Il y a six ans, la police éborgnait Casti près du stade de la Mosson

Le Poing Publié le 21 septembre 2018 à 13:56 (mis à jour le 26 février 2019 à 23:57)

Il y a six ans jour pour jour, un soir de match aux abords du stade de la Mosson, à Montpellier, la police éborgnait Casti, supporteur montpelliérain de la Butte Paillade. Malgré des preuves accablantes, le policier qui a tiré au flashball a bénéficié d’un non-lieu. Retour sur une affaire qui pose la question de l’impunité policière.

Mensonge policier

Dans un premier temps, un rapport de l’inspection générale de la police nationale blanchit le policier et évoque une situation de « légitime défense » dans un contexte d’échauffourées avec les supporteurs. De son côté, l’avocat de Casti affirme que les échauffourées ont éclaté après le tir de flashball, et non avant. En mai 2014, le procureur requiert un non-lieu. Mais le 30 août 2016, sur décision de la chambre d’instruction, Casti est autorisé à visionner les images de la vidéosurveillance du stade de la Mosson, en présence du policier mis en cause. La version policière s’écroule : la vidéo prouve que les échauffourées ont éclaté après le tir de flashball, et non avant. Le policier mis en cause explique alors au juge… qu’il n’est finalement pas l’auteur du tir !

Recours au tribunal administratif

N’importe quel justiciable qui changerait de version au bout de quatre ans serait considéré comme un menteur par les juges et pourtant, le policier a bénéficié d’un non-lieu en novembre 2017. Dans un communiqué publié hier, Casti nous apprend qu’il a « fait les démarches pour faire un pourvoi en cassation, mais là aussi, ‘‘aucun motif de cassation valable n’a été retenu’’ […] Au niveau national, il ne me reste plus que le tribunal administratif […] L’audience aura lieu le 2 octobre 2018 au tribunal administratif de Montpellier, celles et ceux qui souhaitent y venir sont bien évidemment les bienvenu·e·s, j’y serai, avec l’espoir qu’au bout de tant d’années, une juridiction prenne conscience que ce 21 septembre 2012, il y a bel et bien eu une faute ayant entraîné ma mutilation ».

Aujourd’hui les ultras, demain tout le monde

Au-delà de l’affaire Casti se pose la question de la répression des supporteurs. Interdictions et restrictions administratives de déplacement, autorisation des clubs à ficher leurs supporteurs, condamnations pénales pour avoir utilisé un fumigène : « le stade est devenu un laboratoire des politiques répressives » selon le professeur d’histoire Sébastien Louis.* La condition des ultras, souvent considérés comme des sauvages, intéresse peu de monde. Mais les mesures de répression qu’ils subissent s’élargissent peu à peu au reste de la population, à l’image de ces militants politiques interdits de manifestation.(1) Si Casti a pris la plume hier pour rédiger son communiqué, c’est d’ailleurs pour « tous les autres blessé·e·s ou celles et ceux qui se retrouvent aujourd’hui face à ces armes, dans les stades, les manif’ et dans les quartiers dits populaires ».

Source :

« Le stade est un laboratoire de la répression », So Foot, 21 décembre 2017.
(1) « Quand l’état d’urgence rogne le droit de manifester », Le Monde, 31 mai 2017.

Pour approfondir :

« France. Des policiers au-dessus des lois », Amnesty International, 2 avril 2009.
« Harcèlement : Casti, supporter de la Butte Paillade éborgné par la police, condamné à 2 mois ferme pour ‘‘outrage’’ », Le Poing, 6 avril 2017

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