Montpellier : les gilets jaunes ouvrent un chemin pour les luttes malgré la terreur policière

Le Poing Publié le 16 mai 2020 à 22:28 (mis à jour le 19 juin 2020 à 19:26)
Ce samedi 16 mai, Montpellier a été le théâtre d'une inédite remise en question du droit à manifester assortie d’une répression féroce.

Quelques centaines de personnes à Montpellier, comme dans d’autres villes de France, une inédite remise en question du droit à manifester assortie d’une répression parfois féroce, mais aussi quelques moments de liesse, de farandole populaire : Le Poing vous immerge dans ce premier acte déconfiné des gilets jaunes montpelliérains !

Le feu qui couve sous la braise ?

Malgré l’interdiction du préfet de l’Hérault, et le contexte anxiogène lié à la persistance du coronavirus et la folle répression qui se développe ces dernières semaines, les gilets jaunes étaient là, fidèles au poste, sur la place de la Comédie. Petit à petit, ils arrivent autour des Trois grâces, jusqu’à être environ 200, pour ce premier rendez-vous déconfiné.

Les gilets jaunes se rassemblent place de la Comédie

Strasbourg, Paris, Toulouse, Rouen, Nantes, Saint-Nazaire, Bordeaux, Lyon, Grenoble, Pau, Carcassonne : autant de villes où de quelques dizaines à quelques centaines de manifestants se sont rassemblés cet après-midi du 16 mai, malgré une répression importante, souvent basée sur la dispersion des rassemblements et la verbalisation des participants. Alors même que les centres commerciaux, si rentables, sont à nouveau bondés ! Après les manifestations de soignants des jours précédents, et au vu du contexte, il se passe quelque chose, en tout cas : le feu qui couve sous la braise ?

L’Etat autoritaire, réfractaire au déconfinement des gilets jaunes

L’appel, nommé “Déconfinement réfractaire à l’Etat Autoritaire” tournait depuis plusieurs semaines sur les réseaux sociaux, rejoint par une assemblée générale de lutte tenue le 1er mai sur le serveur Discord de l’association Le Barricade : c’est dire l’impatience de certains, après deux mois de confinement scrupuleusement respecté, et une étourdissante cascade de scandales sanitaires, politiques et sociaux, de remettre le nez dehors, en force collective, de reprendre la rue !

La répression, impatiente elle aussi, fait se resserrer les cordons d’unités de maintien de l’ordre sur les protestataires, une petite demi-heure seulement après leur arrivée ! Quelques interpellations ont lieu, au motif notamment que les voies du tramway sont bloquées ! Une mère est gravement blessée par un violent coup de matraque à la tête, sous les yeux de ses enfants, elle sera prise en charge par les pompiers. Quelques autres gilets goûteront de la matraque, s’en sortiront avec des contusions mineures, heureusement. Vengeance pour certains, on nous rapporte des pneus de véhicules de police crevés pendant la manifestation.

Des appréciations différentes des gestes barrières !

Scène loufoque de gaminerie : un membre de la Compagnie Départementale d’Intervention a été aperçu en train de tousser au visage d’une observatrice des pratiques du maintien de l’ordre de la Ligue des Droits de l’Homme ! Les manifestants sont d’ailleurs quasiment tous équipés de masques, de gants… voire même de visières de protection ! Et si personne n’est venu mètre en poche, le groupe humain adopte spontanément une configuration plus dispersée qu’à l’habitude.

Rappelons-nous que, comme le prouve d’ailleurs la réouverture des parcs dans tout le pays, et comme il est dit depuis le début de l’épidémie, les espaces de fortes contamination sont plutôt des espaces fermés. Comme ces fameux centres commerciaux, ou les rames de métro et leur cohorte de premiers de corvée, que le gouvernement presse de se remettre en branle au nom de la “raison” économique.

Malgré une remise en cause inédite du droit de manifester, rien n’est encore joué !

Ne nous y trompons pas : la mécanique répressive, ô combien nécessaire au maintien des privilèges des puissants de ce monde, trouve dans ces peurs entretenues une alliée de choix ! Au bilan de cette journée à Montpellier, 25 verbalisations à hauteur de 135 euros seraient à déplorer, ainsi que sept interpellations. Cinq des personnes concernées, au moins, seraient déjà sortis, au terme d’arrestations complètement arbitraires. Dont un avec une amende majorée de 375 euros !

Contrôles et verbalisations

Symptôme le plus poussé de cette mécanique de la peur, l’arrestation de cette jeune fille, dont l’apparition montée sur des échasses décorées en forme de squelette articulé géant, avec gilet jaune, était venu émerveiller l’atmosphère, provoquant danses, farandoles, et poussée d’énergie arrachée à une ambiance étouffante !

Farandole autour du squelette en gilet jaune

Malgré cet hypocrite déchaînement répressif, cette inédite remise en cause du droit de manifestation, minimisés par Midi Libre qui après son habituel coup de fil aux services de la préfecture parlera d’une blessure légère en début d’après-midi, les gilets sont là ! Rien n’est joué pour le moment, et si le traumatisme lié à la traversée de cette crise sanitaire mettra certainement un moment à s’estomper, la colère, la révolte, sont palpables ! A nous donc d’écrire la suite de l’histoire…

Les belles photos sont de Virginie Oulhen.

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