À Montpellier comme ailleurs, la mobilisation pour Steve n’est (pour le moment) pas à la hauteur
Le Poing
Publié le 1 août 2019 à 20:29 (mis à jour le 1 août 2019 à 21:34)
Près de cent
cinquante personnes se sont rassemblées hier à Montpellier pour
rendre hommage à Steve, tué par la police. La faiblesse de cette
mobilisation en dit long sur la résignation de la population face
aux violences populaires. À quand le sursaut révolutionnaire ?
« Il ne
peut être établi de lien entre l’intervention des forces de
police et la disparition de Steve Maia Caniço ». C’est
la version ahurissante de l’inspection générale de la police
nationale, reprise mot à mot par le premier ministre, à propos de
la mort de ce jeune homme de 24 ans, retrouvé noyé dans la Loire le
29 juillet. Dans la nuit du 21 au 22 juin, lors de la fête de la
musique, la police de Nantes a chargé, gazé et tiré au LBD sur des
fêtards qui dansaient sur un quai. Mais pour les autorités, il n’y
a jamais eu de charge et l’opération de police était
« proportionnée ». Personne
ne croit à cette version
officielle, et pourtant,
(presque) rien ne se passe.
Silence, on assassine
En
1986, Malik Oussekine est
tabassé à
mort par des policiers à
moto : des centaines de milliers de personnes sont
descendues
dans les
rues,
le ministre Devaquet a
démissionné
et les voltigeurs ont été
supprimés. En 2005, Zyed
Benna et Bouna Traoré meurent
électrocutés
après s’être réfugié dans
un local d’EDF pour
échapper à un contrôle de la police : les
banlieues se sont enflammés
pendant plusieurs mois. En
2014, Rémi Fraisse décède
à cause d’une grenade
offensive projetée par un policier : seuls
quelques milliers de personnes ont
manifesté.
En 2016, Adama Traoré s’étouffe
après son interpellation par la police : quelques
émeutes ont éclaté
à Paris. En 2018,
Aboubacar Fofana est
tué par balles lors d’un contrôle de police : les
quartiers populaires se sont
embrasés pendant quelques
jours. Et en 2019, Steve se
noie à cause d’une charge
policière, les autorités
mentent éhontément, et la
colère peine à s’exprimer.
Quelques
milliers de personnes ont bel
et bien manifesté à
Toulouse et
Nantes, mais la mobilisation reste (pour le moment) relativement
faible. À
Montpellier, environ cent cinquante personnes ont manifesté le 5
juillet, et ils étaient à
peu près autant hier soir. Ils
ont défilé de la place de la Comédie à la préfecture, où ils
ont déposé
des bougies et étalé
du faux sang, sous la
surveillance d’une dizaine de policiers.
Pour
l’État, la faiblesse de ces mobilisations est une démonstration
de force, qui s’inscrit dans un contexte historiquement répressif.
Le président Macron réfute le terme de « violence
policière », le ministre
de l’intérieur Castaner « ne connaît aucun
policier qui ait attaqué des gilets jaunes »,
le secrétaire d’État à l’intérieur considère que « ce
n’est pas parce qu’une main a été arrachée, parce qu’un œil
a été éborgné, que la violence est illégale »,
et la premier ministre affirme désormais avec un aplomb déconcertant
que lorsqu’une personne tombe à l’eau et se noie après avoir
été chargé par la police, ce n’est pas de la faute de la police.
« Le fascisme n’est pas le contraire de la
démocratie mais son évolution par temps de crise »
nous rappelait Bertolt Brech. Mobilisons-nous
avant qu’il ne soit trop tard : rendez-vous ce samedi 3 août à 14h sur la place de la Comédie de Montpellier.
Nos articles sont gratuits car nous pensons que la presse indépendante doit être accessible à toutes et tous. Pourtant, produire une information engagée et de qualité nécessite du temps et de l’argent, surtout quand on refuse d’être aux ordres de Bolloré et de ses amis… Pourvu que ça dure ! Ça tombe bien, ça ne tient qu’à vous :