Montpellier : nouvelle grève chez les salariés de l’association Issue
Après une première journée de mobilisation en décembre, les salariés de l’association Issue, qui s’occupe d’un accueil de jour pour personnes sans-abris, étaient de nouveau en grève ce jeudi 8 février, pour s’opposer au non-renouvellement de CCD. Ils dénoncent des conséquences délétères pour le suivi des personnes qu’ils accompagnent
9 h 30, les salariés de l’association Issue, distribuent, comme à leur habitude, un petit déjeuner aux personnes à la rue qu’ils accompagnent au sein de leur accueil de jour, un lieu qui permet d’offrir repas, douches, machines et accompagnement à des personnes sans-abris. Seule différence : ils ne sont pas dans leurs locaux quartier Gambetta, mais devant la Direction Départementale de l’Emploi, du Travail et des Solidarités (DDETS), pour s’opposer au non-renouvellement de trois postes, qui mettraient selon eux leur mission d’accueil de jour en difficulté.
Car s’ils sont en grève, ils ne veulent pas pour autant abandonner leurs bénéficiaires, qui se servent un café pendant que Mathieu Granat, délégué syndical, explique la situation. « Quatre CDD ne vont pas être renouvelés faute de moyens, alors que nous sommes déjà en flux tendu sur notre accueil de jour à Gambetta. Nous avons déjà fait une journée de grève en décembre pour s’opposer à cela, notre direction a dit qu’elle ne pouvait rien faire et qu’il fallait voir avec le financeur, donc l’État. C’est pour cela qu’on est là, devant la DDETS. »
Actuellement, la structure est répartie sur deux lieux d’accueil de jour, un à Gambetta, et un à Richter. « Le site de Richter va être fermé trois mois de avril à juin faute de financements nécessaires, avec une réouverture possible en septembre », explique le syndicaliste. « Du coup, ce sont entre 150 et 180 personnes qu’on accompagne là-bas qui seront rapatriés dans notre local quartier Gambetta. »
« Sauf qu’on a aucune garantie de réouverture en septembre », complète Max Boyer, coordinateur du site de Richter. « Il nous manque 12 000 euros par mois. Ce ne sont pas des frais de fonctionnement, c’est pour payer les salaires. C’est pour cela qu’on demande un rendez-vous avec la DDETS, pour ne pas que le site ferme. » Une fermeture, qui selon lui, peut entrainer une rupture de lien avec les bénéficiaires. « Notre combat, c’est pour eux. »
« On reste dans le flou total »
Christine, salariée de la structure, est elle-même menacée par ces suppressions de postes. « Mon contrat va s’arrêter en mars. A Gambetta, on reçoit déjà 300 à 400 personnes chaque matin pour le petit-déjeuner, et manque de moyens pour accompagner les gens. On ne peut pas assurer le service des machines à laver et on a réduit les heures d’ouvertures, car on n’est pas assez nombreux. Donc là, on reste dans le flou total sur l’organisation. »
Pour compenser, la structure, associative, a recours à des bénévoles, qui sont des « usagers-participants », soit des personnes accompagnées volontaires dans l’aide à l’association. « Sans eux, on ne peut pas ouvrir », commente Christine.
Mohamed en fait justement partie. « Je suis venu en soutien, car grâce à Issue, j’ai eu une aide morale, j’ai pu me doucher, et ne pas rester dans la solitude que la rue impose. Si ces postes sont supprimés, il n’y aura pas assez d’effectifs pour être disponible pour tout le monde. » Aujourd’hui, Mohammed aide les autres usagers de la structure en passant des coups de fils ou en rédigeant des lettres pour eux.
« Toute une chaîne d’acteurs »
La mobilisation des salariés d’Issue a attiré d’autres travailleurs sociaux montpelliérains, venus en soutien. C’est le cas d’Anouk (prénom modifié), infirmière dans une structure médico-sociale qui travaille en lien avec l’accueil de jour. « Ce que vivent les salariés, c’est le cas dans tout le secteur. Chez nous aussi, on supprime des postes et on a recours à des bénévoles, on vit tous la même chose. Les populations à la rue ne font qu’augmenter, donc c’est du boulot supplémentaire, mais nous, on ne pourra pas tout traiter. »
Pour elle, des suppressions de postes chez Issue affecte « toute une chaîne d’acteurs » du secteur du médico-social. « Dans mon association, on dépose des gens à l’accueil de jour, s’il ferme ou que ses heures d’ouvertures se réduisent, ça va créer des sortes d’embouteillage dans le processus d’aide des gens. On le voit, les personnes à la rue restent déjà longtemps dans de l’hébergement d’urgence faute de moyens. » Une conséquence selon elle de la crise du logement qui frappe le Clapas.
Les salariés d’Issue ont demandé un entretien à la DDETS, mais ne pourront pas être reçus ce jeudi. « nous allons faire une assemblée générale, et demander un rendez-vous plus tard », conclut Mathieu Granat. La mobilisation semble donc partie pour durer.
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