont dit aux gilets jaunes « vous c’est derrière ». Ce sont des pratiques qui, pour certaines personnes, ont paru un petit peu dictatoriales pour ne pas dire staliniennes ».
Un autre gilet Jaune, d’origine New-yorkaise a appelé les gilets jaunes à ne pas oublier le rôle que la CGT a joué pendant les mouvements de grève de 1936 et de Mai 1968 ainsi que leur choix d’être des partenaires, pour ne pas dire collaborateurs, des gouvernements en place. Ce rappel historique a largement été partagé par les gilets jaunes du Bassin de Thau qui ont maintenu leurs refus de travailler avec les organisations syndicales, refus voté à l’unanimité à leur dernière assemblée générale. L’un des leurs pose par ailleurs le constat selon lequel « Les syndicats en tant qu’organisation auraient fait le choix, depuis des années déjà, d’être dans le dialogue social. » et que quant à lui il ne fera pas « 4/5 jours de grève pour qu’à la fin un délégué syndical me dise « on va aller à la table des négociations » car il n’y a rien à négocier »
Et maintenant ? Organisations syndicales ou Auto-organisation ?
Cette réunion débat aura duré 3h, sans qu’aucune décision concrète ne soit prise si ce n’est une liste de contacts. Plusieurs actions ont été proposées; grève, occupation, désobéissance civile ou encore dialogue social mais la tension palpable n’a pas permis à ces propositions d’être concrétisées.
Si la convergence entre organisations syndicales et gilets jaunes ne s’avère pas être envisageable aujourd’hui, les membres de la commission convergence 34 semblent être déterminés à faire perdurer le débat et à fédérer les gilets jaunes autour de l’importance de cette convergence. Un pari qui semble être intenable. L’opposition manifeste des gilets jaunes reflète à sa manière le rejet global des institutions existantes et de tout « dialogue social » avec un gouvernement avec lequel le “dialogue” se résume à des gaz lacrymogènes, des mutilations et des arrestations arbitraires.
Cependant, les gilets jaunes affichent une volonté claire de continuer la lutte et de créer de nouvelles formes d’organisations, indépendantes des organes traditionnels. Affaire à suivre…
Nos articles sont gratuits car nous pensons que la presse indépendante doit être accessible à toutes et tous. Pourtant, produire une information engagée et de qualité nécessite du temps et de l’argent, surtout quand on refuse d’être aux ordres de Bolloré et de ses amis… Pourvu que ça dure ! Ça tombe bien, ça ne tient qu’à vous :