A Montpellier, le rassemblement pour le climat a bien eu lieu

Le Poing Publié le 14 mars 2020 à 17:49 (mis à jour le 13 décembre 2020 à 20:01)

Plusieurs centaines de manifestants ont inventé une nouvelle façon d’investir la Comédie, en refusant de s’incliner devant l’interdiction des rassemblements.

Affirmer l’urgence des enjeux, la force de l’activisme militant, face au honteux green-washing de tous les candidats aux municipales, tous écolos, maire bétonneur en tête. Affirmer la ténacité de la rue montpelliéraine, face au chantage des phobies sanitaires brandi en alibi sécuritaire. Affirmer la dénonciation du système capitaliste à l’origine de la tragédie climatique, face aux tenants de la cogestion “apolitique” de la crise. Etc. Il y avait décidément beaucoup de raisons de se retrouver ce samedi 14 mars 2020 sur la Comédie, et d’y braver l’interdiction nouvelle de tout rassemblement au nom du coronavirus. Du moins la détourner.

Sans guère de surprise, c’est le rassemblement des associtations militantes et autonomes, composantes du mouvement social qui a adopté cette attitude, tandis que l’autre rassemblement prévu, celui des “citoyens pour le climat” (et pour Jean-Louis Roumegas candidat aux municipales qui les manipule allègrement) était bel et bien annulé. Sur la Comédie, malgré les difficultés de l’heure, une militante d’ANV-Cop 21, rayonnait tout sourire : « notre collectif a dégagé une énergie et une ambiance extraordinaires, dont on avait bien besoin dans la foulée du mouvement des retraites. Les dernières quarante-huit heures n’ont pas été simples, mais sans faire baisser l’implication ».

La marche était donc annulée, puisque plusieurs entités n’en voulaient plus dans le contexte du coronavirus. Mais le collectif organisateur annonçait qu’il serait néanmoins présent sur la Comédie, « pour porter ses revendications sous une autre forme ». Environ trois cents personnes se sont présentées, ne disons plus “rassemblées” – et sans doute un total d’un petit demi-millier au gré des allées et venues, dont un noyau Gilets jaunes toujours bien visible et déterminé à entamer sa montée sur la préfecture plus tard dans l’après-midi.

Avant quoi la manif climat a produit un genre d’installation-performance, en aplliquant mais détournant les consignes d’éloignements entre personnes, d’où un grand étalement du pied du parvis de l’Opéra jusqu’au-delà des Trois-Grâces, en englobant un moment l’orchestre de musiques tziganes poussant son Bella Ciao. Le style est celui des écriteaux en grand nombre, avec slogans griffonés à la main, pleins de diversité et d’authenticité. Au total : un genre indéit d’occupation des lieux, qui a vraiment de l’allure, dispersé mais connecté, assemblé mais diffus, chacun se sentant figure plus active, en vue face au monde, que seulement rassuré dans l’entre-soi compact des vieux complices aux convictions partagées.

On lit, parfois on crie : “Plus de ruches, moins de riches“, “moins d’Amazon, plus d’Amazonie“, “Soyons réalistes, soyons solidaires“, “Pour que demain ne devienne pas hier”, etc. Une allocution sur sono renvoie Macron à ses contradictions, quand il assure appliquer à la lettre les recommandations des scientifiques face au coronavirus, alors qu’on reste sourd à ces mêmes savants, pendant des années sur la crise climatique. Dans ce vrai-faux rassemblement de plus de cent personnes, on est très clair, on dénonce ceux qui, « étant aux manettes ne réinventent rien ou si peu. Ils continuent à nous conduire dans le mur. Voire, cyniques, ils cherchent dans la destruction à l’oeuvre la perspective de nouveaux profits ». Et on se tourne vers « les personnes migrantes, souvent premières victimes des dérèglements climatiques », « la jeunesse avec son désir d’un avenir vivable », les Gilets jaunes qui osent et continuent de se battre pour plus de justice sociale.

Il faisait un temps magnifique, inouï sur ce samedi. Des bannières déroulantes, attachées aux bustes des Trois Grâces, portaient leurs slogans percutants. Comme celui-ci : “47° en juin 2019 à Montpellier – On pousse le thermostat ?”. On en est là : coronavirus ou pas, quand un 14 mars paraît si chaud, si beau, voilà que ça devient raison de s’inquiéter plutôt que se réjouir. Donc se mobiliser.

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