Le Département de l’Hérault attaque la culture indépendante 

Le Poing Publié le 4 avril 2024 à 22:29
Capture d'écran du site hms.herault.fr le 2 avril 2024

La fermeture brutale du service de prêt de matériel scénique – HMS – du département menace des centaines d’évènements culturels dans l’Hérault

Les organisateur·ices indépendant·es d’évènements de spectacle vivant sont sous le choc depuis ce mardi 2 avril.  « Le Département de l’Hérault a pris la décision de mettre fin au prêt de matériel technique et scéniques aux bénéfices d’un tiers à compter d’avril 2024 » : c’est par ce message lapidaire sur le site départemental de HMS (Hérault Matériel Scénique) au graphisme douteux qu’ils et elles ont appris la fermeture soudaine, et sans explication, de ce service public pourtant indispensable à la survie de leurs évènements.

Dans un paysage de politiques culturelles peu démocratiques et populaires, décrétant par en haut quelle doit être « la Culture » financée par l’argent public, à travers la gestion directe d’équipements ou événements, ou bien via des politiques de subventions à la répartition inégalitaire, souvent inaccessibles aux petites structures, imposant de nombreux critères et impliquant une forte mise en concurrence, l’instrument de service public qu’est HMS permet à l’inverse une certaine démocratie culturelle. En collectivisant des moyens sans discrimination esthétique, il permet à des acteur·ices indépendant·es n’ayant pas les moyens administratifs d’avoir accès à des subventions classiques ou suffisantes à l’organisation de leurs évènements, de faire exister une offre autonome, diverse, de proximité, souvent bien plus proche des véritables pratiques culturelles du commun des mortel·les que celles proposées par les grandes institutions. Le service HMS est un instrument de soutien indispensable pour beaucoup d’acteurs culturels associatifs, indépendants, de petite taille : en prêtant du matériel technique (son, lumière, électricité…), il permet à de très nombreux évènements d’exister, portés par des structures n’ayant pas les moyens de louer ce matériel à des prestataires privés, et dont l’économie repose en partie sur le bénévolat et la débrouille.

« Il y a beaucoup d’incompréhension autour de cette décision qui promet un avenir hyper alarmant pour notre secteur. On est un territoire qui est particulièrement bien doté en initiatives citoyennes, c’est une chance. Cette décision va remettre en question le travail de beaucoup d’assos qui font un travail considérable pour faire exister des espaces de joie, de rencontre, de sociabilité. » confie Lalou de la coordination artistique de l’association Mélando. Yann, du collectif Lanceur d’Arlettes (et de cette alerte) s’exprimait dès le 2 avril : « on ne sait pas encore qui a pris cette décision, pourquoi elle a réellement été prise. Mais ce qu’on peut imaginer, c’est le nombre de festivals, d’initiatives culturelles qui dépendaient de ce service et qui ne pourront plus avoir lieu, car ces structures n’ont pas les fonds pour passer par des prestataires payants ». Même sidération côté What The Fest qui sur les réseaux sociaux lance « un appel à gueulante ». « On a droit à un post laconique moche, qui ressemble presque à un poisson d’avril ou à un hackage du KGB. Le timing est parfait. Même pas la décence d’envoyer un mail à toutes les associations pour les prévenir un peu en amont de la fin abrupte du prêt de matériel. » lit-on en description.

Si la décision est maintenue, de nombreuses structures associatives pourraient ne pas maintenir leurs évènements cette saison. C’est plus de 300 évènements par an qui seraient menacés sur le territoire, pour un total d’aide estimé à 1 600 000 euros par an, et touchant plus de 500 000 spectateurs et spectatrices estimés, d’après les chiffres du Département lui-même.

Contacté par téléphone, le service départemental qui croule sous les sollicitations confirme la soudaineté de cette fermeture qui aurait été décidé par « le cabinet du président du département» et « dont le responsable du service HMS a été prévenu vendredi dernier ». « Nous n’avons, nous même, pas plus d’explications » explique cette personne à l’accueil téléphonique. Le président du Département, c’est Kleber Mesquida, 78 ans et déjà 89 ans de mandats cumulés au cours de sa vie (on ne se lassera jamais de cette information) d’après sa fiche Wikipédia. Dinosaure du PS, fervent défenseur de la route du LIEN, sera-t-il également aux manettes d’une des coupes budgétaires les plus violentes que le secteur culturel local ait à subir dans un contexte de crise déjà difficile ?  A suivre.

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