Crèche de Noël à la mairie de Béziers : le tribunal administratif saisi
Comme chaque année ou presque, la Ligue des droits de l’Homme de l’Hérault a rédigé ce 22 novembre un référé au tribunal administratif de l’Hérault pour demander l’interdiction de l’installation d’une crèche chrétienne dans la mairie de Béziers, jugée en contradiction avec la loi de 1905 sur la séparation de l’église et de l’État
Voilà qui commence à devenir routinier pour la section héraultaise de la Ligue des droits de l’Homme. Comme quasiment chaque année depuis 2014, l’association vient de demander au Tribunal administratif, dans un courrier du 22 novembre que Le Poing a pu consulter, d’interdire la tenue de la crèche de Noël dans l’enceinte de la mairie de Bézierrs au motif de la stricte séparation de l’église et de l’État (et donc, de ses services publics, comme la mairie).
En effet, selon la LDH, la crèche de la nativité constitue “un élément fondateur de la religion catholique”, étant donné qu’on y trouve,“outre Joseph et Marie, l’âne et le bœuf, les apôtres, l’ange Gabriel ainsi qu’un couffin vide, comblé le soir du 24 décembre par l’installation de la figurine de Jésus tout juste né.”
Robert Ménard, déclarait lui-même le 16 juillet 2015 dans les colonnes du Point : “Cette année, il y aura donc une très belle et très grande crèche à l’entrée de la mairie pour rendre hommage à la naissance du Christ”. Rien à voir donc, pour la LDH, avec un motif culturel, festif ou artistique, admis par la loi depuis 2015. Il s’agit bien là d’une connotation purement religieuse.
Sauf que cette année, Robert Ménard, maire d’extrême-droite de Béziers, a demandé l’installation de la crèche dans le cadre d ‘une autorisation d’occupation du domaine public, un terme juridique propre aux collectivités locales. Cette décision a été contestée par un recours de la LDH pour “excès de pouvoir”.
Un conflit qui dure
Pour bien comprendre cette bataille juridique, une petite rétrospective s’impose. Selon la Ligue des Droits de l’Homme, Robert Ménard “contrevient aux dispositions de la loi de 1905, au principe fondamental de la laïcité, en installant une crèche de nativité au sein de l’Hôtel de Ville de Béziers dans le Hall ou dans la Cour d’Honneur de la mairie” depuis 2014.
Concernant la crèche installée en 2014, la Cour administrative d’appel de Marseille a, le 3 avril 2017, annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 16 juillet 2015, et par la même, la décision d’installer une crèche de la nativité dans le hall de l’hôtel de ville de Béziers au mois de décembre 2014. La mairie de Béziers a tenté de porter le conflit en Cassation, mais le Conseil d’État a déclaré en 2017 ce pourvoi non admissible. Premier revers.
Concernant celle installée en 2016, le tribunal administratif de Montpellier a annulé en 2018 l’autorisation d’installer une crèche dans la mairie au motif que “dans l’enceinte des bâtiments publics, sièges d’une collectivité publique ou d’un service public, le fait pour une personne publique de procéder à l’installation d’une crèche de Noël ne peut, en l’absence de circonstances particulières permettant de lui reconnaître un caractère culturel, artistique ou festif, être regardé comme conforme aux exigences qui découlent du principe de neutralité des personnes publiques.”
Nouveau revers pour Ménard en 2017 : le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier avait ordonné à la commune de Béziers de retirer la crèche de Noël installée par les festivités de fin d’année, car elle était “non conforme aux exigences attachées au principe de neutralité des personnes publiques”. Même chose en 2018.
Les choses se corsent pour la LDH à partir de 2019 : le préfet de l’Hérault, saisi à l’époque par courrier, a refusé de mettre en œuvre ses pouvoirs pour faire interdire la crèche. Idem en 2021, mais cette fois avec le sous-préfet. La LDH et plusieurs associations l’ont rencontré dans son bureau pour lui parler de la crèche, mais “il refusait de mettre en place une procédure” selon le courrier de la LDH. Un argument qui sera repris l’an dernier par le préfet, qui avait déclaré que ses prédécesseurs n’ont pas agit pour interdire la crèche.
Il aura fallu que la LDH saisisse une nouvelle fois le tribunal administratif pour que l’instance ordonne à la mairie de Béziers d’enlever sa crèche du hall de l’hôtel de Ville.
Nouveauté juridique
Retour au présent. Cette année, Robert Ménard a demandé l’installation de la crèche par le biais de “l’autorisation d’occupation de l’espace public”, prévue dans le code général de la propriété des personnes publiques.
Mais la LDH émet un sérieux doute quant à la légalité de la décision, car Robert Ménard aurait agit par “excès de pouvoir” : il ne serait pas compétent pour cela. En effet, selon les textes juridiques, seul le Conseil municipal est compétent pour prendre ce genre de décision -que le maire serait chargé d’appliquer ensuite-, et Robert Ménard aurait agit sans délibération du-dit Conseil.
La LDH demande donc une nouvelle fois au tribunal administratif, en se basant sur la loi de 1905 sur la laïcité et sur ces nouveaux éléments, de faire interdire la tenue de la crèche de la nativité dans l’enceinte de la mairie de Béziers.
E. B.
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