Montpellier, Le Vigan, Carcassonne : la marche des fiertés s’organise partout
A Montpellier, des militant·es s’organisent à travers le “pink bloc” pour lutter contre l’institutionnalisation et le pinkwashing de la Pride par la municipalité. A Carcassonne, on se prépare contre l’extrême-droite et au Vigan, une manifestation aura lieu pour la première fois, centrée sur les problématiques LGBTQIA+ en milieu rural
Qui dit mois de juin dit Pride. A Montpellier, la désormais très institutionnelle marche des fiertés fêtera ses trente ans le 15 juin à 15 heures, avec un départ donné au parc du Peyrou. Très institutionnelle, car il n’est pas rare d’y voir, en tête de cortège, un parterre d’écharpes tricolores, dont Michaël Delafosse, maire de Montpellier.
En 2021 déjà, nous écrivions dans nos colonnes : “Le cortège s’assourdit ensuite de dance music plein tube, et le seul message perceptible est donc que toute cette foule, accompagnant les chars des associations communautaires à vocation principalement sociale et sanitaire, renonce à toute idée d’autonomie pour défiler derrière un rang d’élus et leurs proches en première ligne, ressemblant au cabinet du maire, un genre de Delafosse-block en cortège de tête (avec le premier marié gay de France obligé, le directeur du festival de danse, le sénateur jovial ceint de tricolore, etc). Le maire ? Il est en tête, après avoir désigné Montpellier « comme exemple inspirant ailleurs dans le monde », ben voyons, tandis que se déroulait du haut de l’Arc de triomphe du Peyrou une gigantesque banderole de communication vide d’enjeu : « Montpellier t’aime ».”
Face à cette récupération, des militant·es s’organisent autour du “pink-bloc”, qui aime rappeler que « The first Pride vas a riot » (La première Pride – à New York en 1969 – fut une émeute), et qui milite contre toute forme d’oppression avec des revendications politiques qui détonnent dans l’ambiance purement festive de l’évènement. La prochaine assemblée générale de préparation du Pink Bloc 2024 aura lieu le mardi 4 juin à partir de 18h30 dans la partie basse du jardin du Peyrou, entre les deux fontaines, en mixité choisie LGBTQIA+.
3eme édition à Carcassonne : auto-défense contre l’extrême-droite
Dans le département de l’Aude, la 3ème édition de la Pride de Carcassonne aura lieu le 29 juin à partir de 16 heures, avec un rendez-vous donné en face de la gare. A l’inverse de Montpellier, la marche des fiertés de Carcassonne est organisée de manière autonome et ne bénéficie pas de communication ou de soutien financier institutionnel, bien que la manifestation soit déclarée en mairie.
Peni, membre du collectif Fierté Carcassonne, explique : “Nous organisons une pride revendicative et festive, sur des bases intersectionnelles [qui articule les notions de classes, de genres et de races, NDLR] et de convergence des luttes, notamment environnementales, avec nos camarades de la Confédération paysanne de l’Aude.” Environnementales, mais aussi anti-carcérales : “Nous marquerons un arrêt devant la prison pour dénoncer le fait que des femmes trans aillent dans les prisons pour hommes sans accès à leurs hormones si elles en prennent, ou pour soutenir les hommes gays emprisonnés, qui subissent des violences, voire des viols, en raison de leur orientation sexuelle.”
Mais dans une ville qui comprend une caserne de CRS qui forme des réservistes, un régiment de parachutistes et un groupuscule d’extrême-droite, Novelum, le climat est tendu pour les organisateur·ices : “L’an dernier, on s’est fait attaquer par le groupuscule facho Novelum. Ils étaient 30 à 40, et ils avaient tagué et stické tout le long du cortège avant la manifestation. Heureusement, il n’y a pas eu de blessés”, résume Peni, qui ajoute que tout renfort pour le service d’ordre de la manifestation est le bienvenu. De plus, une cagnotte de soutien à l’évènement, pour assurer son indépendance financière, a été mise en ligne.
Contact : marchedesfiertescarcassonne@riseup.net
Au Vigan, une Première
Le 22 juin aura lieu la première édition de la marche des fiertés du Vigan, dans les Cévennes Gardoises. Lud, membre du collectif organisateur de l’évènement, raconte : “Organiser une pride ici, ça comporte des difficultés liées à la ruralité : on n’a pas beaucoup d”espaces pour se retrouver entre nous. Moi j’ai 40 ans, j’organise ça avec des personnes qui en ont 20 et qui sont contentes qu’il y ait ça au Vigan, pour les lycéens et lycéennes notamment, qu’ils puissent s’y retrouver et voir que les personnes LGBTQIA+ existent aussi en milieu rural. Moi j’ai grandi en Lozère, c’était impossible d’avoir des distributeurs de capotes au lycée ou des tests de dépistages gratuits et anonyme. Globalement, c’est dur de se visibiliser ici, il y a sans doute plus d’homophobie que dans les centres urbains. Certains ne font pas leur coming-out à cause de l’homophobie qu’ils vivent au quotidien.”
Ainsi, les revendications de l’évènement tiennent naturellement du contexte géographique du Vigan : “Nous revendiquons une pride à la fois féministe et LGBTQIA+, car avec la fermeture de la maternité de Ganges, cela réduit l’accès à l’IVG. L’accès aux soins en général est problématique ici : que ce soit pour les dépistages ou les suivis des personnes trans qui veulent faire des transitions hormonales. Et comme nous sommes dans les Cévennes, on dénonce toutes ces mouvances ésotériques et sectaires qui touchent les femmes et diversité de genre, qu’elles soient évangéliques ou centrée sur le féminin sacré. Nous sommes également pour la suppression de la notion de genre dans l’État civil, contre les mutilations sur les personnes intersexes, et pour la décriminalisation du travail du sexe.”
La Palestine sera également évoquée dans les prises de paroles lors du rassemblement. “Il faut dénoncer le pinkwashing des soldats de Tsahal qui posent en photo avec un drapeau LGBTQIA+”.
Rendez-vous est donné à partir de 11 heures avec des stands d’associations, une conférence gesticulée sur le genre et une discussion sur les problématiques féministes et queer en milieu rural. La manifestation aura lieu à 15 heures, avec un départ prévu au parc des Châtaigniers. La journée finira au local de l’Étuve, à Pont-L’hérault, avec un show drag et des DJ sets.
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