Mal-logement : la loi « Elan » prévoit des peines de prison pour les squatteurs

Le Poing Publié le 8 septembre 2018 à 17:52 (mis à jour le 27 février 2019 à 00:07)

Le projet de loi sur l’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (loi Elan), présenté au conseil des ministres en avril, devrait être définitivement adopté par les parlementaires en septembre. L’un des objectifs officiels de la loi est de « répondre aux besoins de chacun et de protéger les plus fragiles », mais son application porterait pourtant un coup dur aux plus précaires : réduction de 100% à 10% du nombre de logements neufs accessibles aux personnes handicapées, création d’un « bail mobilité » d’une durée d’un à dix mois non reconductible et promesse de vente de 40 000 logements sociaux à des acteurs privés. La loi Elan prévoit aussi des peines de prison pour les « squatteurs », c’est-à-dire ceux qui vivent dans des bâtiments vides.

Un an de prison et 15 000 euros d’amende pour les squatteurs

L’article 58ter de la loi Elan prévoit en effet une peine d’un an d’emprisonnement, 15 000 euros d’amende et l’expulsion administrative pour l’occupation sans titre d’un local à usage d’habitation, soit la peine déjà en vigueur pour la violation de domicile. Autrement dit, si la loi prévoit déjà une peine de prison pour ceux qui occupent des résidences privatives, ce n’était pas le cas pour ceux qui habitent des bâtiments inoccupés, notamment au nom du respect du droit au logement, dont la valeur est constitutionnelle. Mais l’introduction de la notion de « local d’habitation » permettra désormais d’élargir la notion de violation de domicile, qui s’appliquera aussi à ceux qui vivent dans des bâtiments inoccupés.

2,8 millions de logements vacants en France, 12 000 à Montpellier

Le collectif « Droit au logement » (DAL) considère que la loi Elan « s’attaque […] à celles et ceux qui, pour se mettre à l’abri, vivre sous un toit et maintenir leur dignité, s’installent dans des locaux vacants, parfois vides depuis plusieurs années. » La France compte 2,8 millions de logements vacants(1) selon l’institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), dont plus de 12 000 à Montpellier(2) et dans le même temps, on dénombre plus de 140 000 sans-domicile en France(3), dont vraisemblablement plusieurs milliers à Montpellier malgré l’absence de statistiques officielles. La moitié des appels émis vers le 115, le numéro d’hébergement d’urgence, restent sans réponse(4), tant et si bien que les services sociaux redirigent parfois les sans-domicile vers… les squats. De son côté, la mairie de Montpellier s’acharne à construire des dispositifs anti-SDF et à porter plainte contre les squatteurs(5). En juillet 2017, Emmanuel Macron a juré qu’il n’y aurait bientôt « plus personne à la rue »(6) et en janvier 2018, le préfet de l’Hérault Pierre Pouëssel a promis de « permettre à des personnes mal-logés ou sans logement d’accéder à un vrai parcours résidentiel »(7). Les autorités semblent en effet avoir trouvé une solution radicale : la prison.

Sources :

(1) « 374 000 logements supplémentaires chaque année entre 2010 et 2015 », INSEE, 26 juin 2018.
(2) « Logement en 2014 Commune de Montpellier (34172) », INSEE, 29 juin 2017.
(3) « Économie et Statistique n° 488-489 – 2016 Les sans-domicile – Les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes dans la fonction publique », INSEE, 28 septembre 2016.
(4) « Hébergement d’urgence : les appels au 115 aboutissent peu », Le Figaro, 28 décembre 2017.
(5) « Philippe Saurel sur le projet des archives municipales : ‘‘Je n’ai plus le temps !’’ », E-metropolitain, 4 avril 2018.
(6) « Plus personne dans la rue ‘‘d’ici la fin de l’année’’ 2017 : Macron rappelé à sa promesse », Marianne, 26 décembre 2017.
(7) « Voeux : Pierre Pouëssel présente la feuille de route de la préfecture pour l’Hérault », E-metropolitain, 16 janvier 2018.

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