L’Astragale de Sète se mobilise pour un détenu maltraité par l’administration pénitentiaire

Le Poing Publié le 17 septembre 2018 à 17:58 (mis à jour le 27 février 2019 à 00:00)

L’Astragale, local de Sète au service « des luttes sociales et des solidarités concrètes », a organisé hier midi une « cantine de solidarité aux prisonniers et prisonnières » à laquelle une cinquantaine de personnes se sont conviées. « L’intégralité de la recette de la cantine ira à des familles de détenus pour les aider à payer les frais d’avocat et à envoyer les mandats en prison » précise la présentation de l’événement. En l’occurrence, l’argent a été remis aux proches de M. C., un détenu dont l’état de santé inquiète l’observatoire international des prisons (OIP).

5 jours sans pouvoir vider sa poche à excréments

Le 28 avril 2017, suite à une course-poursuite, M. C. se fait tirer dessus à plusieurs reprises par des policiers, qui l’accusent d’avoir foncé sur eux. « Il s’est fait toucher aux fesses, à l’intestin – du coup il a une poche [qui sert à recueillir ses selles, ndlr] –, et il a toujours une balle dans la jambe, qui ne peut pas être retirée car elle est trop proche de l’artère » nous confient les sœurs du détenu. « C’est compliqué pour lui de marcher. Parfois, il ne peut plus bouger. » Placé en détention provisoire le 17 mai 2017 à la maison d’arrêt de Perpignan, il est envoyé le 23 novembre au quartier disciplinaire. « Malgré les alertes que les deux médecins de l’unité sanitaire disent avoir envoyées à la direction, il y restera onze jours précise l’OIP. Plus grave encore, il ne pourra pas changer son matériel médical pendant cinq jours – alors qu’une telle poche doit être changée au moins quotidiennement. Un dysfonctionnement que la médecin chef de l’unité sanitaire, contactée par l’OIP, explique par un problème ponctuel d’approvisionnement. »(1)

Demande de remise en liberté refusée

De son côté, le syndicat policier Alliance 66 considère que M. C. « bénéficie de conditions d’incarcérations adaptées ». Par ailleurs, l’administration pénitentiaire l’accuse de profiter de sa poche « pour cacher des substances et des objets interdits » et le syndicat UFAP/UNSA déclare qu’il « refuse de se faire soigner ».(2) Les sœurs du détenu affirment quant à elles qu’il n’a pas confiance dans l’administration pénitentiaire pour le soigner, et qu’il souhaite être pris en charge « dans l’hôpital de son choix par le médecin de son choix ». L’OIP précise que les détenus dont l’état de santé est « manifestement incompatible avec le placement en détention » peuvent « solliciter une mise en liberté pour raison médicale – une démarche que M. C. aurait déjà entreprise, sans succès. »

Augmentation des tirs de policiers

Cette affaire est la triste conséquence de l’adoption en procédure accélérée, en février 2017, de la loi de sécurité publique, qui élargit les cas dans lesquels les policiers peuvent faire usage de leur arme à feu. Depuis, le nombre de tirs policiers enregistrés a augmenté de 54%, et entre juillet 2017 et mai 2018, quatorze personnes ont été tuées au cours d’une intervention de police, selon un rapport de l’inspection générale de la police nationale.(3) Rappelons aussi que dans les prisons françaises, on compte en moyenne un décès tous les deux jours, la plupart du temps par suicide.(4) La France étant régulièrement condamnée par la cour européenne des droits de l’homme pour les « traitements dégradants » infligés à ses prisonniers,(5) le gouvernement a promis de ne plus faire de l’emprisonnement « la référence unique » et a annoncé dans le même temps… la création de 7 000 nouvelles places de prison.(6)

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