À Sète, des militant·es perturbent un concours de Biotope et dénoncent le « greenwashing » du bureau d’études
Une vingtaine de militant·es écologistes ont interrompu mardi 16 décembre la finale du concours du « meilleur naturaliste », organisée par Biotope au théâtre Molière de Sète. Ils et elles accusent le bureau d’études en environnement de mettre l’expertise naturaliste au service de projets destructeurs et de multinationales comme Total ou Vinci
Ce mardi 16 décembre au soir, une vingtaine de membres des Naturalistes des terres et des Soulèvements de la Terre ont fait irruption sur la scène du théâtre Molière de Sète, en plein final du concours du « meilleur naturaliste » organisé par Biotope. Une action spectaculaire destinée à dénoncer, selon eux, l’utilisation des pratiques naturalistes pour « cautionner la destruction des écosystèmes » et le « greenwashing » opéré par l’entreprise.
Fondé en 1993 et basé à Mèze, Biotope se présente comme un acteur majeur de l’ingénierie écologique et de l’expertise naturaliste. Le bureau d’études intervient notamment dans la réalisation d’inventaires faune-flore et d’études d’impact environnemental, obligatoires pour de nombreux projets d’aménagement. Un rôle central, qui lui vaut d’être régulièrement sollicité par des collectivités, mais aussi par de grandes entreprises industrielles.
« Blanchiment de projets écocides »
Cette irruption s’inscrit dans la continuité d’une première action menée en mai dernier, avec le déploiement d’une banderole sur les locaux de Biotope. En cause : une enquête de Mediapart publiée en février, qui met en lumière le rôle de Biotope dans l’accompagnement de projets industriels et d’aménagement très contestés. Le média d’investigation évoque un véritable « blanchiment de projets écocides », documents internes et factures à l’appui.
Selon Mediapart, entre 2015 et 2022, TotalEnergies aurait commandé au moins 36 prestations à Biotope pour un montant avoisinant les 900 000 euros, notamment dans le cadre de mégaprojets pétrogaziers à travers le monde. L’enquête pointe également des conflits d’intérêts structurels, liés à l’absence d’intermédiaire entre les porteurs de projets et le bureau d’études, ainsi qu’une priorité donnée à la satisfaction des clients plutôt qu’à la protection effective de la biodiversité, malgré le caractère obligatoire et censément indépendant de ces études environnementales.
Une « rigueur scientifique » contestée
Dans le théâtre Molière, la soirée donc démarre sous le signe du cafouillage. Des agents d’accueil expliquent avoir confondu l’entrée des finalistes et celle des spectateur·ices, laissant entrer sans contrôle plusieurs militant·es. Environ 250 personnes assistent à l’événement, retransmis en direct sur YouTube.
Le président de Sète Agglopôle Méditerranée ouvre la cérémonie en se félicitant de la « belle histoire » de Biotope et de ses « avancées pour la reconnaissance du vivant ». Une référence qui fait grincer des dents chez les opposant·es, lesquel·les rappellent plusieurs controverses autour d’études jugées lacunaires, notamment sur la prise en compte d’espèces protégées.
Le président de la fondation Biotope lui succède, saluant une « communauté naturaliste partageant la même exigence de rigueur scientifique ». Un discours largement contesté par une partie du milieu naturaliste et par les militants présents, qui s’appuient sur des révélations de Mediapart évoquant des négligences, des conflits d’intérêts et une impartialité jugée insuffisante dans certaines études environnementales pourtant obligatoires.
Au moment de la remise des prix, une vingtaine de personnes montent sur scène, le visage masqué par des têtes d’animaux emblématiques de luttes écologistes locales et internationales. Une banderole est déployée : « Biotope agit pour la conservation… des profits de Total, Vinci, etc. » L’un des finalistes prend alors la parole pour dénoncer une « tentative de greenwashing » et « l’indécence » d’un tel concours, sous les huées d’une partie du public et les regards médusés des représentants de l’entreprise.
Les militant·es critiquent également un événement dans lequel les pratiques naturalistes deviendraient « un capital monétisable et concurrentiel », au détriment des enjeux écologiques réels. Après leur intervention, une enceinte dissimulée dans le théâtre diffuse un message dénonçant des logiques « coloniales et destructrices » et appelant à rejoindre les luttes locales pour « penser l’usage du territoire avec ses habitants, humains et non humains ».
Nos articles sont gratuits car nous pensons que la presse indépendante doit être accessible à toutes et tous. Pourtant, produire une information engagée et de qualité nécessite du temps et de l’argent, surtout quand on refuse d’être aux ordres de Bolloré et de ses amis… Pourvu que ça dure ! Ça tombe bien, ça ne tient qu’à vous :
ARTICLE SUIVANT :

