A Montpellier, Génération Zemmour : un pot-pourri de l’extrême droite radicale locale

Le Poing Publié le 18 octobre 2021 à 18:23 (mis à jour le 19 octobre 2021 à 08:33)
Photo extraite du compte Twitter "Génération Z | Occitanie"

Eric Zemmour, candidat à l’élection présidentielle ? L’hypothèse devient chaque jour plus probable, crédibilisée par une agitation médiatique incessante appuyée sur les sondages récents. Le polémiste condamné pour ses propos racistes entretient toujours le mystère sur ses véritables intentions. Mais en coulisse et sur le terrain, ses militants s’activent pour préparer la candidature du « Z ». On retrouve dans leurs rangs des militants accumulant les étiquettes au nom de « l’union des droites » – et tant pis pour la cohérence.

Du RN à Zemmour

Un petit rappel historique s’impose. Depuis les années 80 et jusqu’en 2017, le principal parti d’extrême droite français, le Front/Rassemblement National, occupe le terrain en comptant sur une certaine stabilité électorale. Pour Marine Le Pen, nouvelle dirigeante de la PME familiale, les choses sont simples : son score augmente d’élection en élection et si Emmanuel Macron a mis à mal les anciens partis de droite et de gauche, elle peut espérer apparaître comme la principale opposante au pouvoir en place. Il n’y a donc qu’à attendre le prochain scrutin pour récolter les fruits du macronisme.

Mais les choses ne se déroulent pas comme prévues. Suite au débat désastreux de l’entre-deux-tours de 2017, Marine Le Pen est pressée par son entourage de modifier son programme, pour apparaître comme une option crédible, capable de gouverner le pays. La tactique du charognard consistant à capitaliser sur les attentats et les crimes ne suffit pas pour passer le cap du second tour. Il faut encore convaincre les élites politiques et économiques… Le FN devient donc le RN et adopte un programme recentré, plus modéré en apparence. Exit le racisme décomplexé, la sortie de l’UE, le retour aux franc. Seulement voilà : après des décennies de discours ultra-réactionnaire, la base du parti est déçue, de nombreux électeurs, militants et cadres jugeant ce virage comme une trahison. Ce mécontentement ne tarde pas à être capté par Eric Zemmour qui y voit une formidable opportunité. Avec lui, pas de dédiabolisation, mais des outrances pour occuper l’espace de la droite radicale. Ce qui attire de nombreux jeunes tombés en désamour avec Marine Le Pen…

On prend les mêmes et on recommence

Cette « union des droites » fantasmée depuis des années, portée par divers médias, personnalités et influenceurs influents, s’illustre dans les faits à Montpellier. On retrouve dans la petite équipe portant la campagne Zemmour des membres du groupuscule antisémite et royaliste Action Française, des ex-RN, des militants du syndicat étudiant de droite (liée aux Républicains) l’UNI… Mais, surprise, il s’agit des mêmes individus.

Ainsi, des étudiants comme Riyan B. ou Pierre M. ont milité localement pour l’Action Française, participant aux activités et taguant la nuit croix celtiques et fleurs de lys (peut être sous l’emprise de l’alcool au regard du résultat). Rappelons que le principal dirigeant de l’AF, Charles Maurras, qualifiait la Résistance de « terroriste » et appuyait Pétain. Mais les deux mêmes étudiants sont également impliqués activement dans l’UNI Montpellier. On retrouve aussi Pierre M. au Rassemblement National, avant donc de rejoindre la campagne Zemmour. Une situation qui n’a rien d’une exception locale : à Nîmes, c’est un certain Robin C., ex-FN, qui anime l’UNI local, tout en agressant à coups de barre de fer des manifestants toulousains contre le pass sanitaire avec la bande fasciste « South Face ». Des grands écarts idéologiques prouvant à la fois l’ancrage dans l’extrême droite de l’UNI, démentant le discours officiel du syndicat, et la faiblesse des effectifs de tous ces groupes, qui en sont réduits à voir leurs adhérents multiplier les casquettes (au propre comme au figuré).

Un autre exemple montpelliérain : comme le prouvent les vidéos du meeting du 16 octobre d’Eric Zemmour à Béziers, de jeunes fascistes locaux déjà évoqués dans le Poing – Clément N., Florian L. et Athenais N., étaient également présents. Rien de surprenant après l’annulation du meeting montpelliérain (officiellement faute de salle appropriée, ce qui en dit long sur l’implantation du candidat) : si ces individus avaient lancé le groupe « Jeunesse Saint Roch » sur le modèle du Bastion Social, on les trouve également à l’Action Française, à la Ligue du Midi, avec la South Face, etc. Plus d’étiquettes que de membres et une confusion idéologique totale, entre catholicisme intégriste, paganisme, et références nazies.

Et les autres ?

Longtemps, le Front/Rassemblement national a pu garantir une rente à ses membres : postes d’élus, permanents… L’argent des subventions nourrissait l’appareil. L’affaiblissement de la marque Le Pen pousse les carriéristes et les radicaux à aller voir ailleurs. Il est donc possible que d’autres personnes et d’autres groupuscules soient entrainés dans la dynamique de la campagne Zemmour, au risque de multiplier les exactions, les scandales et le ridicule. La Ligue du Midi a ainsi eu jusque-là des positions plutôt favorables au candidat d’extrême droite. Il réalise le vieux fantasme du clan Roudier d’une candidature unitaire bien marquée à droite, sans programme social mais assumant l’outrance sur les classiques thèmes du triptyque Islam-Immigration-Insécurité.

Profitons-en pour noter que cela correspond tout à fait aux intérêts de classe des dirigeants de la Ligue. Le fait que la famille Roudier possède des propriétés telles que le château d’Isis est connu de tous. Il n’en va pas de même pour les seconds couteaux, tels que Florence V., suppléante de Richard Roudier lors des élections cantonales à Sumène, dans le Gard. Son mari est Stephan V., directeur général délégué du Casino de la Grande Motte au chiffre d’affaire de 14 millions d’euros pour l’année 2020. Une famille intéressante et représentative de ce milieu socio-politique, puisqu’un de leurs enfants, Tristan V., passionné d’armes à feu ayant tenté sans succès d’agresser des adversaires politiques, militait aussi à l’Action Française avant de rejoindre Jeunes d’Oc – nouvelle structure lancée par l’ex dirigeant de Génération Identitaire, Jérémy V. Et cela alors que plusieurs anciens cadres du mouvement identitaire s’engagent aujourd’hui dans la campagne Zemmour. Le monde est décidément petit.

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