Trois policiers biterrois mis en examen après la mort de Mohamed Gabsi | Entretien avec Houda Gabsi
Depuis ce vendredi 18 décembre, trois policiers municipaux de la ville de Béziers ont été mis en examen, en lien avec l’affaire Mohamed Gabsi. Le 8 avril, le trentenaire meurt dans les locaux de la police, après son interpellation par la police municipale. Le Poing a pu s’entretenir avec Houda Gabsi, la sœur de Mohamed et une des animatrices du collectif Justice pour Mohamed.
Le Poing : Trois policiers ont été mis en examen dans l’affaire qui a mené à la mort de ton frère. Tu y vois un signe que les choses avancent ?
Houda Gabsi : Oui, évidemment, et c’est un soulagement, le signe qu’on ne se bat pas pour rien. Parce que depuis plusieurs mois, on était sans nouvelles de l’affaire, malgré des rapports d’autopsie tout à fait clairs sur les causes de la mort de mon frère. Parce que depuis plusieurs mois, on se mobilise, on manifeste, on fait de l’information auprès des gens de Béziers et d’ailleurs, avec le collectif Justice pour Mohamed.
Trois des policiers présents le soir du 8 avril ont été placés en garde à vue, puis déférés devant le tribunal de Béziers ce vendredi 18. La magistrate chargée de l’instruction a décidé de mettre deux d’entre eux sous le régime de témoins assistés pour les faits de violences, et de les mettre en examen pour “non-assistance à personne en danger.” Le plus impliqué, celui qui était assis sur mon frère dans la voiture, est mis en examen pour “violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner”.
Finalement, ce dernier est placé sous contrôle judiciaire jusqu’au procès, avec une interdiction d’exercer dans la police et de porter une arme.
Le Poing : On est coutumiers des procès, en particulier ceux des personnes inculpées en rapport avec les mouvements sociaux. Et bien souvent, quand une affaire relativement grave implique plusieurs personnes, il y a un placement en détention provisoire, pour éviter que les accusés ne se concertent entre eux. Ici ce n’est pas le cas…
Houda Gabsi : Oui, ça nous a étonnés aussi. D’autant que les agents en question ont déjà produit des témoignages sur la violence de mon frère au moment des faits, qui ne sont confirmés ni par les vidéos de l’interpellation, ni par les témoignages qu’ont à eu plus récemment. Ceux-là appuient au contraire sur la violence volontaire d’un des policiers, qui prononce d’après les témoins des phrases comme “Je vais te faire dormir”…
Mais ce n’est pas l’essentiel, je suis très heureuse des décisions prises par la juge, parce que de toute manière, on a beaucoup de preuves pour que justice soit rendue, même si on ne sait pas encore si les témoignages les plus récents ont été versés au dossier.
Le Poing : Deux des policiers municipaux sont accusés de “non-assistance à personne en danger”. Pourtant des renforts ont été appelés, et sur place il y en avait beaucoup plus ce soir-là. Comment est-ce que tu l’expliques ?
Houda Gabsi : Il a certainement été considéré que les trois policiers qui ont “accompagné” mon frère dans la voiture vers le commissariat sont les principaux responsables.
Le Poing : Il y a des avancées donc, mais l’affaire est loin d’être terminée …
Houda Gabsi : On restera mobilisés jusqu’à la fin en tout cas. Avec le collectif on organise tous les 8 de chaque mois une commémoration, pour continuer d’informer les gens. Pour que justice soit faite pour mon frère, et pour que plus personne ne meure de croiser des policiers ! On participe aussi aux mobilisations contre la loi sécurité globale, parce qu’elle veut restreindre la diffusion des images de policiers, entre autres. Et que sans images, la mort de Mohamed aurait été complètement étouffée.
J’ai confiance, on obtiendra justice pour Mohamed !
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