“Censure” : le président de l’Université de Montpellier interdit une conférence sur la Palestine

Elian Barascud Publié le 20 mars 2024 à 10:20 (mis à jour le 20 mars 2024 à 10:25)
Le 12 mars dernier, une manifestation universitaire de soutien à la Palestine a eu lieu à Montpellier dans le cadre d'une journée de mobilisation européenne dans les campus. (Image d'illustration/"Le Poing")

Pierre Stambul, porte-parole de l’Union Juive Française Pour la Paix (UJFP) devait donner une conférence sur la Palestine le lundi 25 mars à l’Université de Montpellier dans le cadre de l’Israël Apartheid Week, mais Philippe Augé, président de l’UM, a refusé, “en raison des propos qui pourraient y être tenus et provoquer des troubles à l’ordre public”. Les organisateurs dénoncent une “censure”

La “polémique” montée de toutes pièces la semaine dernière à propos d’étudiants de Sciences Po Paris qui auraient, selon les médias dominants, refusé l’accès à une étudiante juive lors d’une conférence sur la Palestine, aurait-elle suscité la panique à la présidence de l’Université de Montpellier ?

Dans le cadre de L’Israël Apartheid Week, une campagne visant à “sensibiliser à l’apartheid israélien, de développer le soutien à la campagne BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) afin de mettre fin à ce système d’oppression et de créer des réseaux et renforcer les liens entre la lutte de libération palestinienne” qui a lieu chaque année du 25 au 31 mars, le syndicat Sud Educ 34 a fait une demande de mise à disposition d’une salle à l’Université de Montpellier pour accueillir une conférence de Pierre Stambul, porte-parole de L’Union Juive Pour la Paix (UJFP), le 25 mars.

Mais dans un courrier du 12 mars, Philippe Augé, président de l’Université de Montpellier, a refusé la mise à disposition d’une salle. Pour lui, “un tel événement est susceptible de porter une atteinte excessive au principe d’indépendance du service public de l’enseignement supérieur […] en raison des propos qui pourraient y être tenus et provoquer des troubles à l’ordre public“.

Il mobilise également des arguments juridiques : “Le service public de l’enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique ; il tend à l’objectivité du savoir ; il respecte la diversité des opinions. Il doit garantir à l’enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, créateur et critique” (article L141-6 du Code de l’éducation). Ou encore : “Tout établissement d’enseignement supérieur doit veiller […] à l’indépendance intellectuelle et scientifique de l’établissement, dans une perspective d’expression du pluralisme des opinions” (CE, décision n°347171 du 7 mars 2011).

“Ces textes sont censés défendre la liberté d’expression, de réunion, les libertés syndicales et d’opinions, Philippe Augé les retourne et renverse leur sens”, dénonce Marc Lenormand, professeur d’université et militant à Sud Educ 34. “Pour lui, l’indépendance du service public, ça veut dire qu’il ne faut pas parler de politique à l’Université.”

Un communiqué, signé par les organisateurs et soutiens de la mobilisation en faveur de la Palestine, prolonge l’analyse en dénonçant une “censure” des voix juives pour la paix : “Loin de préserver l’indépendance du service public et des établissements d’enseignement supérieur de l’emprise politique et idéologique, elle [la décision de l’Université de Montpellier] se fait au contraire le prolongement des discours d’une extrême-droite et d’une droite extrême qui, de la fachosphère aux bancs de l’Assemblée nationale, s’emploient à diaboliser toute manifestation de solidarité avec le peuple palestinien sous les bombes depuis bientôt 6 mois, et dans un renversement inique présente comme un danger le large mouvement populaire de solidarité avec le peuple palestinien et contre le génocide en cours dans la Bande de Gaza.”

L’UJFP et Sud Educ, ainsi que les signataires du communiqué, appellent à “la défense des libertés publiques dans l’enceinte des universités et en dehors, ainsi que de l’indépendance du service public” et annoncent que la conférence de Pierre Stambul, prévue le 25 mars, se tiendra malgré tout, l’heure et le lieu restant à préciser.

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